Immigration à la carte

Selon l’avant-projet de loi Sarkozy, seuls les étrangers « à fort potentiel » sont désormais les bienvenus. Un appel à la fuite des cerveaux.

Publié le 16 janvier 2006 Lecture : 2 minutes.

La réforme de la politique française d’immigration est en marche. Rendu public le 2 janvier par huit associations de défense des droits de l’homme, l’avant-projet de loi Sarkozy durcit les conditions de séjour en France mais ouvre la porte aux étrangers « à fort potentiel » en créant un nouveau titre de résident. Délivrée à tout « étranger susceptible de participer, du fait de ses capacités et de ses talents, de façon significative et durable au développement de l’économie française, au rayonnement de la France dans le monde ou au développement du pays dont il a la nationalité », cette carte baptisée « capacité et talents » sera délivrée pour une durée de trois ans, renouvelable. Une manière d’attirer une main-d’oeuvre étrangère qualifiée, alors que le vieillissement de la population française devrait entraîner, dans quelques années, une pénurie de cadres.
Annoncé à maintes reprises par le ministre de l’Intérieur, avant d’être repris, fin novembre 2005, par Dominique de Villepin, le chef du gouvernement (voir J.A.I. n° 2343), le passage d’une immigration « subie » à une immigration « choisie » est loin de faire l’unanimité en Afrique, où l’on redoute une aggravation de la fuite des cerveaux. Alpha Oumar Konaré, le président de la Commission de l’Union africaine, dénonce ainsi ce qu’il appelle la « traite des cerveaux », qui équivaut à un « refus du droit de l’Afrique à se développer ». D’autant que les étudiants, préalablement triés sur le volet, pourraient être autorisés à rester en France pendant une période de six mois après la fin de leur cursus universitaire, afin d’y chercher du travail.
Autre bouleversement majeur du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) : la modification des règles du regroupement familial. Tous les arrivants ne seront pas traités à la même enseigne. Les « talents » pourront faire venir leur famille au bout de six mois, alors que pour les autres le délai minimum devrait passer de douze à dix-huit mois. Pour faire venir sa femme et ses enfants, un étranger devra en outre justifier de ressources suffisantes – équivalant au moins au montant du salaire minimum – et disposer d’un logement « permettant l’insertion ». Les unions entre Français et étrangers seront soumises à des contrôles afin d’éviter les mariages blancs. Enfin, les conditions d’obtention de la nationalité seront renforcées. Une maîtrise suffisante de la langue française sera notamment requise.
Comme l’ensemble du texte, la restriction de l’admission des étrangers malades provoque un tollé au sein des associations. L’avant-projet prévoit que seuls les étrangers justifiant d’un an de résidence sur le territoire et nécessitant « des soins urgents dont l’absence mettrait en jeu le pronostic vital » pourront être soignés en France. Au ministère de l’Intérieur, on rappelle qu’il ne s’agit que d’un document provisoire, sans aucun caractère officiel. Le projet de loi définitif devrait être présenté par Nicolas Sarkozy en Conseil des ministres à la mi-février, avant de passer devant le Parlement vers avril.

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