La Chine et l’Afrique
Publié le 16 décembre 2003 Lecture : 2 minutes.
La révolution chinoise a d’abord séduit presque tous les Africains. Elle garde quelques sympathisants actifs mais, de plus en plus, on la juge avec prudence. Mieux on s’informe sur la Chine, plus on connaît son expérience, et plus on est effrayé. Effrayé par quoi ?
Stupidement, par la dimension. Ce pays est trop socialiste, trop courageux, trop travailleur, trop efficace, trop grand, trop tout. Quel dirigeant africain au
gouvernement ou dans l’opposition ne voudrait pas pouvoir un jour, comme les Chinois, décider que tout est possible, que pour mobiliser le peuple entier sur un objectif il suffit de le décider, que pour fixer la dimension des pas que l’on fait dans telle ou telle autre direction, il suffit de décider d’une mesure ? En un mot, quel Africain refuserait cet immense pouvoir d’amener son peuple entier du Moyen Âge au monde moderne ?
Mais même s’ils disposaient d’un appareil aussi précis que le Parti communiste chinois, les Africains n’oseraient même pas s’en servir d’une façon totale. Pourquoi ? Parce que le peuple dans un pays africain, donc dans un petit pays, ce n’est pas une notion abstraite, ce n’est pas un chiffre. Le peuple, c’est le frère, le cousin et l’ami du cousin, le voisin des heures difficiles, le militant brillant ou obscur. Dès lors, on hésite à le manier comme un produit de laboratoire et surtout on a peur, on a peur de se tromper. On peut commettre des erreurs dans un problème de mathématiques, on n’a pas le droit d’en faire autant dans une affaire de famille.
Cette frayeur qu’on éprouve vis-à-vis de la Chine explique déjà en grande partie la réserve des Africains. Il y en a une autre presque aussi importante et tout aussi peu honorable : la Chine est une grande puissance, mais une puissance pauvre. La politique étrangère des pays africains, des petits pays, cela ne sert à rien d’autre qu’à recevoir le plus d’argent possible aux moindres conditions. La Chine mène peut-être le bon combat, elle est peut-être sur la bonne voie, elle est engagée dans un combat terrible où elle a besoin de tous ses amis, mais elle ne peut pas grand-chose pour l’Afrique
