Explosions de Beyrouth : le double choc pour CMA CGM

Les installations libanaises de l’armateur français, dont le fondateur Jacques Saadé était né à Beyrouth en 1937, et qui assure 30 % des volumes du port libanais, ont été très touchées par les explosions.

Le port ravagé de Beyrouth, le 7 août 2020. © Hussein Malla/AP/SIPA

Le port ravagé de Beyrouth, le 7 août 2020. © Hussein Malla/AP/SIPA

Rémy Darras © Francois Grivelet pour JA

Publié le 7 août 2020 Lecture : 3 minutes.

Fin juillet, Rodolphe Saadé, PDG de l’armateur CMA-CGM était à Beyrouth et exprimait dans le quotidien libanais L’Orient-Le Jour son sentiment : « J’ai constaté à quel point la situation était difficile. Le pays est au ralenti, pour ne pas dire à l’arrêt ».

Il était alors loin d’imaginer le cataclysme qui allait frapper quelques jours plus tard, le 4 août, le port de la capitale, causant plus de 130 morts, 5 000 blessés et mettant à la rue 300 000 personnes. Et dont les brutales conséquences sont aujourd’hui difficiles à évaluer.

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Cause des deux déflagrations selon les premiers éléments : l’explosion d’une cargaison de plus de 2700 tonnes de nitrate d’ammonium stockés dans un entrepôt depuis 2013. Abandonnée par ses armateurs moldaves, cette cargaison n’a jamais pu rejoindre, depuis, les rives du port de Beira (Mozambique) où elle aurait dû être acheminée, selon une première version des événements.

Car jeudi 6 août, les autorités portuaires du Mozambique ont officiellement démenti avoir été informées de l’arrivée de cette cargaison à l’époque. « L’arrivée d’un navire est annoncée sept à quinze jours à l’avance », ont indiqué les autorités mozambicaines.

Le siège libanais très sévèrement endommagé

« Bien que la destination du navire était Beira, la destination finale de la cargaison n’était pas le Mozambique mais le Zimbabwe ou la Zambie, parce que l’ammonium de nitrate sert à fabriquer des explosifs pour l’industrie minière. Et apparemment, ce type de nitrate d’ammonium n’était pas celui utilisé dans l’agriculture (comme engrais) mais dans l’industrie minière », affirme pour sa part de manière anonyme un haut responsable du port mozambicain à l’AFP.

Du côté du groupe marseillais, dont le fondateur Jacques Saadé (décédé en 2018) est né à Beyrouth en 1937, le choc de l’événement reste vif. D’autant que le siège local de l’entreprise, qui assure 30 % des volumes du port libanais, se trouve à quelques centaines de mètres du lieu de l’explosion et a été très sévèrement endommagé, précise l’entreprise dans un communiqué.

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Parmi les 261 collaborateurs de l’armateur dans le pays, on déplorait deux blessés dans un état grave, de nombreux blessés légers et un mort, précise CMA CGM. Au lendemain de la catastrophe, l’entreprise annonçait la mise en place d’une déviation de ses navires vers Tripoli (au Liban, deuxième ville du pays à 85 km au nord de Beyrouth), alors que l’accès au port de la capitale, principal porte d’entrée des marchandises, n’était plus opérationnel.

Projets en suspens

Le groupe issu de la Compagnie maritime d’affrètement (CMA, qui a acquis la CGM, privatisée en 1996) qui lança les premières lignes conteneurisées de Méditerranée, et qui s’est ancré en Afrique en rachetant la compagnie maritime Delmas à Bolloré en 2005, nourrit, malgré la crise financière que connaissait le pays du Cèdre, d’importants projets.

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Associé à son concurrent et occasionnel partenaire italo-suisse MSC, il s’était porté candidat en janvier pour obtenir la concession du port de Beyrouth face aux hongkongais China Merchants et Hutchinson et à l’émirati Gulftainer. À eux deux, ils représentent 80 % des volumes du port de Beyrouth. Mais CMA-CGM attendait la relance de la procédure d’adjudication, suspendue au plus fort de la crise sanitaire.

Le groupe avait augmenté sa participation (jusqu’à 78 %) dans le terminal à conteneurs de Tripoli, et avait commencé à exploiter fin juillet un entrepôt dans la zone franche du port de Beyrouth, venant compléter l’offre de Ceva Logistics, récemment acquis, et des entrepôts frigorifiques destinés à valoriser les productions agricoles de la plaine de la Bekaa.

« Nous avons toujours été aux côtés du Liban. Nous sommes là pour le soutenir, l’aider à sortir de cette crise. C’est pour cela que nous poursuivons les projets en cours et en lançons de nouveaux. Nous continuons de recruter et d’investir. Par nos actions, nous voulons porter un message d’espoir et encourager d’autres Libanais à avoir la même démarche » affirmait Rodolphe Saadé fin juillet. Des paroles auxquelles l’actualité donne une plus forte résonance.

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