Le Juiice, la valkyrie du rap français
Le Juiice, rappeuse d’origine ivoirienne, ouvre la voie à la trap féminine française avec un mini-album, « Trap Mama », et des titres qui claquent. Un talent à suivre de très près.
Le 2 juillet dernier, l’autoproclamée « Trap Mama » dévoilait le clip du titre « Soir », dernier volet d’une trilogie commencée avec « Matin » et « Midi ». La rappeuse Le Juiice, née de parents ivoiriens, revendique ses origines africaines, avec son afro assumée et ses punchlines bien trempées : « Le rap est devenu à la mode, comme ma couleur de peau, mais ils ne savent pas ce que c’est que de vivre dans ma peau. » Ou encore: « Cheveux crépus non je ne peux plus les lisser. »
L’artiste de Boissy-Saint-Léger, en banlieue parisienne, ne voit ni son sexe ni sa couleur de peau comme un obstacle à son ascension : « Je ne vais pas dire qu’en tant que femme noire j’ai eu des problèmes. Il y a des Blancs qui rappent depuis dix ans et qui ne sont pas à mon niveau. »
Études de finance
Le Juiice n’avait jamais envisagé de faire carrière dans le rap. Après des études de finance afin de devenir conseillère en patrimoine, Joyce, de son vrai nom, débute dans la musique il y a seulement deux ans en postant des freestyles sur les réseaux sociaux : « J’ai commencé avec une vidéo où je rigolais avec ma cousine qui me filmait. J’ai posté sur mon Instagram et j’ai eu de bons retours. J’en ai fait une deuxième, une troisième, et j’y ai pris goût. »
S’ensuivent alors des encouragements et une invitation dans l’émission « Rentre dans le cercle », un show produit et présenté par l’artiste Sofiane, qui la repère pour sa « dégaine de rappeuse ».
Après une prestation remarquée, elle gagne en notoriété en enchaînant les titres comme « No Cap », « Wells Fargo » ou « Phoenix », tout en faisant des featurings avec des artistes comme Didix et Jok’Air. Le 14 février 2020, elle sort son premier mini-album, « Trap Mama », qui vient confirmer son style singulier et officialise son entrée dans le milieu du rap.
Sonorités très « street » et rythme acéré
Avec des sonorités très « street » et un rythme acéré, le projet Trap Mama expose clairement les inspirations de la jeune femme. Bercée aux sons de Passi et de MC Solaar, elle s’éprend de la trap, qu’elle découvre grâce au rappeur américain Gucci Mane : « Le mouvement trap est arrivé et j’ai aussitôt accroché. C’était une nouvelle vague dans le hip-hop où l’on était plus libre. Les rythmiques, les basses saturées qui se rapprochent des limites du rock, du métal : c’est ce que j’ai apprécié. »
Grillz en bouche (des prothèses bling-bling posées sur les dents) assorties d’une voix rauque facilement reconnaissable, l’artiste de 27 ans affiche un flow tout droit venu des « States », où elle a vécu pendant plus d’un an.
Avec moi mâle dominant devient docile”
Adepte des paroles crues et décomplexées, elle manie l’egotrip et s’adresse particulièrement aux hommes dans ses textes : « Avec moi mâle dominant devient docile. » Celle qui dit rapper « pour apporter sa version des faits » aspire en effet à donner son point de vue dans un milieu qu’elle considère comme très masculin et où certains rappeurs dénigrent les femmes. Admirative de rappeuses américaines telles que Cardi B, Meghan Thee Stallion ou encore Missy Elliott, Le Juiice déplore le manque de talents féminins dans l’Hexagone : « Le rap français féminin est inexistant. D’ailleurs, on ne devrait pas le définir, c’est le rap tout court. »
Forte tête farouchement indépendante
Se considérant comme la seule rappeuse reconnue à faire de la trap en France, Le Juiice a un message à faire passer à toutes les rappeuses de l’Hexagone : « C’est à nous, femmes qui voulons faire du rap, de se l’approprier et de le faire à fond. »
Forte tête, farouchement indépendante, la chanteuse a créé cette année son propre label, Trap House. Elle a ainsi les mains libres pour faire les choses comme bon lui semble.
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