Sarkozy, atlantiste par calcul

Et si le rapprochement du président français avec les États-Unis était d’abord dicté par sa volonté de peser sur les affaires du monde ?

Publié le 15 octobre 2007 Lecture : 2 minutes.

Si un diplomate est par définition quelqu’un qui tourne sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler, Nicolas Sarkozy a sans doute eu raison de ne pas avoir cherché à faire carrière au Quai d’Orsay. Par nature impulsif, il ne résiste pas à la tentation de donner son avis sur tout, jusqu’à laisser parfois l’impression qu’il n’a pas véritablement pris le temps de réfléchir au préalable sur les questions débattues.
Depuis son intronisation, Sarkozy s’est signalé par ses déclarations intempestives en matière de politique étrangère. Toutes aussi ahurissantes les unes que les autres, elles sont en complète rupture avec les usages imposés par ses prédécesseurs à l’Élysée. Qui plus est, il a scandalisé tous les grands prêtres de l’antiaméricanisme dans son pays en couvrant d’éloges les États-Unis.

Pendant la campagne présidentielle, l’un de ses opposants avait accusé le candidat Sarkozy d’être un « néoconservateur américain doté d’un passeport français ». Coopté par la suite par le nouveau président, l’opposant en question siège aujourd’hui dans le gouvernement. Quant à la remarque qui l’a fait connaître, elle ne paraît guère éloignée de la réalité, comme le montrent les déclarations plutôt musclées du président français sur la question iranienne.
Sarkozy nourrit une admiration quasi viscérale pour le dynamisme et la mobilité de la société américaine. Fils d’un immigré hongrois, il a réussi à gravir tous les échelons du pouvoir et occupe aujourd’hui la plus haute fonction à la tête de l’État. C’est la version française du « rêve américain ». Il est probable toutefois que ce rapprochement avec les Américains soit aussi en partie dicté par des calculs, car Sarkozy sait bien que si l’on veut peser sur les affaires du monde, il vaut mieux être d’abord adoubé par Washington. Comme le disait un diplomate européen : « Sarkozy est quelqu’un qui aime faire bouger les lignes. C’est un suractif, un habile négociateur, un pragmatique, mais cela implique qu’il doit s’entendre avec les véritables décideurs plutôt que de se répandre en belles paroles qui finalement n’aboutissent à rien. »

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Pour l’instant, l’administration américaine est ravie que Sarkozy vienne passer ses vacances aux États-Unis, qu’il fasse des parties de pêche avec le président Bush, qu’il tienne des propos agressifs à l’égard des régimes que Washington ne porte pas particulièrement dans son cur. Mais cette connivence retrouvée du couple franco-américain a ses limites. Si l’administration Bush espère que la France de Sarkozy va se montrer tout d’un coup plus coulante sur la question des réformes agricoles pour aider à relancer les négociations commerciales du cycle de Doha, elle va au-devant de graves déceptions.
Car Sarkozy a indiqué sans équivoque aucune que l’Europe continuera d’être la priorité numéro un de la politique étrangère française. Il n’a pas, dans ce domaine, cédé aux pressions de tous ceux qui estiment depuis longtemps que « pour être plus européen demain, il faut être plus atlantiste aujourd’hui ». Sarkozy semble déterminé, pour sa part, à faire de l’Union européenne une grande puissance mondiale. S’il y parvient, il aura contribué à concrétiser le monde multipolaire dont son prédécesseur, Jacques Chirac, ne pouvait que rêver.

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