Explosions au Liban : chronique d’une catastrophe annoncée

Des autorités portuaires au président Aoun en passant par les ministres de la Justice et du Transport, tous ont eu entre les mains le dossier des 2750 tonnes de nitrate d’ammonium entreposées dans le port de Beyrouth. Et tous se renvoient aujourd’hui la responsabilité du drame du 4 août.

Vue de Beyrouth le 5 août 2020, au lendemain des explosions survenues dans le port de la capitale. © AP SIPA /Hussein Malla

Vue de Beyrouth le 5 août 2020, au lendemain des explosions survenues dans le port de la capitale. © AP SIPA /Hussein Malla

ProfilAuteur_LaurentDeSaintPerier

Publié le 17 août 2020 Lecture : 12 minutes.

Beyrouth, 4 août, 18h07. Du port, qui s’étend au pied du centre-ville, un monstre de feu fuse et se mue en une sphère vaporeuse qui enfle, terrifiante et fascinante.

Dans un rugissement d’apocalypse, un raz de marée de gaz comprimés engloutit la capitale libanaise, fracassant tout dans sa course, entrepôts, grues, arbres, voitures, façades d’immeubles, vieilles bâtisses. Le souffle fait éclater toutes les vitres des bâtiments dans un rayon de plusieurs kilomètres.

Derrière elles, de nombreux Beyrouthins, surpris par une première explosion trente-cinq secondes plus tôt observent et souvent filment l’incendie qui fait rage depuis une demie heure avant dans la zone du port.

Apocalypse

Ils sont criblés d’éclats, projetés aux sol ou soulevés contre les murs par la force de l’explosion, comme des milliers d’autres citadins qui vaquaient à leurs occupations quotidiennes sans se douter du cataclysme qui allait s’abattre sur le cœur de Beyrouth, brisé en cette fin d’après-midi estivale.

Du hangar numéro 12 vient de partir l’explosion la plus phénoménale qu’aient jamais entendu les montagnes libanaises, pourtant habituées aux guerres et aux bombes.

Plus de 170 vies sont fauchées et les logements de 330 000 personnes dévastés

Plus de 170 vies sont fauchées et moins de la moitié des structures médicales restent en état de soigner les 6000 blessés. Les logements de 330 000 personnes sont dévastés.

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Dominant de ses 50 mètres le hangar 12, le grand silo qui conservait la réserve céréalière du Liban est éventré. Il a fait rempart et protégé un côté de la ville, comme la mer qui a absorbé une grande partie de l’onde de choc. Sans cette double protection, la catastrophe aurait été bien plus meurtrière.

Rapidement, l’information court que 2750 tonnes de nitrate d’ammonium, un sel détonnant dans des conditions instables et utilisé comme fertilisant ou complément d’explosif, étaient stockées dans le hangar depuis 2013.

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À la place de l’entrepôt, les photos satellites montrent un cratère inondé de 120 mètres de diamètres et 43 mètres de profondeur. On pourrait y engloutir le Grand sérail, l’imposant palais du Premier ministre qui domine le centre ville. Six jours plus tard, l’onde de choc social créée par la catastrophe a fait tomber le gouvernement d’Hassan Diab, en place depuis janvier seulement.

Le cargo maudit

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