BÉDIÉ, le retour…

Publié le 16 septembre 2003 Lecture : 3 minutes.

Henri Konan Bédié est chez lui lorsque les premiers coups de feu éclatent dans les rues d’Abidjan, le 19 septembre 2002. Rendu prudent par l’expérience – il se souvient du coup d’État qui l’a renversé en décembre 1999 – il se réfugie, deux jours durant, dans la résidence de l’ambassadeur du Canada.
L’ex-président de Côte d’Ivoire aurait pu tirer satisfaction de cette crise venue frapper son ancien opposant Laurent Gbagbo, lequel avait salué avec une joie non feinte sa propre chute. Mais il va opter pour une position plus en accord avec son rang d’ancien chef d’État, républicain dans l’âme, dépossédé par la force d’un fauteuil obtenu par les urnes. Il apporte donc son soutien au gouvernement, tout en exhortant les deux parties à respecter les institutions. Prend-il à ce moment conscience que le bref passage du général Robert Gueï aux affaires n’a en rien résolu le problème de la Côte d’Ivoire ? Qu’un fond de mécontentement persiste, qui, organisé, se révèle dangereux pour tout pouvoir en place ? Une chose est sûre, c’est qu’il va peser de tout son poids en faveur d’un assouplissement de la position guerrière de Laurent Gbagbo.
Sans prononcer le mot de « légitimité », qui hérisse le poil de rebelles estimant que le président a été « mal élu », Bédié en appelle au respect de la Constitution, à l’amour de la patrie, bref, à une identité nationale qui transcenderait les clivages régionalistes et culturels. Une opinion pour le moins surprenante pour le chantre de l’« ivoirité ». D’aucuns considéreront cette prise de position comme une palinodie.
À la mi-octobre, la situation militaire n’est pas favorable aux loyalistes sur le terrain. Il est urgent d’accélérer les négociations. La cellule de réflexion mise sur pied par Bédié au sein du PDCI/RDA (Parti démocratique de Côte d’Ivoire/Rassemblement démocratique africain) et dirigée par l’ancien Premier ministre Daniel Kablan Duncan, tourne à plein régime. Elle lui permet la réflexion, la concertation, et il arrive en France le 15 janvier 2003, pour la table ronde de Linas-Marcoussis, à la tête d’une délégation très structurée.
La signature des accords a lieu dix jours plus tard. Plusieurs de ses partisans seront nommés dans le gouvernement de Seydou Diarra, plaçant ainsi le PDCI en position de parti de contribution, et non d’opposition. Dès lors, les déclarations de l’ancien chef de l’État ne varient plus : non seulement il défend la légalité et la République, mais donne son soutien inconditionnel à la paix, la réconciliation et la mise en oeuvre des décisions prises à Marcoussis. Il souhaite apparaître désormais comme un modérateur dans le débat public. Il note toutefois que l’homme qu’il espérait voir à la Défense, Gaston Ouassénan Koné, est refusé.
Après huit mois de séjour à Paris, il rentre à Abidjan, le 8 août 2003, bien décidé à jouer à fond sa propre carte. Son premier objectif est de remettre son parti en ordre de bataille et préparer la campagne électorale de 2005. Une aussi longue absence lui a valu quelques critiques et il s’empresse de renouer avec le parti. Il assiste au 1er congrès de l’Union des femmes du PDCI (UFPDCI) et rend un hommage appuyé aux défunts. Reste à faire adhérer la base aux futures décisions de la direction. Une opération délicate pour l’ancien président Bédié, que son séjour parisien a coupé des préoccupations des Ivoiriens, reproche déjà formulé au moment de sa chute.

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