Le « J’accuse ! » de madame Boudiaf

Publié le 22 août 2005 Lecture : 2 minutes.

Encore un rebondissement dans « l’affaire Boudiaf » ! Dans un entretien diffusé le 30 juillet par la chaîne Al-Jazira, Fatiha, la veuve du président Mohamed Boudiaf, assassiné le 29 juin 1992, affirme que « l’auteur physique de l’assassinat » de son mari « n’est pas Lembarek Boumaarafi ». Reconnu coupable, ce sous-lieutenant des services spéciaux avait été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité.
« J’ai demandé à rencontrer Boumaarafi en prison, ils me l’ont refusé », déplore Mme Boudiaf, qui, pour étayer sa thèse, s’appuie sur un enregistrement vidéo en sa possession. « La personne qui a tiré sur mon mari était de plus grande taille. » Selon elle, le véritable assassin serait l’homme dont le cadavre gisait sous la table devant laquelle le président était assis au moment du meurtre.
Rappelé par l’armée en janvier 1992 au lendemain de la démission du président Chadli, Mohamed Boudiaf avait assumé la charge de chef de l’État pendant six mois avant d’être assassiné. Son passé de héros de la révolution, son franc-parler et sa volonté de lutter contre la corruption avaient séduit les Algériens. Dès l’annonce de sa mort, la rue avait désigné les coupables : les généraux qui l’avaient ramené au pouvoir. Mais, à l’issue d’un procès controversé, la justice avait conclu à l’acte isolé. Ce que sa veuve conteste.
Si le principal accusé n’est pas l’assassin, qui donc a abattu le président dans le dos, en ce funeste 29 juin ? Fatiha Boudiaf se garde d’avancer le moindre nom, mais elle pointe du doigt les véritables commanditaires de cette « exécution » : ils sont à chercher du côté du pouvoir, lance-t-elle.
Comme il fallait s’y attendre, ces révélations n’ont suscité aucune réaction officielle. Elles ont été accueillies avec une pointe d’ironie par une partie de la presse algérienne, qui soupçonne la veuve de l’ancien président d’exploiter la mort de son mari pour en retirer des avantages matériels.
Le chroniqueur d’un journal arabophone, Saad Bouakba, l’en accuse ouvertement. Il reproche à Mme Boudiaf de faire pression sur les autorités pour que la villa Aziza, résidence d’État et siège de la Fondation Boudiaf, soit mise à son nom. Sa demande aurait déjà été repoussée, il y a quelques années, par Ali Kafi, le successeur de Boudiaf à la tête du HCE (Haut Comité d’État), au motif que la villa est un bien incessible de l’État, mais aussi pour ne pas raviver le différend familial qui oppose Fatiha à Nacer Boudiaf, le fils aîné du président défunt.
Quelques mois après la mort de son époux, Mme Boudiaf s’était vu attribuer une autre résidence, la Villa Mahrez, située sur les hauteurs d’Alger. Or celle-ci aurait été revendue à un homme d’affaires de Zéralda (une station balnéaire du littoral algérois) pour la bagatelle de 400 millions de dinars (4,4 millions d’euros). Selon des indiscrétions rapportées par le journal Al-Khabar, une enquête serait en cours pour déterminer les circonstances de cette vente.
Pourquoi Fatiha Boudiaf cherche-t-elle à vendre ses biens ? Pour repartir au Maroc et se réinstaller dans la ville de Kénitra, où la famille a longtemps vécu avant de regagner Alger en janvier 1992. Interrogée par le journaliste d’Al-Jazira, Mme Boudiaf a confirmé l’information.

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