Les engagements de Maputo doivent être renouvelés, renforcés et… respectés

Winnie Byanyima est la directrice générale d’Oxfam. Ibrahima Coulibaly est vice-président du Réseau des organisations paysannes et des producteurs de l’Afrique de l’Ouest (ROPPA).

Ibrahima Coulibaly (g) et Winnie Byanyima (d).

Ibrahima Coulibaly (g) et Winnie Byanyima (d).

Winnie Byanyima © DR

Publié le 30 avril 2014 Lecture : 3 minutes.

2014 est une année symbolique forte : année internationale de l’agriculture familiale pour les Nations unies d’une part, et année de l’agriculture pour l’Union africaine d’autre part, elle devrait permettre de voir de réelles avancées politiques en matière de lutte contre l’insécurité alimentaire en Afrique. Les ministres de l’agriculture de l’Union africaine réunis à Addis Abeba les 1 et 2 mai 2014 vont-ils enfin assumer leurs responsabilités ? Vont-ils enfin apporter des réponses concrètes aux problématiques auxquelles font face les agricultures familiales africaines ?

Est-il besoin de rappeler leur rôle central dans les économies, la stabilité sociale, la lutte contre les inégalités et le changement climatique ? Entre 60 et 80% de la population active en Afrique subsaharienne est constituée de producteurs familiaux, agriculteurs et éleveurs qui assurent près de 90% des besoins alimentaires de base de la population africaine. Pourtant, ils sont trop souvent oubliés par les politiques publiques et négligés, voire même dénigrés par les gouvernements. Le résultat du manque d’investissement dans l’agriculture familiale est sans appel : aujourd’hui, 223 millions d’Africains continuent à souffrir de la faim dont 80 % sont des paysans, des éleveurs et leurs familles !

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Un engagement de 10%

En 2003, à Maputo, les chefs d’États africains s’étaient engagés à consacrer au moins 10% de leur budget national à l’agriculture. Dix ans plus tard, seuls huit pays sur les 54 que compte l’Union africaine ont respecté cet engagement. Et les agricultures familiales ont peu bénéficié des montants investis. Cette situation est intolérable.

223 millions d’Africains continuent à souffrir de la faim dont 80 % sont des paysans, des éleveurs et leurs familles !

Nous disons aux ministres de l’agriculture de l’Union africaine réunis à Addis Abeba que les engagements pris il y a 10 ans à Maputo doivent maintenant être renouvelés, renforcés et respectés.

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Les États doivent s’engager à soutenir les producteurs familiaux à travers des budgets transparents et responsables, à améliorer les politiques agricoles en direction des agricultures familiales dans le cadre du Programme détaillé de développement de l’agriculture africaine (PDDAA) et à mettre en œuvre le “Cadre et lignes directrices sur la politique foncière en Afrique“ de l’Union africaine et les directives volontaristes pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts du Comité pour la sécurité alimentaire mondiale.

Année décisive

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Pour une agriculture africaine à la fois durable et source de développement, il est indispensable d’intégrer la durabilité et la résilience climatique dans les plans agricoles nationaux. À ce titre, les pratiques agro-écologiques menées par les exploitations familiales représentent un potentiel énorme à explorer. Il est également temps d’éliminer les injustices entre les femmes et les hommes dans le domaine agricole et de favoriser l’installation des jeunes. L’accès sécurisé aux facteurs de production – terre, eau, semences, finances, technologies et connaissances – et leur gestion durable doivent être ouverts à tous. Enfin, 2014 doit être une année décisive dans la mise en place des mécanismes transparents et inclusifs de prévention et de gestion des crises alimentaires et nutritionnelles récurrentes pour en finir avec une Afrique qui a faim.

Les États de l’Union africaine devront faire preuve d’une volonté politique forte face à ces défis. Nous attendons qu’ils l’expriment lors la réunion ministérielle agricole d’Addis Abeba. Le droit à l’alimentation des populations africaines en dépend.

10 recommandations de politiques conjointes : De la rhétorique à l’action – vers une agriculture transformée et une sécurité alimentaire en Afrique

1 – Augmenter le volume des dépenses dans l’agriculture à travers des budgets transparents et responsables

2 – Améliorer la qualité des dépenses dans l’agriculture

3 – Améliorer l’élaboration de politiques agricoles plus efficaces, mutuellement redevables et participatives dans le cadre du PDDAA

4 – Améliorer la transparence des dépenses dans l’agriculture

5 – Eliminer les disparités entre les sexes et promouvoir les jeunes dans le secteur agricole

6 – Renforcer les droits fonciers des producteurs familiaux agricoles à travers des ressources soutenues pour la gouvernance foncière et l’adoption ainsi que la mise en œuvre du programme « Cadre et Lignes directrices sur la politique foncière en Afrique « de l’UA

7 Augmenter les investissements dans la recherche agricole inclusive, les services de vulgarisation et de conseil

8 – Favoriser l’accès aux marchés pour les producteurs familiaux agricoles, les investissements dans l’agriculture familiale et des investissements responsables de la part du secteur privé

9 – Intégrer la durabilité et la résilience climatique dans les plans agricoles nationaux

10 – Mettre en place des mécanismes de prévention et de gestion des crises alimentaires et nutritionnelles récurrentes

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