La Chine et l’Amérique en Afrique

Publié le 15 mai 2006 Lecture : 2 minutes.

La visite au Nigeria du président chinois Hu Jintao offre un aperçu du cauchemar que pourrait représenter pour les États-Unis l’émergence d’un monde multipolaire où la Chine ferait pleinement entendre la voix de son 1,3 milliard de consommateurs, producteurs, épargnants
Hu Jintao, qui trône sur 900 milliards de dollars de réserves, s’est modestement présenté devant le Parlement du Nigeria – qui l’a longtemps ovationné – comme le président d’un pays en développement, donc d’un pays qui n’a pas de leçon à donner à ses semblables. Il venait finaliser, pour 2,7 milliards de dollars, l’acquisition par le pétrolier chinois Cnooc d’une participation dans un bloc off-shore. Nul ne voyait d’objection à ce que le vendeur soit TY Danjuma, un général en retraite qui doit sa fortune au dictateur Sani Abacha et qui va encaisser 1 milliard de dollars, une fois remboursés les prêts de Total et Petrobras. Que ce général, ancien ministre et rival politique du président Olusegun Obasanjo, se retrouve à la tête d’une telle fortune ne peut que brouiller les cartes à un an d’une élection présidentielle qui s’annonce déjà fort confuse.

La Chine a promis une assistance de 4 milliards de dollars pour financer des projets d’infrastructure (transport ferroviaire, centrale thermique, téléphonie rurale) en contrepartie d’un traitement de faveur dans l’attribution de permis pétroliers. Le Mouvement pour l’émancipation du delta du Niger, où l’agitation a déjà fait chuter la production pétrolière d’un cinquième depuis le début de l’année, a fait savoir que les sociétés et les expatriés chinois ne bénéficieraient d’aucun traitement de faveur de leur part.

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Autre sujet de préoccupation pour les États-Unis, qui équipent traditionnellement les forces armées du Nigeria : à l’achat à la Chine d’avions d’entraînement et de chasseurs s’élevant à 251 millions de dollars s’ajouterait la fourniture de vedettes de patrouille fluviale, bien adaptées au labyrinthe du delta. Ces vedettes se substitueraient à une livraison américaine bloquée par le Congrès dans l’attente de l’arrestation de l’ancien dictateur libérien Charles Taylor, réfugié au Nigeria. Reste à savoir ce qui va se passer maintenant que Taylor a été remis à la Sierra Leone.

Son arrestation, alors qu’il tentait de passer la frontière nigériane avec de grosses sommes d’argent liquide, a été menée avec une surprenante maestria. Mais si Taylor avait pu filer – comme il l’avait déjà fait naguère d’une prison américaine avant de se lancer dans la rébellion -, une rencontre entre les présidents Bush et Obasanjo risquait d’être annulée. Reste que les velléités d’Obasanjo de briguer un troisième mandat, en bravant une interdiction constitutionnelle, sont dénoncées par le directeur américain du renseignement national, John Negroponte, qui y voit une grave menace « d’agitation et de chaos ». Le rival d’Obasanjo, le vice-président Atiku Abubakar, fait le nécessaire pour justifier cette opinion.

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