Nulle part en Afrique
Nowhere in Africa, de Caroline LinkSorti à Paris le 10 mars
Un scénario qui contient tous les ingrédients utiles pour réaliser un film subtil et émouvant. Un décor africain grandiose. Des personnages incarnés par de bons acteurs, qui ont tous de l’épaisseur. Que demander de plus ? Eh bien, c’est toute la question
En bref, Walter Redlich, jeune avocat juif allemand plein d’avenir, doit abandonner sa carrière pour fuir l’Allemagne de la fin des années 1930. Il décide d’émigrer au Kenya. Bien que peu préparé aux travaux de la ferme, il loue une exploitation à un colon anglais et, avant qu’il ne soit trop tard, fait venir Jettel, sa femme, et Regina, sa fille, dans
ce pays où il tente de s’intégrer. La première, bourgeoise capricieuse qui n’a jamais
travaillé, considère la savane africaine comme une terre dangereuse et peuplée de sauvages. La seconde découvre avec plaisir un environnement différent et se lie d’amitié avec le cuisinier et homme à tout faire de la maison, le Masaï Owuor.
Les difficultés d’adaptation de Jettel déstabilisent le couple et brisent l’harmonie familiale. Mais, au fur et à mesure, c’est Walter qui « craque », alors que femme et fille tombent amoureuses de l’Afrique. Au point qu’à la fin de la guerre, c’est Jettel, enfin émancipée, qui veut rester au Kenya et lui qui entend rentrer au plus vite.
Une véritable saga hollywoodienne, donc, mais aussi une histoire vraie, tirée d’un roman à succès, Une enfance africaine, de Stéfanie Zweig. Hollywood ne s’y est pas trompé en attribuant l’oscar 2003 du meilleur film étranger à Nowhere in Africa, salué dans les pays où il est sorti comme une uvre attachante. Pourquoi émettrait-on des réserves ?
Parce que ce film si « attachant » ignore tout ce qui pourrait déranger le spectateur occidental. Une fois dit qui pourrait penser le contraire ? que les nazis sont des salauds, les racistes des gens peu fréquentables et les Noirs du Kenya des hommes très sympathiques quand on fait l’effort de les comprendre, il reste un film académique, bouffi de belles images et de bons sentiments. Mais aussi un film dans lequel l’Afrique
ne constitue qu’un décor. Et la colonisation un élément, jamais vraiment exploré, de ce même décor. Les victimes qu’abrite le Kenya sont les victimes du nazisme. Jamais les Africains, omniprésents à l’écran, que les colons britanniques dominent et exploitent. D’où la gêne (le mot est faible) que l’on peut ressentir. Le titre même du film que l’on peut traduire par « n’importe où en Afrique » trahissait déjà ce mépris insidieux
de la réalisatrice pour l’environnement dans lequel et à travers lequel, pourtant, tout arrive
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