Les défis qui attendent André Parant, le nouvel ambassadeur de France en Tunisie
Succédant à Olivier Poivre d’Arvor, le diplomate a plusieurs défis à relever auprès des Tunisiens comme de la communauté française expatriée.
À la Marsa, dans la banlieue de Tunis, Dar El Kamila, l’une des plus belles résidences de France à l’étranger, s’apprête à changer de locataire. Nommé le 29 juillet dans le cadre du traditionnel mouvement diplomatique annuel, André Parant prend le relais d’Olivier Poivre d’Arvor, en poste depuis 2016.
Mais ce natif du Jura n’aura pas le temps d’apprécier les lieux, il entamera son mandat dans l’effervescence d’une crise politique aigue avec la chute du gouvernement d’Elyes Fakhfakh et la mise en place de celui de Hichem Mechichi.
Le vote de confiance de l’Assemblée à Mechichi aurait dû être le premier temps fort du mandat d’André Parant, mais la demande d’agrément adressée par le Quai d’Orsay aux autorités tunisiennes n’a pas encore été validée.
Il ne faut y voir aucun désaccord entre Tunis et Paris mais plutôt, les effets d’une prise de décision du côté tunisien désormais centralisée à la direction du cabinet de la présidence à Carthage, plutôt qu’au ministère des Affaires étrangères (MAE).
« Monsieur Afrique »
À 63 ans, l’énarque diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris est familier des turbulences politiques et n’est jamais autant à son aise qu’en terre d’Afrique et en Méditerranée.
Pour André Parant, l’Afrique est d’abord une histoire de famille : son grand-père a été gouverneur au Gabon, son père, conseiller du président ivoirien Félix Houphouët-Boigny, et lui-même a été le « Monsieur Afrique » ou plus précisément conseiller adjoint chargé de l’Afrique de la cellule diplomatique du président de la République sous Nicolas Sarkozy.
Pour son premier poste, en 1984, le diplomate sera Secrétaire d’ambassade au Maroc, puis à Bruxelles où se renégocient alors les accords de Lomé. Avant d’être affecté comme chef de la mission de coopération à Bangui. À la faveur de cette mission en 1993, il supervise la première consultation centrafricaine pluraliste qui aboutit à la victoire électorale d’Ange-Félix Patassé.
Avant la Tunisie, il a représenté la France au Sénégal, au Liban, en Algérie et en Égypte
En 1996, il passe par le consulat de France à San Francisco puis rejoint la direction du développement du Quai d’Orsay. Sa carrière prend alors une autre orientation en tant que chargé de mission Maghreb et Moyen-Orient puis directeur Égypte-Levant. Il devient en 2002 conseiller technique à la cellule diplomatique à l’Élysée.
Ce temps clé ancre le parcours d’André Parant entre le continent africain et l’Afrique du Nord. Ambassadeur de France au Sénégal, il apaise les tensions entre les deux pays, avant de représenter la France au Liban en 2007, en Algérie en 2012 et en Égypte en 2014.
Expérience des pays arabes
Sa nomination à Tunis complète son tour du Maghreb, mais lui permet surtout de mettre à profit son expérience récente acquise dans des pays arabes qui ont connu une révolution tels que l’Égypte ou une crise socio-économique sévère comme le Liban ou l’Algérie.
En Tunisie, il est attendu sur deux plans : d’abord par une communauté française, déçue par le peu de soutien de Paris lors de la pandémie de coronavirus, notamment en matière d’allégement de frais d’écolage pour les établissements français. Mais également par les Tunisiens qui souhaitent « moins d’ingérence, moins d’erreurs de discernement, moins d’entre soi avec une « élite » affairiste francophile » précise, en faisant référence au mandat d’Olivier Poivre d’Arvor, Samir Bouzidi, expert en migration et marketing ethnique.
André Parant ne devra pas uniquement veiller à entretenir une image de la France, il aura aussi des dossiers importants à traiter. En premier, la situation des entreprises françaises en Tunisie en période post-Covid et la qualité des échanges économiques entre les deux pays, dont le volume est aussi impacté par la crise sanitaire.
Parmi les questions auxquelles devra répondre régulièrement André Parant, celle des visas
Depuis 2017, l’Allemagne, devenue le premier bailleur international de la Tunisie, et l’Italie, premier partenaire commercial, font de l’ombre à l’Hexagone. Une concurrence qui n’empêche pas des rapports cordiaux et de s’accorder sur des points comme la migration clandestine.
Parmi les questions auxquelles devra répondre régulièrement André Parant, celle des visas et les difficultés à obtenir le précieux sésame : paradoxalement, il devra aussi argumenter par rapport au recrutement massif de compétences tunisiennes par la France.
Un homme discret
Des problématiques du quotidien auxquelles s’ajoutent des préoccupations quant à la stabilité du pays et de la sous-région. Un sujet dont cet homme discret pourra discuter à loisir avec son homologue, François Gouyette, qui a rejoint Alger après avoir été en poste à Tunis en 2012 puis à Riyadh en 2016.
Il pourra en revanche faire montre de toute son éloquence pour contribuer à la tenue du sommet de la Francophonie en Tunisie en 2021, un sujet qu’il connait bien et qui lui permettra de rendre hommage au Tunisien Habib Bourguiba après avoir réalisé à Dakar celui du Sénégalais Léopold Senghor, tous deux fondateurs de la Francophonie et pères des indépendances.
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