Hans Blix ne désarme pas

Publié le 15 mars 2004 Lecture : 2 minutes.

En publiant, le 10 mars, un livre-témoignage(1) sur son expérience irakienne, Hans Blix, ancien chef des inspecteurs en désarmement des Nations unies, a jeté un pavé dans la mare, éclaboussant au passage, en pleine campagne électorale, le président américain George W. Bush ainsi que le Premier ministre britannique Tony Blair, déjà échaudé par l’affaire Kelly et les accusations d’espionnage au sein de l’ONU portées contre ses services.

Un an presque jour pour jour après le début de l’intervention militaire contre le régime de Saddam Hussein, le diplomate suédois a donc décidé de livrer sa version des faits tout en dénonçant la pression dont il a fait l’objet de la part de l’administration américaine.
Il se souvient, par exemple, de sa première visite à la Maison Blanche, le 30 octobre 2002. Mohamed el-Baradei, directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), et lui-même sont d’abord reçus par le vice-président américain Dick Cheney. « C’est lui qui parla le plus clair du temps, donnant l’impression d’un chef de l’exécutif solide et sûr de lui – même trop sûr de lui, écrit Hans Blix. […] Quant aux inspections, on ne pouvait les poursuivre éternellement si elles ne donnaient pas de résultats. […] Une manière assez directe, me dis-je, de nous faire comprendre que si nous ne trouvions pas bientôt les armes de destruction massive que possédait l’Irak, les Américains seraient disposés à dire que les inspections étaient inutiles et à se lancer dans le désarmement par d’autres moyens. » En revanche, le président Bush a été « plus chaleureux », suffisamment en tout cas pour convaincre le duo Blix-Baradei que finalement « les États-Unis les soutenaient ».
Au fil de ce témoignage de 450 pages, le diplomate écorche aussi une à une « les preuves » présentées par les Américains pour justifier la guerre. Ainsi, ces photos et ces enregistrements de conversations prétendument tenues par des fonctionnaires irakiens et que Colin Powell, le secrétaire d’État américain, a exposés à la tribune de l’ONU en février 2003. « Je me suis surpris à m’interroger sur l’authenticité de ces entretiens, confie l’ancien inspecteur. D’où venaient ces bandes ? D’écoutes électroniques américaines ? De membres de l’opposition irakienne ? » Des questions toujours sans réponses aujourd’hui.

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Et l’auteur de conclure amèrement : « La politique d’endiguement a été abandonnée pour l’Irak, et la politique de contre-prolifération mise en oeuvre : une force d’inspection combinée des Nations unies et de l’AIEA qui comptait moins de 200 inspecteurs et coûtait peut-être 80 millions de dollars par an a été retirée, et remplacée par une force d’invasion de 300 000 hommes coûtant dans les 80 milliards de dollars par an. » Un choix qui ne laisse de soulever « des questions perturbantes ».

* Irak, les armes introuvables, éd. Fayard, 450 pp., 22 euros.

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