A propos de la leçon d’économie du Pr Barro

Publié le 16 mars 2004 Lecture : 2 minutes.

J’ai lu avec beaucoup d’intérêt votre récent éditorial sur les leçons d’économie du Pr Barro (n°‑2251) et je voudrais vous faire un commentaire.
Je n’ai pas lu l’étude du Pr Barro, mais je vais sûrement le faire. Cependant, il dit, selon vous, que le niveau d’éducation des femmes a peu d’effet sur la croissance. À mon avis, une telle affirmation est fausse pour deux raisons‑:
1. Elle paraît invraisemblable, suspecte et offensante. Invraisemblable parce qu’il n’existe à ma connaissance aucune théorie crédible qui tendrait à soutenir une telle thèse. Suspecte, parce que l’idée même d’étudier ce facteur de l’éducation féminine amène à se demander si l’auteur ne cherchait pas (inconsciemment ou non) à confirmer une idée négative et préconçue sur l’impact des femmes sur le développement. Enfin offensante, parce qu’une femme qui lirait cette étude la percevrait ainsi, d’autant plus que les preuves apportées sont insuffisantes (comme vous le dites d’ailleurs).
2. L’explication que vous avez essayé de donner à cette observation est que l’étude a peut-être porté sur des pays où les femmes ne participent pas beaucoup à la production. Une autre explication me semble être plus scientifique et pertinente.
Je suis statisticien professionnel et consultant aux États-Unis depuis la fin de mon doctorat, il y a neuf ans. Je peux vous assurer qu’il existe une très forte corrélation entre le niveau d’éducation des femmes et leur taux de fécondité. Si le Pr Barro enlève la fécondité de son analyse, je suis certain que l’effet du niveau d’éducation des femmes va apparaître comme très positif.
Plusieurs économistes comme le Pr Barro utilisent les méthodes statistiques, mais ne les appliquent pas toujours avec toute la rigueur nécessaire. Des insuffisances comme celles-ci, j’en ai souvent découvert dans ma carrière.
Une dernière chose. Camerounais de naissance, je vis aux États-Unis depuis longtemps. Une habitude américaine que je trouve parfois un peu désagréable est cette tendance à vouloir établir des corrélations suspectes voire sournoises entre ce que sont les gens et ce qu’ils font. C’est ainsi que nous avons des statistiques officielles qui disent que 36‑% des Noirs ont consulté un médecin l’an dernier pour un mal de tête, contre 38‑% des Blancs. Même s’il n’y a pas un lien apparent entre le mal de tête et la couleur de la peau. Chacun peut toujours voir ce qu’il souhaite bien voir dans ce genre de «‑données‑».
Mille fois merci d’avoir porte cette belle étude à l’attention des lecteurs.

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