Quand le Grand Sud s’éveillera

Délaissée par les gouvernements successifs, la région saharienne, pourtant pourvoyeuse des principales richesses du pays, va enfin bénéficier d’un programme de développement ambitieux.

Publié le 14 janvier 2008 Lecture : 3 minutes.

Le Sahara a toujours occupé une place particulière dans le cur des Algériens. Même les plus jeunes n’ignorent pas qu’avant l’indépendance les dernières négociations avec la puissance coloniale ont traîné en longueur en raison de l’intransigeance des nationalistes du FLN sur la question du Sahara, considéré comme partie intégrante de l’Algérie.
Pourvoyeur des principales richesses du pays (pétrole et gaz), le Grand Sud algérien, qui couvre plus de 80 % du territoire et abrite 10 % de la population, n’a jamais été au centre des préoccupations des dirigeants. Selon Abdellatif Benachenhou, ancien ministre des Finances, proche collaborateur d’Abdelaziz Bouteflika, dont il a rédigé le programme économique électoral en 2004, sur 1 000 dinars investis en Algérie, 5 seulement sont destinés à cet immense territoire désertique. Illustration de la disparité Nord-Sud, la description de l’Algérie que fait un immigré clandestin subsaharien que les nombreux échecs à rallier l’Europe n’ont jamais découragé : « Quand tu arrives à Tamanrasset, tu as fait la moitié du chemin, mais tu es encore en Afrique, raconte-t-il à ses amis de Bamako, candidats au grand voyage. L’Europe commence à Alger, Oran ou Annaba. Là-bas, les constructions sont en hauteur et toutes les routes sont bitumées. »
On l’aura compris : le Grand Sud accuse un sérieux retard sur le Nord. Un paradoxe eu égard aux richesses que recèlent les régions méridionales dont l’exploitation nécessite l’apport d’une main-d’uvre qualifiée, rarement disponible localement. Le brassage de populations n’est pas toujours très heureux. Résultat : les grandes agglomérations sahariennes sont parfois secouées par des émeutes, la jeunesse locale acceptant difficilement d’être exclue des opérations de recrutement des groupes pétroliers. Autre source d’inquiétude : la montée de l’insécurité. Vaste territoire difficilement contrôlable, le désert s’est peu à peu transformé en plate-forme de tous les trafics – cigarettes de contrebande, drogue, armes -, sans oublier la traite humaine. Une véritable aubaine pour des groupes salafistes mis en déroute par les ratissages de l’armée algérienne dans les maquis du Nord. À tout cela s’ajoute le vent d’irrédentisme touareg qui souffle sur le Mali et le Niger voisins.

Immenses réserves hydriques
C’est en ayant tous ces enjeux à l’esprit que le président Abdelaziz Bouteflika a conçu son Programme spécial complémentaire de développement pour les wilayas (départements) du Sud. D’un montant de 377 milliards de dinars (5 milliards de dollars), l’enveloppe est destinée aux régions d’Adrar, Laghouat, Biskra, Béchar, Tamanrasset, Ouargla, Illizi, Tindouf, El-Oued et Ghardaïa. Les quatre cinquièmes de ces investissements sont consacrés à l’amélioration des conditions de vie des populations : construction de 60 000 logements, d’une dizaine de campus universitaires, d’infrastructures sportives et culturelles. Mais le principal défi consistera à approvisionner l’ensemble des grands centres urbains sahariens en eau potable. Comment ? En exploitant les immenses réserves hydriques de la nappe albienne (près de 40 000 milliards de m3 d’eau à moins de 2 000 m de profondeur).
Le développement des dix wilayas du Sud aura des effets d’entraînement considérables sur le reste du pays. Il pourra permettre l’exploitation, sans cesse différée, des potentialités minières (or, diamant, uranium). En outre, des villes méridionales développées seraient plus attractives pour les universitaires, médecins et autres personnels hautement qualifiés et, à terme, atténueraient le grand déséquilibre démographique entre le Nord et le Sud. Parmi les ambitions des autorités : faire de Tamanrasset un pôle économique et un centre culturel rayonnant sur l’ensemble de la bande sahélienne. Pour atteindre cet objectif, Bouteflika a commencé par l’eau et l’énergie. Le reste suivra.

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