Présidentielle au Burkina : Zida investi candidat, son retour « différé »
Annoncé en grandes pompes par son parti, le retour de Yacouba Isaac Zida n’est finalement pas à l’ordre du jour. L’ancien Premier ministre de la Transition, inculpé pour « désertion », a tout de même été investi candidat à la présidentielle vendredi soir.
C’est un faux départ dont Yacouba Zida, réfugié au Canada, se serait bien passé. Le congrès d’investiture du Mouvement patriotique pour le Salut (MPS) a dû se résoudre vendredi à l’investir en son absence.
Les partisans de l’ancien Premier ministre de la Transition dénoncent une manœuvre des autorités burkinabè pour empêcher Yacouba Isaac Zida de participer à son investiture à Ouagadougou. Le gouvernement oppose un démenti formel à ces allégations qu’il qualifie de « désinformation savamment orchestrée par le Mouvement patriotique pour le Salut ».
D’après nos informations, Yacouba Zida aurait pris langue avec le président Kaboré et le patron de la justice militaire, en vue de son éventuel retour au bercail. « Zida devait passer par Bruxelles, Paris et Berlin avant de rentrer. Mais ils n’ont pas pu gérer », affirme un proche. Dans l’entourage du Chef de l’État, on répond en revanche qu’il n’en est rien : « C’est du bluff », dit-on.
Le président du MPS, Augustin Loada, a fait savoir que le retour de Yacouba Isaac Zida était donc « différé ». « Les autorités ont fait savoir que si Zida vient, il sera immédiatement arrêté », a-t-il même affirmé dans un communiqué.
Justice militaire
Joint au téléphone par Jeune Afrique, Augustin Loada ne cache pas sa déception mais se veut confiant pour l’avenir. « Nous l’avons investi et allons déposer sa candidature. Zida viendra battre campagne puisque le gouvernement argue n’avoir aucun grief contre lui en renvoyant la balle au tribunal militaire », a-t-il expliqué.
«Les partisans de Zida demandent qu’il ne réponde pas devant la justice militaire. Or, les faits qui lui sont reprochés sont des crimes relevant du tribunal militaire », confie une source gouvernementale à Jeune Afrique.
Dans un communiqué, signé par le porte-parole de l’exécutif, Rémi Dandjinou, le gouvernement juge que le « MPS demande aux autorités de soustraire Yacouba Isaac Zida de toute action judiciaire, alors que celui-ci doit répondre devant la justice militaire des chefs d’inculpation de désertion en temps de paix et de refus d’obéissance ». Un mandat d’arrêt a été émis à son encontre.
Un retour reporté
« Le gouvernement réaffirme son double attachement au droit au retour dans son pays d’origine de M. Yacouba Isaac Zida d’une part et au principe de l’indépendance de la justice, d’autre part. (…) Le gouvernement ne peut, en aucune façon, interférer dans des questions qui sont du ressort du pouvoir judiciaire », poursuit le communiqué.
Pour le MPS, le retour de Yacouba Isaas Zida n’est que partie remise.
« Nous avions espéré que dans un geste de réconciliation, Zida puisse rentrer de manière paisible, l’exécutif veut nous faire croire que la justice militaire est indépendante. Pour nous, c’est clairement un dossier politique », rétorque pour sa part Augustin Loada.
Réfugié au Canada au lendemain de la prise de pouvoir du président Roch Marc Christian Kaboré, l’ancien Premier ministre de la Transition avait obtenu une autorisation pour s’y rendre pour des soins médicaux.
Implication présumée dans la répression sanglante de 2014
Finalement celui qui s’était fait bombarder général de division sera radié des effectifs de l’armée à compter du 26 février 2016. Motif évoqué par le décret datant de janvier 2017 : absence irrégulière. Un mois plus tôt, le président Kaboré, à l’époque ministre de la Défense, déclarait que Yacouba Zida serait rayé de l’armée pour refus de répondre au conseil de discipline.
Promu général de division par le président Michel Kafando durant la Transition, Zida doit affronter plusieurs dossiers judiciaires comme son implication présumée dans la répression sanglante qui a précipité le départ de Blaise Compaoré en octobre 2014.
À cette période, Yacouba Zida commandait en second le Régiment de sécurité présidentielle et avait dirigé les opérations de sécurisation contre les manifestants hostiles à la modification de l’article 37 de la Constitution, à l’origine de la chute de Blaise Compaoré. Des institutions de contrôle lui imputent également des accaparements de parcelles réservées à la présidence dans le quartier huppé de Ouaga 2000 et surtout des fautes de gestion dont le montant s’élève à 86 milliards de francs CFA, pendant la Transition.
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