Restitutions : au cœur du procès pour tentative de vol au Quai Branly

Les cinq militants qui avaient arraché de son socle un poteau funéraire bari au musée du Quai Branly en juin 2020 comparaissaient devant le tribunal de Paris mercredi. Compte rendu d’une audience où le « continuum colonial » fut longuement évoqué.

Le Congolais Mwazulu Diyabanza Siwa Lemba, porte-parole du groupe Unité, dignité, courage, au tribunal de Paris, le 30 septembre 2020. © Thibault Camus/AP/SIPA

Le Congolais Mwazulu Diyabanza Siwa Lemba, porte-parole du groupe Unité, dignité, courage, au tribunal de Paris, le 30 septembre 2020. © Thibault Camus/AP/SIPA

NICOLAS-MICHEL_2024

Publié le 2 octobre 2020 Lecture : 10 minutes.

Ils étaient nombreux, ce 30 septembre au matin, à être venus au tribunal de Paris soutenir leurs camarades de l’association Unité, dignité, courage (UDC) poursuivis pour tentative de vol en réunion, avec détérioration d’un objet classé appartenant au Musée du quai Branly – Jacques Chirac. L’accès à la salle 4.03, où se tenait le procès, étant réservé à un nombre limité de personnes en raison de la pandémie de Covid-19, c’est dans les couloirs que les militants panafricains ont fait entendre leur voix.

Compréhensif mais ferme, le président du jury s’est adressé d’entrée de jeu au porte-parole du groupe, le tonitruant Congolais Mwazulu Diyabanza Siwa Lemba (41 ans) pour qu’il lance un appel au calme. « Si la situation n’est pas apaisée, si nous n’obtenons pas un silence absolu garantissant la sérénité des débats, je serais obligé d’ordonner le renvoi du procès », a déclaré le juge. De bonne grâce, Mwazulu Diyabanza s’est plié à sa demande et, une fois le calme revenu, le procès des cinq prévenus a pu se dérouler dans le calme.

Au regard du droit et des faits reprochés, les actes commis par Thibault Bao Abdelkader, Romain Catambara, Dihaoulou Bonelvy, Djaka Apakwa et Mwazulu Diyabanza pourraient sembler insignifiants. Le 12 juin 2020, en début d’après-midi, un groupe de militants remontés achète des billets d’entrée au musée du Quai Branly. Une fois à l’intérieur, ils haranguent les visiteurs présents, emmenés par leur charismatique porte-parole. Au cœur de leur discours, la nécessité de rendre à l’Afrique les biens spoliés par la France et l’Occident durant la période coloniale.

Dopés par ces revendications, portés par la colère, ils finissent par détacher un poteau funéraire bari (Tchad) de son socle en criant qu’ils vont le ramener « à la maison ». La scène est filmée en direct par Djaka Apakwa et diffusée sur la page Facebook de la plateforme UDC. L’intervention de la sécurité du musée met fin au « happening », le poteau funéraire est restitué sans violence et les cinq militants sont aussitôt arrêtés par la police.

https://www.facebook.com/103327681334851/videos/302822231119345/

« Juger un acte, et pas l’Histoire »

Si ce procès n’est pas anodin, c’est parce qu’il intervient à un moment de tension extrême autour de la question des restitutions des biens culturels à l’Afrique. Le président du jury l’a bien senti et, dès l’ouverture des débats, a souhaité faire une mise au point. « Aujourd’hui, il y a deux procès, a-t-il déclaré. Le procès de quatre hommes et une femme poursuivis pour deux délits et que l’on jugera en droit. Et puis il y a un autre procès, celui de l’histoire de l’Europe, du colonialisme, du détournement culturel. »

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