Photographie : « Africa 21e siècle », panorama captivant du continent

Le commissaire d’exposition et journaliste britannique Ekow Eshun nous donne dans le beau livre « Africa 21e siècle » un captivant cours magistral sur l’Afrique contemporaine à travers 300 clichés de 51 photographes.

« La Nuit des longs couteaux » de Athi-Patra Ruga (2013) © Athi-Patra Ruga

« La Nuit des longs couteaux » de Athi-Patra Ruga (2013) © Athi-Patra Ruga

KATIA TOURE_perso

Publié le 11 octobre 2020 Lecture : 2 minutes.

Le continent africain n’est pas seulement un espace physique traversés par mille frontières. Il est aussi un champ des possibles où se côtoient moult états d’esprit, identités, visions et interprétations. C’est à partir de ce constat qu’Ekow Eshun, commissaire d’exposition, auteur et journaliste britannique, réunit dans un beau livre, Africa 21ème siècle (Africa State of Mind dans la version originale publiée chez Thames & Hudson), 300 clichés pris par les objectifs, braqués sur le continent africain, d’une cinquantaine de photographes contemporains.

Parmi eux, Leonce Raphael Agbodjélou, Namsa Leuba, Leila Alaoui, Omar Victor Diop, Nobukho Nqaba, Emeka Okereke, Musa N. Nxumalo, Hassan Hajjaj, Nontsikelelo Veleko ou Youssef Nabil. Leurs travaux, qui, pour la plupart, date de moins de dix ans, traduisent une cause commune : « la revendication d’une Afrique vue dans tous ses paradoxes, toutes ses promesses, son émerveillement quotidien », explique Eshun dans l’introduction de l’ouvrage.

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« L’Afrique se traduit en poésie plutôt qu’en prose », assène encore celui qui, en 2017, se penchait sur les sources et le devenir de l’art contemporain africain dans « Africa Modern : Creating the contemporary art of a continent » (KT Wong Foundation).

Obsessions africaines

Le collaborateur de la BBC, du Guardian ou du New York Times – et accessoirement frère de l’écrivain Kodwo Eshun – s’appuie, ici, sur Afrotopia (Philippe Rey, 2016) dans lequel, écrit-il, l’économiste et écrivain sénégalais Felwine Sarr « aspire à une Afrique renouvelée, engendrée par les artistes, les penseurs et les acteurs culturels ; des créateurs et des créatrices dont le travail s’attache à exprimer l’expérience vécue aujourd’hui sur le continent dans toute sa complexité, en faisant preuve de nuance et en mobilisant les imaginaires. Il fait valoir que dans ce processus, l’Afrique est le lieu d’une profonde continuité entre le réel et le possible. »

Ekow Eshun est un commissaire d’exposition, auteur et journaliste britannique © Antonio Olmos

Ekow Eshun est un commissaire d’exposition, auteur et journaliste britannique © Antonio Olmos

Plus qu’un répertoire où défilent les clichés, l’ouvrage – dont la première de couverture est illustrée par une œuvre de la photographe britannico-libérienne Lina Iris Viktor – est un passage en revue des obsessions africaines communes de ces différents artistes. Et cela, à travers une partition dont il convient de saluer la justesse. Dans « Villes hybrides », Bab El Oued et ses « Rochers carrés » (Kader Attia, 2008) côtoient Lagos, ville chaotique saisie par Andrew Esiebo (entre 2015 et 2019), ou l’architecture du patrimoine bâti d’Abidjan, Porto-Novo ou Bamako qu’a capturé François-Xavier Gbré au début des années 2010.

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« Zones de liberté » interroge genre et sexualité avec Jodi Bieber, Yagazie Emezi (« Consommation du modèle noir, 2018) mais aussi Phumzile Khanyile, dont l’éblouissante série d’autoportraits, « Couronnes en plastique » (2016), interroge ce qu’est être une femme en Afrique du Sud.

Cours magistral

La suite de l’ouvrage de près de 300 pages se penche sur le poids des traditions ainsi que sur l’héritage colonial et l’ère postcoloniale dans la partie « Mythe et mémoire » puis étudie le lien entre identité et territoire dans « Paysages intérieurs ».

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En somme, Africa 21ème siècle peut être lu comme un captivant cours magistral sur l’Afrique contemporaine où, à travers l’étude de la photo artistique, les bonnes questions trouvent (enfin) les bonnes réponses. À mettre entre toutes les mains.

« Africa 21e siècle – Photographie contemporaine africaine » de Ekow Eshun, éditions Textuel (2020) 272 p., 55€ © Editions textuel

« Africa 21e siècle – Photographie contemporaine africaine » de Ekow Eshun, éditions Textuel (2020) 272 p., 55€ © Editions textuel

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