[Chronique] Le trésor de Kadhafi : de Benghazi à… Limoges
C’est dans le Massif central français qu’a été saisie une partie des billets provenant du pillage, en 2017, d’une banque centrale de Benghazi. Le circuit de blanchiment se fait jour…
L’ancienne région administrative française du Limousin n’est plus seulement la patrie des vaches marron, de la porcelaine et de la soupe d’orties. Pour les aficionados des feuilletons géopolitiques, elle est désormais l’un des lieux d’écoulement d’un magot mythique communément appelé le « trésor de Kadhafi ».
Les enquêteurs de la police judiciaire française et de l’Office central pour la répression du faux monnayage ont saisi 35 000 euros et interpelé un couple…
En 2010, Mouammar Kadhafi aurait fait imprimer, en Allemagne, 160 millions d’euros en coupures de 100 et 200 euros
Selon le journal français Le Parisien, c’est en 2010 que le Guide de la Jamahiriya arabe libyenne aurait fait imprimer, en Allemagne, 160 millions d’euros répartis en coupures de 100 et 200 euros.
En 2017, six ans après la mort de Mouammar Kadhafi, en pleine guerre civile libyenne, des rebelles avaient pillé cette somme lors d’un hold-up à la banque centrale de Benghazi, la deuxième ville du pays. La moitié des billets permettra à l’armée nationale du maréchal Khalifa Haftar de s’équiper en armes et autre matériel. Immergée sous l’eau par le système de défense des coffres, après des bombardements, l’autre partie du trésor en gardera des traces de moisissure rendant complexe son écoulement. Traités, certains billets seront un peu effacés ou noircis, finissant par ressembler à des parchemins.
Réseau de revente au rabais
Se met alors en place un réseau de revente au rabais – entre 20 % et 75 % de leur valeur faciale– notamment via la mafia turque et vraisemblablement dans le cadre de transactions de produits stupéfiants. D’un bout à l’autre de l’Europe, la technique consiste à écouler la monnaie tuméfiée en très petites quantités.
Face aux banquiers, la femme récemment interpelée à Limoges évoquera les manipulations intrinsèques à son métier de commerçante de marché, et qui ont pu dégrader les billets. Avec succès : 40 000 euros auraient ainsi été blanchis au cours de l’année.
L’inculpée, qui plaide la naïveté, n’aurait pas eu conscience d’être dans l’illégalité
Mais, en janvier 2020, son compagnon sera contrôlé en Belgique avec 15 000 euros de ces coupures blacklistées et traquées, depuis le casse de Benghazi, par les enquêteurs de l’ONU et de la Banque centrale européenne.
Des mois plus tard, les enquêteurs débarquent à Limoges. Début octobre, la femme de 42 ans et son compagnon de 39 ans sont placés en garde à vue, puis sous contrôle judiciaire. Les séjours turcs réguliers de la commerçante finiront d’établir le lien entre Limoges et Benghazi. L’inculpée, qui plaide la naïveté, n’aurait pas eu conscience d’être dans l’illégalité puisque les sommes incriminées n’étaient pas en faux billets. Mais ses précédentes escroqueries via des sociétés-écran ne devraient pas plaider pour sa présumée innocence…
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