Tech, finance, santé… Ce que les investisseurs ciblent pendant le Covid en Afrique
En quête de valeurs où placer leurs fonds, dans un continent ébranlé par la crise sanitaire, les capital-investisseurs africains se sont tournés vers les secteurs résilients.
La pandémie de coronavirus refroidit-elle les velléités dépensières des investisseurs du continent ? Pas vraiment et, surtout, pas pour tout le monde. Si la crise économique induite par la crise sanitaire a entraîné une contraction des investissements en Afrique en valeur, le volume des investissements, lui, est légèrement plus élevé au premier semestre qu’un an auparavant à la même période.
Les fonds d’investissements ont donc acheté plus petit mais plus souvent. Avec 1,1 milliard de dollars levés au premier semestre 2020 par le private equity africain, closings définitifs et intermédiaires inclus, contre 1,7 milliard au premier semestre 2019, « l’industrie africaine du capital-investissement a démontré sa résilience » au cours de la période, souligne le dernier rapport publié par l’Association africaine du capital-investissement et du capital-risque (Avca).
Au total 81 transactions de private equity ont été enregistrées au cours de la période, pour une valeur de 700 millions de dollars (on en comptait 79 en 2019, pour 900 millions de dollars). L’Avca recense comme opérations majeures au premier semestre de 2020 : le premier closing du panafricain AfricInvest Fund IV à 202 millions de dollars ; le second closing du fonds Alitheia Identity (Alitheia) à 75 millions de dollars, et le premier closing d’Old Mutual Private Equity Fund V (Old Mutual Alternative Investments) à 3 000 millions de rands, soit 182 millions de dollars environ, deux fonds qui visent l’Afrique sub-saharienne ; ainsi que le closing final du fonds technologique TLcom TIDE Africa Fund (TLcom Capital), à 71 millions de dollars.
Où les investisseurs ont-ils cherché de la valeur dans un monde secoué par le Covid-19 ? Quels secteurs sont les plus dynamiques ? Des tendances ont-elles émergé ? Décryptage.
Finance, technologies et biens de consommation en pointe
Trois grandes familles d’activité ont réussi à capter près de la moitié (49 %) des transactions en volume : la finance, les technologies de l’information et les biens de consommation.
À noter que 49 % du nombre total d’opérations déclarées au cours des six premiers mois de l’année en Afrique en étaient au stade préliminaire (early stage). Et parmi cette catégorie de transactions, le secteur de la tech s’est avéré le plus dynamique, avec la finance qui arrive deuxième. Dans le détail, la majeure partie des transactions en early stage du secteur finance est composée d’investissements dans le mobile-banking ou dans les services financiers.
Ce sont les entreprises de la tech qui ont connu la plus forte hausse en valeur et en volume (+1 point de hausse par rapport à 2019 dans les deux cas), portées par les conséquences de la pandémie sur les habitudes des acteurs économiques, en raison des mesures de confinement.
Boom de la santé
Le secteur de la santé représente la plus grande part des transactions de private equity en valeur (24 %) au premier semestre. Avec en tête, l’investissement de Mediterrania Capital Partners dans MetaMed (100 millions d’euros), la plus grande plate-forme d’imagerie diagnostique médical en Égypte, en Jordanie et en Arabie saoudite.
Pris ensemble, la santé, les technologies de l’information et les finances sont les trois principaux secteurs, en valeur de transaction, représentant 54 % des quelque 700 millions de dollars de transactions réalisées au total au premier semestre 2020.
Durant cette période, les principales opportunités se retrouvent dans les secteurs résilients : la tech, la santé
On constate, à l’inverse, que les secteurs de l’industrie et de la consommation de base sont en perte de vitesse par rapport à 2019, où les entreprises industrielles avaient massivement attiré des capitaux, dans le sillage des investissements du nigérian Alitheia Capital dans MAX.ng, du kényan Kibo Capital Partners dans Metad Consumer ou encore du panafricain Helios Investment Partners dans Misr Hytech Consumer Staples.
Un effet logique selon William Nkontchou, directeur exécutif du fonds de capital-investissement Emerging Capital Partners (ECP). « Durant cette période, les principales opportunités se retrouvent dans les secteurs résilients : la tech, la santé. Des secteurs caractérisés par le fort potentiel de croissance des valeurs ». Il note également que la situation en 2020 est bien différente de celle qui avait prévalu durant la crise financière de 2008. « Les banques centrales africaines ont fortement réagi face à la crise sanitaire, en mettant en place des dispositifs ad hoc… Ce qui laisse beaucoup moins d’opportunités d’investissement dans des sociétés en difficulté (distressed M&A), aux portefeuilles, par définition, plus variés. »
Nous nous attendons à ce que les sociétés de capital-investissement et de capital-risque traversent la tempête dans la seconde moitié de 2020
Des perspectives plutôt optimistes
Si l’on prend l’ensemble des secteurs, un regain de vitalité pour le private equity en Afrique semble attendu pour la deuxième partie de l’année. Ainsi, pour les professionnels du capital-investissement, la remontée des marchés boursiers et l’injection de liquidités invitent à croire que l’activité redémarre.
« Il y a eu une baisse mécanique de l’activité du private equity après le confinement liée à la baisse des marché – et donc de la richesse des investisseurs -, aux difficultés de continuer des deals et des négociations pendant le confinement, mais aussi à un certain attentisme des fonds », rappelle William Nkontchou. Il précise, optimiste : « L’activité va repartir grâce à la remontée des marchés et à l’injection de liquidités. »
Une conclusion que partagent les analystes de l’Avca, sans plus de détails. « Bien qu’aucune région du monde ne ressorte indemne du choc induit par le Covid-19, nous nous attendons à ce que les sociétés de capital-investissement et de capital-risque continuent de soutenir les économies africaines en traversant la tempête dans la seconde moitié de 2020, et au-delà, alors qu’ils s’efforcent de faire face aux retombées de la pandémie. »
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