[Chronique] Le Rwanda mise sur le commerce du cannabis thérapeutique
Sur un continent tenté mais hésitant, le Rwanda vient d’autoriser la culture du cannabis à vocation médicale et à destination exclusive de l’exportation.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 15 octobre 2020 Lecture : 2 minutes.
« Plantez ce que je dis, ne fumez pas ce que vous plantez.» Le Rwanda tente de justifier par deux biais l’autorisation de la production nationale d’un genre botanique inscrit sur la liste des drogues par la Convention unique sur les stupéfiants ratifiée en 1961 par l’Organisation des Nations-Unies. Premier argument : la récente validation de la culture du cannabis, selon un communiqué officiel, « n’affecte en rien le statut légal de la consommation (…) dans le pays, qui demeure interdite ». La production locale sera donc exclusivement orientée à l’export. Gare aux Rwandais tentés de fumer des joints…
« Or vert »
Le second biais de la position rwandaise est la distinction, sur une ligne de crête étroite, entre cannabis « récréatif » et « thérapeutique ». Si la détention, le commerce et la promotion de marijuana ont été longtemps interdits dans la majorité des pays du monde, son absorption est parfois tolérée comme psychotrope à vocation médicale, notamment pour ses vertus anti-nausées, anti-migraines ou anti-insomnie.
À l’échelle internationale, notamment en Amérique du Nord et en Europe, ce marché est devenu si juteux qu’il a généré l’expression « or vert » qui, peu à peu, fait davantage penser au cannabis qu’aux espaces naturels et leur exploitation touristique.
Le Rwanda entend donc tirer profit de ce marché à usage thérapeutique qui, à l’échelle du monde, pourrait dépasser rapidement les 200 milliards de dollars. Ce mercredi, le gouvernement indiquait qu’allait commencer la réception des « candidatures pour des licences de la part d’investisseurs intéressés par cette culture à haute valeur ajoutée ». Le Conseil rwandais du développement (RDB) précise que plusieurs sociétés ont soumis leur offre pour débuter cette production locale.
Le Rubicon de la consommation locale
Le Rwanda n’est pas le seul pays africain à être officiellement tenté par le marché de cette drogue dite « douce », sa dose de tetrahydrocannabinol (THC) n’étant pas susceptible de provoquer une overdose. Déjà, le Maroc est le premier producteur mondial de résine de cannabis avec une surface cultivée estimée à 50 000 hectares. L’Afrique australe s’est rapidement mise dans les starting-blocks agricoles et législatifs, notamment le précurseur Lesotho, le Zimbabwe, l’Afrique du Sud et, avec un peu de retard, la Zambie, le Kenya et l’Ouganda.
Primo, le cannabis peut apparaître comme une alternative au tabac dont la consommation baisse. Secundo, le chanvre, particulièrement pauvre en THC, offre des perspectives d’usages plus présentables que la « fumette », comme son utilisation dans la fabrication de tissus ou de papiers.
Dans ces pays africains où le commerce du cannabis, bien qu’illégal, est souvent ancré dans les habitudes des agriculteurs, qui osera franchir le Rubicon de la légalisation de la consommation locale ?
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