Exploiter le filon

Après avoir été longtemps ignorée ou pillée, l’Afrique veut mettre un peu d’ordre dans son sous-sol. Les compagnies internationales vont devoir se conformer à cette nouvelle donne.

Publié le 10 août 2007 Lecture : 2 minutes.

En République démocratique du Congo (RD Congo), le secteur minier vit un moment décisif. Le gouvernement du Premier ministre Antoine Gizenga a lancé, le 11 juin, un audit des différents contrats qui lient des sociétés étrangères aux entreprises d’État. La plupart de ces joint-ventures ont été constitués durant la guerre et le pillage en règle du sous-sol congolais. Plusieurs rapports tendent à prouver que certains investisseurs ont, à cette époque, bénéficié de conditions très avantageuses pour obtenir des titres miniers. Beaucoup ont alors parlé de contrats léonins. Mais aujourd’hui, le gouvernement est bien décidé à remettre un peu d’ordre. L’enquête parlementaire du député Christophe Lutundula (2005-2006) a chiffré à 10 milliards de dollars le montant des pertes occasionnées par ce dépeçage du sous-sol. Dans les années 1970, le secteur minier représentait 70 % du produit intérieur brut (PIB) du pays, aujourd’hui c’est à peine 10 %. Pour les autorités congolaises, l’objectif affiché est de pouvoir récupérer le manque à gagner et de rassurer les investisseurs en assainissant le secteur.
À première vue, les grandes entreprises minières peuvent se réjouir de l’initiative. Les deux anglo-australiennes BHP Billiton et Rio Tinto, l’américaine Phelps Dodge, la sud-africaine De Beers (diamant), déjà présentes sur le terrain, sont prêtes à démarrer une exploitation industrielle. La canadienne First Quantum Minerals a annoncé, le 3 juillet, la mise en service prochaine de sa mine dans le Katanga. Mais la révision de ces contrats a de quoi jeter le trouble, car quelques-unes de ces majors sont citées dans le fameux rapport Lutundula. Phelps Dodge et First Quantum ont notamment signé des accords de joint-venture avec la Gécamines, l’entreprise d’État détentrice des mines de cuivre-cobalt dans la province du Katanga. Pour Kinshasa, la marge de manuvre est donc étroite. Le ministre des Mines, Martin Kabwelulu, se veut toutefois rassurant. Excluant une « révolution minière », il a évoqué une remise à plat « au cas par cas » des différents contrats, parlant d’« un rééquilibrage » plutôt que de révocation pure et simple.
Loin d’être remis en cause, le partenariat privé-public tendrait même à se renforcer sur des minerais stratégiques. Le 10 juillet, le Commissariat général de l’énergie atomique (CGEA) congolais a signé un protocole d’accord avec Brinkley Mining en vue de la création d’une société d’exploitation de l’uranium détenue à 75 % par la société britannique et à 25 % par la CGEA. Soucieux de tourner la page des années sombres, Kinshasa mise sur une croissance économique portée par le pactole géologique. Mais rien n’est encore gagné. Chaque jour des camions remplis d’or, de cuivre ou de tantale traversent la frontière congolaise. En toute illégalité.

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