Bouaké is back

Promue cinq ans durant, et bien malgré elle, capitale de la rébellion, la deuxième ville du pays a tenu bon. Et retrouve aujourd’hui le giron national ainsi que les signes d’un retour à la normale. Reportage.

Publié le 10 août 2007 Lecture : 14 minutes.

C’est l’histoire d’une survivante. Une survivante épuisée par la guerre, qui a vu ses enfants, petits et grands, vivre d’expédients, fuir ou mourir, ses richesses pillées, ses maisons dépecées. Qui a connu les fracas des tirs de roquettes et des bombardements, les nuits de couvre-feu, l’isolement, la peur, de brefs sursis et autant de désillusions. Une rescapée autrefois rayonnante, maintenant désolée, que deux hommes se sont disputée par armées interposées pendant près de cinq ans. Mais qui, par la grâce de quelque dieu pour les croyants, à force de caractère pour les autres, a résisté. Depuis cinq mois, les manchettes des journaux la persuadent qu’elle est bel et bien sauvée, que l’harmattan finira par emporter ses mauvais souvenirs. Encore une promesse de renaissance, mais un peu plus solide que les autres, à laquelle elle a envie de croire.
Cette survivante s’appelle Bouaké, la deuxième ville de Côte d’Ivoire, le point de rencontre des routes qui alimentent le Burkina et le Mali en marchandises venues d’Abidjan, à quelque 380 kilomètres au Sud, un centre de commerce réputé pour la douceur de son climat et la joie de ses 700 000 habitants. Mais cela, c’était avant le 19 septembre 2002, le jour où la capitale du Centre est devenue le fief des rebelles emmenés par Guillaume Soro, qui ont affronté les Forces de défense et de sécurité de Laurent Gbagbo – officiellement au nom de la reconnaissance de la citoyenneté ivoirienne pour une partie des habitants du pays. Après maints échecs, les belligérants sont enfin parvenus à un accord, le 4 mars dernier, à Ouagadougou, et Guillaume Soro est devenu Premier ministre. Depuis, la paix s’installe, bon an mal an. Et Bouaké essaie de retrouver ses couleurs d’antan.
Sous la grisaille d’un matin de fin juillet, la ville se réveille, quadrillage de goudron et de latérite bordé de maisons basses. Il est 7 heures. Dans la grande rue qui conduit au stade municipal, gros édifice jaune délavé posé sur une friche, les passants sont rares, les voitures et les taxis rouges encore plus, les maquis et les boutiques, fermés.
La veille à la même heure, cette large artère bitumée débordait d’habitants d’Abidjan, de Korhogo (Nord) de Guiglo (Ouest), venus retrouver leurs frères de Bouaké qui n’avaient pas vu pareille affluence depuis l’éclatement de la crise. Le maquis Wale, « prix national d’excellence », a fait recette.
Le Ranhotel, qui a rouvert ses portes il y a peu, après avoir été réhabilité, et ses concurrents, la Grâce, Mon Afrique, le foyer des Jeunes Viateurs, affichaient complet. Les parkings étaient bondés de cars et de minibus. Tout ce monde drapé dans les couleurs de la Côte d’Ivoire – orange, blanc, vert -, le visage bariolé, en tee-shirt à l’effigie de Laurent Gbagbo et Guillaume Soro sourire aux lèvres, célébrait la « Flamme de la paix ».

Les deux têtes de l’exécutif l’ont allumée ensemble sous les acclamations d’une foule euphorique, avant de mettre le feu au brasier des armes dont les plus émus ont récupéré « quelques petits restes », en souvenir. Le 30 juillet 2007 : un symbole, la première fois depuis la campagne présidentielle de 2000, et a fortiori depuis le 19 septembre 2002, que le chef de l’État posait le pied à Bouaké.
Mais la fête a fait long feu, les sifflets et les tam-tams se sont tus, les visiteurs d’un jour ont grimpé dans les bus. Et le 31 juillet, perdue au milieu des herbes folles, des arbres centenaires et des champs de maïs, Bouaké affiche dès le petit matin sa mine cernée de gris. À 11 heures, la rue du stade ne sera guère plus remplie qu’à 7. Au quartier Air France, le salon de coiffure décati qui fait face à l’école TSF Sud n’ouvrira pas. Dans le centre-ville, les portes de l’agence Ecobank et celles de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (BCEAO, dont 20 milliards de F CFA de réserves ont été pillés en septembre 2003) resteront cadenassées. L’enthousiasme festif, qui jadis tenait Bouaké éveillée jusqu’au petit matin, s’est envolé. Le soir venu, ni musique ni danse à la buvette Pacha où, de mémoire d’habitant, l’équipe nationale de football du Nigeria s’est une nuit « amusée comme pas possible ». Comme si l’énergie de Bouaké se concentrait au marché, une succession d’étals en plein air où les klaxons se mélangent aux cris des marchands.
Au début de la guerre, des rebelles – qui s’organiseront rapidement en « Forces nouvelles » – ont pillé les magasins et les maisons. Des détenus leur ont prêté main-forte, la prison civile et le camp pénal ayant été ouverts. Pris de panique, n’ayant pas encore identifié les belligérants, des habitants ont fui, à pied, à vélo, en voiture, dans les villages alentour ou à Abidjan. Certains ont repris le travail des champs. Les bâtiments de l’État, commissariat, préfecture, ont été investis par les nouveaux maîtres de la ville. Les fonctionnaires – policiers, professeurs, employés de l’administration – ont eux aussi rejoint la capitale économique. Depuis, au quartier résidentiel Air France II, leurs maisons les attendent le long des rues trouées de nids-de-poule, portes et vitres cassées, jardins reconquis par une nature exubérante. « La ville s’est vidée de ses forces vives », déplore un notable. Près de la moitié des fonctionnaires, soit 2 000 personnes, et 200 000 habitants l’auraient désertée.
De cette paix ficelée à Ouagadougou il y a cinq mois, Bouaké ne porte pas encore la trace. Mais « la fin de la crise », la « réconciliation », la « réunification » sont sur toutes les lèvres. Intarissables, les habitants ont décidé d’y croire. Bonhomme jovial de taille moyenne, la barbe grisonnante et les cheveux coupés ras, le père Pierre a prêté l’oreille, pendant toute la crise, aux confidences de ses ouailles « moralement brisées ». Aujourd’hui, dans la cour fleurie de son église, il veut bien jouer le jeu : « Moi, je veux bien faire confiance à Laurent Gbagbo et Guillaume Soro. Je ne sais pas ce que chacun d’eux mijote, mais ils savent qu’il y a un temps pour tout et que maintenant, c’est celui de la paix. » Le père Pierre en veut pour preuve que les rangs de l’église, dont « seulement trois bancs étaient occupés fin 2002 », commencent à se garnir : « Pendant la crise, nous ne faisions qu’une messe le week-end. Aujourd’hui, nous en faisons une à 7 heures et une autre à 9 heures, l’affluence reprend, c’est encourageant. »
Nanan Kouakou N’Guessan, qui possède une grande partie de la ville, est, lui, serein. Pourtant, il y a deux semaines, l’irruption dans sa maison d’hommes armés de kalachnikovs – qui déguerpiront après les avoir frappés et volés, lui et son épouse – lui a rappelé les mauvais souvenirs de la guerre. Mais, assis dans le fond de son salon, ouvert sur une cour que protège l’ombre d’un manguier, il attend la visite de Guillaume Soro, imperturbable. « Le 30 juillet, c’est un symbole, c’est une loi qui existe, on ne peut plus revenir en arrière, professe le vieil homme d’une voix rocailleuse, en baoulé. Une commission est venue me voir de la part de Gbagbo et de Soro pour m’annoncer qu’ils allaient faire la paix, poursuit-il. Quand ils viennent me consulter, les hommes politiques ne me trahissent pas. » Comme nombre de notables attachés à leur ville, le sage ne l’a jamais quittée, même aux pires moments, quand, en octobre 2002, des corps calcinés s’étalaient sur la route ou, en novembre 2004, un camp de l’armée française était bombardé par les forces gouvernementales.
C’est peut-être pourquoi cette cité engourdie, maussade, n’est tout de même pas la ville fantôme que décrivent les Abidjanais. Isolée du reste du pays par la zone de confiance, une bande large de 60 kilomètres sous contrôle de l’Onuci qui s’étend à sa frontière Sud – démantelée en avril -, elle a continué à tourner, et certains n’ont pas attendu l’accord de Ouagadougou pour y revenir, ou même s’y établir. Comme Aïcha, petite jeune femme timide dans son boubou orange, qui rentre à la maison, un sac de provisions à la main, son nourrisson sur le dos. « Je suis venue ici parce que la grand-mère est morte, chuchote-t-elle. Et puis, je suis restée. J’ai monté un petit commerce. » Son fiancé, un « élément » des Forces nouvelles, lui donne de l’argent pour compléter, ce qui lui « permet de vivre ».

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Avec la crise, les prix ont généralement baissé. Les produits ménagers qui viennent du Ghana, les disques importés du Togo, les oignons du Niger ne sont pas soumis aux taxes, l’administration ayant déserté. « Une moto que vous trouvez à 800 000 F CFA à Abidjan en coûte 300 000 F CFA ici », assure un jeune homme. Les habitants ne paient plus d’impôts à l’État – les Forces nouvelles prélèvent néanmoins des taxes -, l’eau et l’électricité sont gratuites et les Abidjanais se plaignent de voir leurs factures augmenter d’autant. Impossible d’obtenir un permis de conduire ou une carte d’identité, le commissariat étant passé sous le contrôle des Forces nouvelles. La poste n’est plus là, mais on se débrouille. Théodore passe par une compagnie de cars pour envoyer des lettres à sa famille à Abidjan.
Oui, il y a eu des pénuries. Au comptoir de la librairie Univers, Moussa Diabaté, le patron, fulmine devant ses étals qui n’ont pas été approvisionnés depuis le début de la crise. « Les fournisseurs ne veulent plus nous faire crédit, ils disent que c’est risqué. » Les banques ayant fermé, il ne peut les payer par virement. Pendant ce temps, les manuels scolaires qui remplissent les rayonnages se sont périmés, car en zone gouvernementale, ils ont été remplacés. Les trois grossistes qui alimentaient les pharmacies de la ville – dont certaines ont été pillées – ont également plié bagage. « On avait des hypertendus, des diabétiques, des cardiaques qui n’avaient plus leur traitement, raconte un pharmacien. Mes recettes ont baissé de plus de 70 % avec la crise. »

Mais depuis six mois, ce dernier sent une amélioration. Deux des trois grossistes sont revenus. « C’est le signe que c’est la fin », assure-t-il. Même son de cloche chez Doumbia, Sénégalais d’une trentaine d’années qui vend tout à la fois des téléphones portables, des piles, des postes de radio dans une échoppe du centre : « Ça reprend doucement, doucement, mais ça reprend. » Depuis 2005, le fonctionnement de la Nouvelle Librairie de Côte d’Ivoire, qui affiche les unes de la presse internationale sans retard sur leur date de parution, a repris son cours normal. Et depuis janvier 2006, ses employés ne sont plus obligés d’aller chercher la marchandise à Yamoussoukro, à 110 kilomètres. Le livreur accepte de faire le voyage jusque dans la « ville rebelle », les coupeurs de route ont cessé de semer la terreur et les barrages des Forces nouvelles qui ponctuaient le trajet ont quasiment disparu. Le préfet a repris ses quartiers, dans des bureaux réhabilités. L’enseignement, lui, n’a connu que deux interruptions, entre octobre 2002 et janvier 2003 puis de novembre 2004 à janvier 2005. Les effectifs – primaire et secondaire – pour l’ensemble de la région de Bouaké ont chuté de 245 000 à 140 000. Seulement un quart des professeurs du secondaire est resté. Il leur a fallu renoncer à leur paie, qu’ils ne pouvaient toucher en raison de la fermeture des banques, et enseigner avec les moyens du bord dans des salles de classe parfois vides de tables et de chaises, le matériel didactique ayant été pillé. « Le niveau en a pris un coup », reconnaît un responsable de l’Éducation nationale qui préfère garder l’anonymat. En retard, les examens se sont néanmoins presque toujours tenus. Et, pour la première fois cette année, les épreuves de l’entrée en sixième se sont déroulées en même temps qu’à Abidjan, le 31 juillet. Les Forces nouvelles et les Forces de défense et de sécurité ont assuré ensemble la sécurité des opérations. Un signe de la réunification.
Mais ce sont toujours les Forces nouvelles, dont leur branche armée est omniprésente dans le paysage, qui ont la haute main sur la ville. Accoudé au bar de la cafétéria Jérusalem, une échoppe peinte en bleu où l’on peut boire une tasse de café clair et manger une tranche de pain – avec du beurre quand il y en a -, Germain, employé d’hôtel, regarde filer l’un de leurs convois. Des pick-up chargés de militaires, regard fixe et béret rouge, escortent un 4×4 noir aux vitres fumées, sans plaque d’immatriculation. « Dedans, c’est Anaconda », assure le client. Anaconda, le nom de guerre de Ouattara, également surnommé Wattao par ses camarades, le chef d’état-major adjoint des Forces armées des Forces nouvelles (FAFN). Les dignitaires de cette armée rigoureusement organisée, Germain les connaît tous : Chérif Ousmane, le « chef de tous les comzones » (commandants de zone), son adjoint, Famoussa, Dem Kool, « chef de sécurité du secteur Ouest ». Chaque jour, il assiste à leurs parades qui, avec celles de l’Onuci, constituent l’une des rares animations de la ville. Sans coups de feu ni cris de guerre, elles sont toutefois plus sobres aujourd’hui qu’aux premiers mois de la crise.
Pour approcher le « grand » Wattao, il faut passer Dem Kool. Trente-six ans, silhouette sahélienne, tatouage au bras droit, ce dernier reçoit dans une villa « abandonnée par ses habitants au début de la crise ». Dans la cour, un 4×4 et un coupé de marque japonaise. En caleçon et maillot de corps blancs, assis sur un canapé dans un salon où trône une télévision à écran plat, il sort manifestement tout juste de son sommeil. La veille, il s’est chargé de la sécurité de la cérémonie de la Flamme de la paix, placée sous haute surveillance à cause de l’attentat qui, le 29 juin, a visé l’avion du Premier ministre Guillaume Soro, tuant quatre personnes. « On a patrouillé avec les Forces de défense et de sécurité, lâche-t-il entre deux bâillements. Pendant quarante-huit heures, on a dormi dans les mêmes camions. Ça s’est très bien passé. »
Vivant manifestement dans l’aisance, respecté, ce musulman pratiquant, « caporal-chef » dans l’armée régulière avant de rejoindre les FAFN, a-t-il vraiment intérêt à déposer les armes ? « La paix, c’est une bonne chose, assure-t-il. Il y a eu trop de souffrances. Si on continue comme ça, la Côte d’Ivoire va reculer. » Quant à ceux qui ont montré qu’ils ne voulaient pas de cette paix en lançant une roquette sur l’avion du Premier ministre, Dem Kool dit ne pas les craindre et préfère les narguer : « Ils nous ont permis de corriger certaines choses sur le plan sécuritaire. »

Pendant la guerre, des membres des FAFN comme des Forces de défense et de sécurité ont bénéficié de promotions fulgurantes, moyen pour leurs états-majors respectifs de les empêcher de passer dans le camp adverse. A priori, les membres des FAFN qui souhaiteront intégrer l’armée régulière ne seront pas dégradés. Et, pour ceux qui préfèrent le retour à la vie civile, le versement d’un petit pécule est prévu qui leur permettra de lancer une activité. Dem Kool penche pour la deuxième solution. Il n’a pas encore décidé de son « business », mais sait qu’il s’installera à Abidjan avec ses trois enfants parce que « si on veut changer de vie, il faut changer de lieu ».
Le prestige qu’ont acquis pendant la guerre certains dignitaires des Forces nouvelles, devenues de véritables éminences locales, le faste dans lequel ils ont vécu, laissent supposer que c’est avec regret, voire réticence, qu’ils retourneront à l’anonymat de l’armée. Un coup de fil au responsable de la sécurité d’Anaconda, « Sergent Petit Major », homme sec qui ne parle ni ne sourit derrière une épaisse brûlure lui boursouflant la joue droite, permet enfin d’accéder à la « légende » de Bouaké. Ou plutôt à sa salle d’attente, où patientent deux visiteurs venus le saluer avant de prendre la route pour Abidjan. Des photos de Che Guevara, du commandant Massoud et d’Anaconda lui-même, en uniforme, le visage inondé de soleil, décorent les murs. Gage d’allégeance, le portrait de Guillaume Soro trône au milieu de tous. Derrière la porte, Wattao, 39 ans, est assis à un petit bureau encombré d’un ordinateur à écran plat, d’une dizaine de téléphones portables et d’un cendrier aguicheur, sculpture de femme blonde qui offre sa poitrine généreuse au fumeur déposant sa cendre. Dans un coin de la pièce, une machine à café expresso. Dents du haut écartées, sourire presque candide, carrure de boxeur, le maître des lieux, ceinture noire de judo – deuxième dan -, Wattao donne sans conviction des garanties sur sa détermination à faire la paix : « S’il y a une faute, elle ne viendra pas de nous, et je suis sûr que le camp présidentiel est sincère. » Ses déclarations de bonne volonté ne convainquent pas tous les habitants de Bouaké, qui voient s’aligner une quinzaine de 4×4 rutilants aux abords de son imposante villa – quartier Air France – et savent que le champagne coule à flots à l’Acier Métal, au Savannah et au bar des Réconciliés, les trois night-clubs qu’il gère et que ne fréquentent pratiquement que les FAFN. Sa reconversion, ce colosse en uniforme aussi doué en stratégie militaire qu’en affaires n’y a pas encore pensé, car « mon avenir dépend de Dieu ». Mais il prétend que la Côte d’Ivoire est désormais prête à « avoir une armée unique ».
Germain assure qu’un « élément des Forces nouvelles a tué son parent au village, en 2003 », mais, comme beaucoup d’habitants de Bouaké, il ne nourrit ni crainte ni haine de Wattao ou de ces militaires postés à chaque coin de rue. « Ils ont toujours protégé la population, raconte-t-il. Ils n’ont pas cassé les canalisations, ils ont laissé les habitants utiliser l’électricité, ils ont assuré l’ordre. »
D’une certaine manière, c’est grâce à ces bêtes noires de Laurent Gbagbo que la ville n’a jamais basculé dans l’anarchie et la misère absolue. Président du conseil général de Bouaké – délocalisé à Abidjan à cause des « événements » – et directeur de cabinet de Charles Konan Banny quand il était Premier ministre, Jean-Claude Kouassi raconte comment, voulant apporter des vivres dans sa ville natale, il a collaboré avec les Forces nouvelles : « Nous avions un contact direct avec les comzones. La première fois que nous sommes allés les voir, ils nous ont dit : Nous avons le devoir de vous protéger parce que vous aidez la population. Nous y sommes retournés plusieurs fois. Et, même si tout était ralenti, nous avons réussi à mener notre programme d’électrification. »

Pour autant, Germain n’a jamais eu envie de faire comme son copain Charles, 28 ans, qui a rejoint les FAFN. Quand la guerre a éclaté, ce dernier étudiait le droit à l’université de Bouaké. Il n’avait jamais tenu une arme, mais s’est engagé dans le but « faire cesser les brimades ». Aujourd’hui, il assure être « l’équivalent d’un officier ». Il est logé, nourri, mais, contrairement à ses supérieurs, ne gagne pas d’argent. « Compte tenu de la fatigue d’un camp comme de l’autre, nous sommes prêts à aller à la paix », se résigne-t-il. À une condition toutefois, et pas des moindres : que l’État ou quelque autre instance le dédommage pour ces cinq années passées bénévolement dans les Forces nouvelles, au « service de la population ». S’il n’obtient pas gain de cause, Charles assure qu’il reprendra les armes. Il est encore trop tôt pour dire si les autorités satisferont sa revendication. En attendant, le jeune homme espère une bourse d’études à l’étranger. Comme Bouaké, il s’est remis à rêver.

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