Rwanda-Burundi : l’espoir de normalisation de retour
Les ministres des Affaires étrangères burundais et rwandais se sont vus le 20 octobre, à la frontière commune de Nemba-Gasenyi. Une rencontre inattendue tant les relations entre leurs deux pays sont compliquées.
La rencontre aura surpris tout le monde : les ministres burundais et rwandais des Affaires étrangères se sont retrouvés, dans la matinée du 20 octobre, au poste-frontière de Nemba-Gasenyi.
Aucune annonce officielle n’avait été faite en amont de la rencontre. Le communiqué publié après a toutefois eu soin de préciser que c’est le gouvernement burundais qui a pris l’initiative de cette entrevue – une information confirmée à Jeune Afrique par le ministère rwandais des Affaires étrangères.
La présidence burundaise n’a pas souhaité formuler ce qui avait motivé sa démarche, assurant vouloir « éviter des contradictions ou des discordances qui pourraient créer des polémiques inutiles ».
Au point mort
Pendant l’entretien, qui a duré moins d’une heure, le Burundais Albert Shingiro et le Rwandais Vincent Biruta ont échangé sur « les relations historiques [qui unissent] le Rwanda et le Burundi ainsi que [sur les] défis auxquels [ils] font face depuis 2015”.
C’est peu dire, tant les relations entre les deux voisins semblent au point mort. Ces dernières semaines, le Rwanda a paru tendre la main au Burundi. Début septembre, Paul Kagame a ainsi indiqué, lors d’une conférence de presse, que son “pays était disposé à vivre en harmonie avec les pays voisins, dont le Burundi, dans l’intérêt de tous”. Mais celui-ci n’avait jusqu’à présent pas semblé réceptif.
Signaler la présence de tout rwandophone sur le sol burundais
Mi-octobre, depuis Bujumbura, le porte-parole du ministère chargé de la Sécurité publique a même appelé les Burundais à “signaler la présence de tout rwandophone sur le sol burundais et [à] appeler la police”, arguant que “la sécurité au Burundi a de tout temps été perturbée par des personnes parlant kinyarwanda en provenance du Rwanda”.
Ces derniers mois, plusieurs tentatives de rapprochement ont été effectuées. Il y a d’abord eu cette rencontre entre les chefs des services de renseignements militaires des deux pays, qui se sont engagés à échanger davantage d’informations d’ordre sécuritaire. Dans la foulée, le processus de rapatriement de réfugiés burundais vivant au Rwanda a commencé.
Pour autant, les progrès sont très lents. À preuve : l’organisation difficile du sommet sous-régional qui devait se tenir à Goma (est de la RDC) début septembre. Il a finalement eu lieu début octobre, par visioconférence, en présence des présidents du Rwanda, de l’Ouganda, de l’Angola et de la RDC.
Les chefs d’État participants se sont notamment engagés à éradiquer les groupes armés actifs dans l’est de la RDC, qui bénéficient pour certains de l’appui de pays de la sous-région. Mais le président burundais n’a pas souhaité y prendre part, alors même qu’il avait été convié et que son pays est parfois lui aussi la cible d’attaques, revendiquées par les rebelles du RED-Tabara, présents dans la province congolaise du Sud-Kivu.
Les relations entre le Burundi et le Rwanda se sont fortement détériorées depuis 2015, le premier accusant le second d’avoir accordé l’asile aux auteurs de la tentative de coup d’État des 13 et 14 mai 2015, menée contre l’ancien président, feu Pierre Nkurunziza.
L’arrivée d’Évariste Ndayishimiye à la tête du pays en juin dernier a nourri l’espoir d’un rapprochement entre les deux pays. Mais la nomination d’Albert Shingiro au poste de ministre des Affaires étrangères a tempéré les observateurs. Celui-ci s’était en effet illustré en 2018 en tenant des propos négationnistes à l’égard du génocide des Tutsi au Rwanda alors qu’il représentait le Burundi aux Nations unies.
La rencontre de ce mardi est-elle le signe d’un début de normalisation ? Difficile à dire. Les deux hommes se sont en tout cas promis de se revoir sur le sol burundais, à une date qui n’a pas été précisée.
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