Au Cameroun, effroi et colère après le massacre de huit élèves dans le Sud-Ouest anglophone

Les condamnations se multiplient depuis l’annonce, le 24 octobre, de l’assassinat de huit élèves dans une école privée de Kumba, dans la région anglophone du Sud-Ouest.

Un soldat du Bataillon d’intervention rapide (BIR), à) Buea, dans le Cameroun anglophone, en octobre 2018. Photo d’illustration. © REUTERS/Zohra Bensemra

Un soldat du Bataillon d’intervention rapide (BIR), à) Buea, dans le Cameroun anglophone, en octobre 2018. Photo d’illustration. © REUTERS/Zohra Bensemra

Franck Foute © Franck Foute

Publié le 25 octobre 2020 Lecture : 3 minutes.

Les habitants de Kumba sont sous le choc depuis l’assassinat, dans l’enceinte du collège Mother Francisca, de huit élèves tombés sous les balles d’individus encore non identifiés ayant fait irruption samedi dans cet établissement privé.

Selon des témoignages recueillis par Jeune Afrique, les assaillants – neuf individus vêtus en civil et non cagoulés – ont fait irruption à moto peu avant la sortie des classes prévue à midi. Les alentours de l’établissement scolaire étaient alors bondés d’élèves. Dans les régions anglophones du Cameroun, le samedi est un jour de cours ordinaire, en raison des opérations « lundis villes mortes » qui amputent la semaine d’un jour de classe.

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Après avoir tiré en l’air, certains des assaillants sont entrés armés dans la classe de form one – qui correspond à la sixième dans le système éducatif anglophone – et ont ouvert le feu sur les jeunes élèves. Le bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA) évoque des enfants « découpés à la machette ». Le bilan fait également état d’une quinzaine de blessés.

Colère

Selon les autorités camerounaises, cette attaque est sans équivoque « l’œuvre des milices séparatistes ». Si cette thèse est également partagée par de nombreux habitants de Kumba, la facilité avec laquelle l’attaque a été menée les révolte. « On nous a assuré que nos enfants seraient protégés à l’école. Comment cela a-t-il pu arriver ?, s’interroge John Enow, dont le jeune fils de son voisin, âgé de 11 ans, fait partie des huit victimes. Aucune cause ne peut justifier le meurtre d’innocents enfants. »

Dans un communiqué publié dans la nuit du 24 octobre, le porte-parole du gouvernement, René Emmanuel Sadi, affirme que le collège avait ouvert au début de cette année scolaire « à l’insu des autorités administratives compétentes », d’où l’absence de mesures de protection.

Un argument que rejettent plusieurs sources à Kumba. « Cet établissement fonctionne depuis au moins trois ans », affirme l’une d’entre elles sous couvert d’anonymat.

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La tuerie a provoqué une forte émotion. Le Premier ministre camerounais Joseph Dion Ngute a tenu un conseil ministériel extraordinaire. À son issue, une délégation dirigée par le ministre de l’Administration territoriale Paul Atanga Nji et comprenant les ministres des Enseignements secondaires et de l’Éducation a été dépêchée sur les lieux. Sur le terrain, le préfet du département a indiqué que des mesures avaient été prises « pour rattraper les auteurs de ce crime crapuleux » et qu’ils « répondront de leurs actes devant les juridictions camerounaises ».

Appels à la reprise des pourparlers

À travers son ambassade au Cameroun, les États-Unis ont condamné « en des termes les plus vifs » cette attaque et appelé à la fin des violences. Le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, s’est dit « horrifié » par cette nouvelle, tout comme l’ambassadeur de France au Cameroun, Christophe Guilhou, qui demande que leurs auteurs soient « traduits en justice et condamné ». L’Union européenne dénonce quant à elle « une violation du droit international sur les populations civiles ».

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De son côté, l’opposition camerounaise a appelé à la reprise de pourparlers avec tous les acteurs du conflit en vue d’un cessez-le-feu. Le leader du Mouvement pour la renaissance du Cameroun, Maurice Kamto, a estimé que seule « une solution politique » pourrait ramener la paix.

Plus critique, le député Jean Michel Nintcheu du Social democratic front (SDF) interroge les assurances données par Yaoundé au sujet de la sécurisation des établissements scolaires. « Ce manquement a de fait transformé les élèves en bouclier humain, la responsabilité du régime est formellement établie, a-t-il dénoncé. Seuls la résolution du contentieux national et le retour au fédéralisme pourront déboucher à court ou moyen terme sur une paix durable. »

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