Génocide des Tutsi au Rwanda : Félicien Kabuga transféré à La Haye
Moins d’un mois après le rejet de son pourvoi en cassation, l’ancien homme d’affaires Félicien Kabuga, soupçonné d’avoir été le financier du génocide des Tutsi au Rwanda, a été remis ce lundi au Mécanisme de l’ONU sur le Rwanda, à La Haye, avant un éventuel transfert à Arusha.
Après le rejet de son pourvoi, par la Cour de cassation de Paris, le 30 septembre dernier, la France, qui avait un mois pour remettre l’ancien homme d’affaires à la justice internationale, a procédé ce lundi 26 octobre à son transfert devant le Mécanisme de l’ONU. Félicien Kabuga est arrivé en milieu de journée à La Haye, où siège l’une des branches de cette juridiction qui assure les fonctions résiduelles du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Ce passage au Pays-Bas pourrait n’être qu’une simple étape pour celui qui, jusqu’à son arrestation le 16 mai dernier, était le plus célèbre fugitif rwandais.
Connu comme étant l’un des hommes les plus riches du Rwanda avant le génocide, Kabuga est visé par sept chefs d’accusation, dont ceux de « génocide », « complicité de génocide », « incitation à commettre le génocide » et « crimes contre l’humanité ». Président de la tristement célèbre Radio-Télévision libre des Mille Collines (RTLM), connue pour avoir propagé des appels à l’extermination des Tutsi, il est aussi soupçonné d’avoir importé plusieurs tonnes de machettes et d’avoir assuré le transports de miliciens Interahamwe vers les lieux des massacres. Après deux décennies de cavale, il avait finalement été arrêté en France, où il résidait sous un nom d’emprunt depuis plusieurs années.
La Haye ou Arusha ?
Le mandat d’arrêt qui le vise prévoit en principe qu’il soit jugé au siège du Mécanisme, à Arusha, en Tanzanie. Sollicité par l’avocat de Kabuga, Me Emmanuel Altit, ainsi que par le Procureur du Mécanisme, Serge Brammertz, le juge Carmel Agius, le président de cette juridiction, a accepté le 21 octobre qu’il soit transféré dans un premier temps à La Haye. Parmi les raisons évoquées par ce dernier figure notamment la pandémie de coronavirus qui complique l’acheminement de l’accusé jusqu’en Tanzanie. Un voyage qui, précise le juge, impliquerait « onze heures de vol et un passage par trois aéroports ».
Mais la principale inconnue reste à ce jour l’état de santé de Félicien Kabuga, sur lequel ses avocats n’ont eu de cesse d’insister depuis le début de la procédure en France. Âgé de 84 ans, 87 selon ses dires, et incarcéré depuis mai à la maison d’arrêt de la Santé, il fait, selon sa défense, l’objet d’un suivi médical régulier. Kabuga souffrirait de diabète et d’hypertension et serait aussi atteint de « leucoaraïose », une pathologie qui affecte ses fonctions cognitives. Ses avocats ont estimé que son état rendait impossible son transfert vers Arusha. Le président du Mécanisme a expliqué n’être pas en mesure « d’évaluer en toute connaissance de cause la capacité de Kabuga à voyager et à être à Arusha« . Des examens plus poussés à La Haye devraient permettre de trancher cette question.
Aucune date n’a été transmise pour sa première comparution devant les magistrats saisis de l’affaire. La composition de la chambre en première instance est néanmoins connue. Elle sera composée du juge Iain Bonomy, qui présidera les débats avec la juge Graciela Susana Gatti Santana et la juge Elizabeth Ibanda-Nahamya.
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