Kitea veut meubler l’Afrique
Après avoir lancé les meubles en kit au Maroc depuis une quinzaine d’années, Kitea enfonce le clou avec des hypermarchés géants et en exportant son concept au Maghreb et en Afrique subsaharienne.
Viendra, viendra pas ? Depuis deux ans, les rumeurs de l’arrivée d’Ikea au Maroc se multiplient. Si le géant suédois du meuble en kit prospecte clairement le marché – il s’est notamment rapproché du groupe Aksal, de Salwa Akhannouch, spécialisé dans le développement de franchises -, Kitea a pris les devants. Pour occuper le terrain, la principale enseigne marocaine du secteur s’est lancée dans un ambitieux programme de magasins géants (de 4 000 à 7 000 m²) à travers le Maroc. « Les groupes étrangers attaqueront directement ce segment laissé vide par les marques marocaines. Nous voulons être là avant eux », confie Amine Benkirane, le directeur et fondateur de Kitea, qui est à la tête, notamment, de vingt-six points de ventes de 1 200 à 1 500 m² au nom de l’enseigne dans quinze villes marocaines.
Un premier Kitea géant vient d’ouvrir à Marrakech. Un autre suivra cet été à Casablanca avant Oujda, Mohammedia, Salé, Fès, Tanger, Agadir. Au total, le distributeur projette de construire huit Kitea géants avant la fin de 2010. Implantés par le biais de franchises, ces hypermarchés du meuble en kit nécessiteront un investissement qui tournera autour de 3 millions d’euros par magasin. « C’est aussi un moyen pour nous de proposer une gamme de produits plus large, ajoute-t-il. Nous sommes un peu à l’étroit dans nos magasins traditionnels où nous ne pouvons pas exposer l’ensemble de nos produits. À chaque saison, il faut faire des choix cornéliens pour approvisionner au mieux nos espaces de vente. »
Lancé en 1993, Kitea est devenu un acteur incontournable. Il emploie 700 salariés et a réalisé un chiffre d’affaires de 25 millions d’euros en 2005. Depuis, le volume d’activités de la société connaît une croissance à deux chiffres. Selon le fondateur, Kitea détiendrait plus de 50 % du marché, loin devant ses concurrents Mobilia et Kaoba. La réussite de l’enseigne tient avant tout dans sa stratégie marketing. « Les modes de consommation commençaient à changer, se souvient le fondateur. À l’époque, je venais d’acheter un appartement et je ne trouvais pas de meubles dans lesquels je pouvais m’identifier. Il n’y avait rien pour les jeunes couples, les étudiants et la clientèle urbaine. »
Sur un marché alors dominé par quelques grandes enseignes de luxe, les souks et les fabricants traditionnels (artisans, menuisiers et autres tapissiers), Kitea a joué la carte du kit, avec des meubles importés à 65 % d’Asie, d’Amérique du Sud et d’Europe. « Il a fallu du temps pour habituer la clientèle à une distribution organisée, se souvient Mina Lahlou, la directrice marketing. Les gens n’étaient pas accoutumés à l’affichage des prix, à la livraison et au service après-vente. Au départ, certaines personnes refusaient même les factures, par méfiance. » Finalement, le meuble en kit s’est démocratisé auprès des classes moyennes et supérieures et, maintenant, en direction des ménages à petits revenus attirés par la modernité.
Toutefois, Amine Benkirane anticipe la saturation du marché marocain d’ici une dizaine d’années. Il s’est lancé dans l’export dès 2005 à travers un réseau de revendeurs indépendants en Afrique (Sénégal, Cameroun, Gabon, Niger, MauritanieÂÂ) qui doit permettre de jauger le terrain avant de créer un réseau de franchisés. Quant au Maghreb, Kitea compte l’attaquer avec l’artillerie lourde. Des Kitea géants pourraient ouvrir en Algérie et en Tunisie. « Les négociations sont très avancées », élude Amine Benkirane. Et l’Europe ? « Ce n’est pas notre terrain. Après le Maghreb, nous nous tournerons vers le marché arabe. »
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