Villes en quête de solutions

Publié le 11 juillet 2003 Lecture : 6 minutes.

Peu de pays d’Afrique ont pu bénéficier, au cours de leur histoire récente, de circonstances aussi favorables à un redémarrage de leur économie que celles dont jouit actuellement le Cameroun. Et rarement autant de circonstances favorables au développement se sont trouvées réunies, au même moment, en un seul pays.
Il faut dire que c’est une véritable pluie de bonnes nouvelles qui s’est abattue sur le Cameroun depuis que celui-ci a été admis au sein du club des États bénéficiaires de l’initiative dite PPTE (en faveur des pays pauvres très endettés). Ainsi, le 13 mai dernier, les intérêts de la dette commerciale camerounaise (700 millions d’euros) ont été purement et simplement effacés par les créanciers privés. Quant au principal de cette dette, il est prévu qu’il soit racheté par le Cameroun lui-même à 14,5 % de sa valeur, grâce à des dons de la Banque mondiale, de la France et de la Norvège.

Quelques jours plus tôt, le 5 mai, la Banque mondiale, encore elle, avait annoncé sa décision de soutenir le développement socio-économique du Cameroun en débloquant 75 milliards de F CFA (plus de 114,3 millions d’euros), destinés essentiellement à un programme d’amélioration des conditions de vie des populations. En outre, l’approbation prochaine, par les institutions de Bretton Woods, de son programme de réduction de la pauvreté devrait permettre au pays de bénéficier d’un nouvel allègement de gramme de réduction de la pauvreté devrait permettre au pays de bénéficier d’un nouvel allègement de dette d’un montant de 1 400 milliards de F CFA (2,1 milliards d’euros) !
Comme on peut le voir, le Cameroun a la cote. Pourtant, il revient de loin. Il n’y a pas si longtemps, en effet, il figurait encore dans le peloton de tête des pays rongés par la corruption, et les institutions internationales avaient fait de la lutte contre ce fléau un préalable à l’octroi de nouveaux crédits. Aujourd’hui, force est de constater que son image s’est un peu améliorée. Le Comité de lutte contre la corruption, créé en juillet 1998 et présidé par le Premier ministre Peter Mafany Musonge, y est certainement pour quelque chose. Depuis ce jour, des cellules anticorruption ont été mises en place dans chaque département, des sanctions sont tombées. Des têtes aussi…
Nul doute que ces signaux contribuent au rétablissement de la confiance. Mais si les flux financiers convergent à nouveau vers Douala et Yaoundé, cela est dû, avant tout, à l’amélioration des perspectives économiques d’un pays qui a su traverser de longues périodes de vaches maigres sans jamais basculer, comme certains de ses voisins, dans la guerre civile ou l’instabilité. D’ailleurs, entre 2000 et 2001, les investissements directs étrangers (IDE) sont passés de 31 millions à 75 millions de dollars. Il est vrai que la réalisation de l’oléoduc Tchad-Cameroun, dont la mise en service est prévue dans les prochaines semaines, y a beaucoup contribué. Il n’en demeure pas moins que les investissements devraient se maintenir à un niveau élevé au cours des années à venir. Grâce notamment à la l’ouverture de nouveaux chantiers, à la modernisation du port de Douala, à l’exploitation d’un gigantesque gisement de nickel et de cobalt à Lomié, dans la province de l’Est, et aux nombreux projets de modernisation de la capitale économique, qui, soit dit en passant, en avait bien besoin.

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Après plus d’une décennie d’un inexorable processus de délabrement, on est bien obligé d’applaudir. Au vu d’une conjoncture aussi propice, il eût été désespérant que le pays ne cherche pas à se doter, enfin,érant que le pays ne cherche pas à se doter, enfin, d’un port digne de son intense activité économique et de son rayonnement sous-régional. Dût-il en passer par la réalisation de projets pharaoniques. Comme quoi il ne faut jamais désespérer du Cameroun. nLes villes africaines s’asphyxient. L’activité économique des centres urbains se nourrit du va-et-vient quotidien de milliers de personnes entre leur domicile et leur lieu de travail. Et, pour faciliter la croissance du parc automobile africain, ont été mises sur le marché de nombreuses voitures anciennes bon marché, mais très polluantes. Face à ce problème, le gouvernement algérien a décidé de relancer un ambitieux programme de transports en commun. Démarré en 1990, le chantier du métro d’Alger a souffert de nombreux retards et engendré de multiples dérapages budgétaires. Une rallonge a été dégagée l’an dernier pour finaliser le premier tronçon de 9 km. En début d’année, un appel d’offres a été lancé pour la réalisation d’un tronçon supplémentaire, pour un coût de 270 millions d’euros. Il est aussi question de doter la ville d’un tramway dans trois ans. Reste qu’en ce domaine la ténacité algérienne tient de l’exception. De nombreuses villes africaines ne peuvent se permettre de construire un métro souterrain, sachant que chaque kilomètre nécessite plus de 50 millions d’euros d’investissement. Aujourd’hui, seul Le Caire dispose d’un métro en état de marche, et l’unique tramway opérationnel se trouve à Tunis.

Sur le reste du continent, la mauvaise gestion et le manque de rentabilité des transports en commun publics leur ont été fatals. En Afrique subsaharienne, les réseaux ferrés qui reliaient le centre des agglomérations à leur périphérie, construits il y a plusieurs décennies, sont à l’abandon. Mais c’est parce que leurs tracés pourraient resservir à l’avenir qu’ils doivent impérativement être préservés. Pour Alain Bloch, ingénieur en chef de Setec International (France), « certains réseaux de chemin de fer datent de plusieurs dizaines d’années et mériteraient d’être modernisés. C’est notamment le cas du petit Train bleu, à Dakar. Mais il faut d’abord remplacer les rails, et installer des trains urbains de type Réseau express régional (RER). L’avantage de ces infrastructures, c’est qu’elles sont bien situées, d’autant que les villes se sont souvent « étalées » le long de ces voies ferrées. » De leur côté, les compagnies publiques de bus ont généralement fait faillite. Les transports collectifs légers, affrétés par des privés, sont alors devenus indispensables, comme en témoigne le sociologue Ivan Evans, chercheur à l’université de San Diego, aux États-Unis : « En Afrique du Sud, les minivans qui servent de taxis sont prévus pour six personnes, mais ils en transportent facilement une quinzaine. Le nombre d’accidents est très élevé. Le danger provient aussi des échanges violents entre chauffeurs de taxi qui essaient de se voler des passagers les uns aux autres. Mais pour des millions de travailleurs, ce type de transport reste la meilleure solution, notamment parce qu’ils les déposent plus près de leur maison que les trains ou les bus. »

La solution du tramway revient pourtant en force, et pas seulement dans les pays riches. Étienne Lhomet, chef de projet chez Semaly, société française d’ingénierie de transports publics, explique pourquoi il la trouve pertinente pour le Maghreb : « Les villes du Maroc ou de l’Algérie sont construites « à la française », avec des avenues de plus de 20 mètres de large, conçues pour ce type d’équipement. En accouplant deux rames de trente mètres, entre 12 000 et 15 000 passagers peuvent être transportés chaque heure. Cinq fois plus qu’en bus ! Le débit est proche de celui d’un métro pour un investissement très inférieur. » En revanche, pour les pays les plus pauvres, si les bus ne sont pas rentables, les tramways ne le sont guère plus, d’autant que leur maintenance demande une organisation et des moyens sophistiqués. Plus réaliste, le Conseil exécutif des transports urbains de Dakar (Cetup) a préféré lancer en 2002, en coopération avec la Banque mondiale, un programme d’amélioration sur sept ans des transports par minibus privés. Formation du personnel, subventions à l’achat de véhicules plus spacieux et plus sûrs, optimisation des trajets empruntés, surveillance de la qualité de l’air : des mesures qui constituent une première réponse à la crise des transports urbains.

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