Un chouette pays

Publié le 16 juillet 2003 Lecture : 2 minutes.

À Maputo-la-Blanche, il fait vraiment bon vivre. Une fois n’est pas coutume, donnons donc un peu d’écho à une belle réussite, celle d’une ville qui a su, avec bonheur, faire table rase des séquelles de la guerre civile et fournir à ses habitants l’un des plus beaux cadres de l’Afrique australe. Promenons-nous dans ces belles avenidas où jaracandas et flamboyants jettent sur le passant tranquille une ombre embaumée. Au fond de jardins frais, des villas cossues, portant la griffe d’architectes inspirés, rivalisent d’élégance avec les vieux bâtiments coloniaux restaurés dans l’esprit lusitanien du siècle des lumières. Et même si Mia Couto, le plus célèbre des écrivains mozambicains, amoureux impénitent des mots-valises, trouve que la vie s’est « désaportugaisée », on y respire encore un air de fado nostalgique d’impossibles splendeurs. Il n’y a plus que les noms de rue pour se souvenir des années de marxisme-léninisme.

Elles se sont vite évanouies, les utopies politiques qui ont conduit le Frelimo, alors parti unique, à l’affrontement avec la Renamo, au début des années 1980. Depuis que la paix a été signée, le 4 octobre 1992, l’économie libérale a fait un « grand bond en avant »… Et c’est surtout par habitude qu’entre l’avenida Karl-Marx et l’avenida Vladimir-Lénine (sic) on continue à rendre hommage aux camarades Ho Chi-Minh, Mao Zedong et autres Friedrich Engels. Samora Machel, premier président après l’indépendance du Mozambique, le 25 juin 1975, voulait bâtir « un homme nouveau avec une mentalité nouvelle ». Il ne reste rien, ou pas grand-chose, de ce rêve prométhéen. Et l’on se permettra un instant de mélancolie pour les idées panafricanistes, passées de mode comme le socialisme scientifique, en croisant la rue Julius-Nyerere et le boulevard Kenneth-Kaunda.

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Mais ne restons pas « tristéperdu » et encore moins « troublhébété ». Partons décortiquer – à mains nues – quelques succulentes gambas chez Carlos, en bord de mer, arrosées d’un petit coup de son vin blanc « énivrillant ». Humer une petite brise venue d’un océan Indien bien plus froid qu’il n’y paraît, du moins pour le pied habitué à la douceur du golfe de Guinée. Les Maputoates – il y a bien les Lisboètes – adorent manger et faire la fête, si possible sur un air de Manu Dibango. Ouverts à toutes les influences, ils raffolent de la musique ouest-africaine. Lorsque Salif Keita est venu se produire au centre culturel franco-mozambicain, un millier de personnes ont été contraintes de se trémousser dehors, faute de place. Le président Chissano lui-même avait téléphoné pour qu’on lui réserve une entrée. En toute simplicité, il a refusé le confortable fauteuil mis à sa disposition pour poser ses fesses, comme tout le monde, sur les bancs en pierre.
Quand on sait que l’Histoire a voulu qu’il demeure aujourd’hui quatre jeunes femmes pour un jeune homme, on se dit que, décidément, le Mozambique est devenu un chouette pays.

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