Information ou intox

Comment, à force de pressions, de manipulations, mais aussi par l’autocensure, le quatrième pouvoir voit sa mission dévoyée.

Publié le 15 mai 2007 Lecture : 2 minutes.

Citoyens, citoyennes, on vous ment, on vous manipule ! On vous fait prendre des vessies pour des lanternes, un licenciement massif pour un « plan social » et la représentation de la réalité pour la vérité. L’élection présidentielle française de 2007 a mis en exergue le rôle de plus en plus décisif que jouent la désinformation et la manipulation pour (dé)faire les opinions publiques. À l’ère d’Internet et de la multiplication des chaînes de télévision satellitaires, bien avisé qui saura distinguer information et intox.
Coups de fil, conseils, pressions, et sans doute aussi une bonne dose d’autocensure planent sur les médias. Parallèlement, diffuser une rumeur ou faire du mensonge une vérité est devenu un véritable métier – qu’exercent conseillers en communication, lobbyistes, cabinets d’influence, experts en relations publiques. Sans crier à la complotite aiguë, c’est ce que révèle Paul Moreira dans son essai intitulé Les Nouvelles Censures, et qui nous conduit, ainsi que l’indique le sous-titre, « dans les coulisses de la manipulation de l’information ».
Journaliste d’investigation dans la presse écrite, à la radio et à la télévision, où il a créé et dirigé sur Canal+ l’émission 90 minutes, l’auteur a été le témoin direct – et parfois la victime – du dévoiement de ce que, dans les démocraties « modernes-et-occidentales », on appelle le quatrième pouvoir. On suit ainsi le grand reporter embedded en Irak, enquêtant chez les Contras au Nicaragua, chez les génocideurs au Timor-Oriental, dans les usines cambodgiennes
Moreira explique ainsi que la désinformation a deux fonctions : diffuser ce qui est faux, mais aussi étouffer la vérité. À cet égard, son livre fourmille d’exemples, dont celui de l’opération Licorne, à Abidjan, en novembre 2004. L’auteur révèle comment la plupart des grands médias [hormis Jeune Afrique, NDLR] firent silence à l’époque sur le massacre par les soldats français de manifestants ivoiriens. Bilan : 57 morts et près de 300 blessés. « Le soir, TF1 ne consacre pas un seul sujet à l’événement et France 2 reste dans le flou : simple échange de tirs. Les jours suivants, silence ! Or les télévisions disposent d’images de la tuerie. [] Une cellule de communication de crise a, en effet, été créée au ministère de la Défense pour étouffer l’affaire. Avec un certain succès. »
Les Nouvelles Censures consacrent également un chapitre à Nicolas Sarkozy, incarnation de l’homme politique qui sait parfaitement utiliser à son profit les enquêtes d’opinion et les études marketing. Car le temps de la censure bête et brutale est révolu. Les communicants l’ont compris qui utilisent des méthodes de plus en plus subtiles. À nous donc, citoyens, de ne jamais baisser la garde.

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