Maroc : que s’est-il vraiment passé à Guerguerate ?
Les forces armées royales ont installé un cordon de sécurité pour mettre un terme au blocage de la zone-tampon par une soixantaine de miliciens du Polisario.
Dans son discours du 3 novembre à l’occasion du 45e anniversaire de la Marche Verte, le roi Mohammed VI avait prévenu : la situation de blocage total qui prévalait depuis le 20 octobre dans la zone-tampon de Guerguerate ne saurait durer sans que le Maroc finisse par prendre ses responsabilités. Il s’agit là d’« agissements inacceptables par lesquels on cherche à entraver la fluidité du trafic entre le Maroc et la Mauritanie », estimait le souverain, lequel se disait « persuadé » – sans manifestement se faire d’illusions – que les Casques bleus de la Minurso « continuaient à remplir leur devoir en veillant à préserver le cessez-le-feu dans la zone ».
Selon nos informations, fin octobre, en réponse à un message du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, qui lui demandait de « laisser un peu de temps » à la Minurso pour régler cette situation, le roi avait exprimé sa compréhension, tout en ajoutant que le Maroc « se réserve le droit de prendre ses responsabilités au moment et de la manière qu’il décidera. »
Évacuation du site
Dix jours plus tard, les forces armées royales sont passées à l’action ce vendredi 13 novembre, aux environs de 8h30, pour nettoyer et sécuriser le no man’s land de 4 kilomètres de long séparant les postes-frontières marocain et mauritanien. La soixantaine de miliciens du Polisario qui avaient installé une vingtaine de tentes et un poste de contrôle, coupant la RN1 et donc toute possibilité de circulation sur l’axe vital qui relie Tanger à Dakar via Nouakchott, se sont rapidement débandés sans résister, après avoir mis le feu à leur campement et évacué le site à bord de camions qui ont pris la direction de l’Est.
Une heure plus tard, l’opération était achevée, comme ont pu le constater les cinq observateurs de la Minurso – un Sud-africain, un Libanais, un Pakistanais et trois Égyptiens – présents sur place. Selon nos sources, aucun autre coup de feu que des tirs de sommation n’aurait été échangé. Peu de temps après, le Front Polisario a tenté de provoquer un accrochage à Mahbès, dans le Nord-Est du Sahara occidental, à quelques encablures de la frontière algérienne, en s’approchant du mur de défense marocain et en déclenchant des tirs, à distance respectable. Les forces marocaines ont riposté, mettant ainsi un terme à l’attaque.
Selon une source proche des services de sécurité marocains, l’opération de dégagement de la zone de Guerguerate, destinée également à empêcher que le Polisario s’implante de façon durable comme il l’avait fait en 2010 à Gdeim Izik, non loin de Laâyoune, se serait déroulée de manière « pacifique, proportionnée et soucieuse de la sécurité des civils ». Au ministère des Affaires étrangères à Rabat, on ajoute que le Maroc « n’a eu d’autre choix que d’assumer ses responsabilités afin de mettre un terme à la situation de blocage et restaurer la libre circulation commerciale. Le Polisario en assume seul l’entière responsabilité et les pleines conséquences ».
Barrages démantelés
Considérée par le Front Polisario comme un « territoire libéré » sous juridiction de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), cette zone-tampon est en réalité sous la responsabilité de l’opération de maintien de la paix de l’ONU, la Minurso, censée garantir la libre circulation sur cet axe routier essentiel pour les échanges commerciaux régionaux. Le Polisario, qui y multiplie les incursions depuis plus de quatre ans malgré les rappels à l’ordre de l’ONU, avait installé un poste fixe et plusieurs barrages. Ils sont désormais démantelés.
C’est la deuxième fois en quatre jours que Mohammed VI fait ainsi preuve de fermeté, mais aussi d’audace calculée. Sur le front sanitaire, en lançant, le 9 novembre, une campagne massive de vaccination contre le Covid-19, et sur le front sécuritaire, en faisant sauter un verrou qui menaçait d’asphyxier les échanges humains et commerciaux entre le Maroc et sa profondeur subsaharienne.
Dans l’esprit du roi, qui en l’occurrence a également agi en sa double qualité de chef d’état-major général et de chef suprême des armées, la solution apportée ce 13 novembre au problème de Guerguerate est « définitive », explique une source proche du Palais, qui ajoute : « Le Polisario ne reviendra plus ici. »
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