Début de la guerre civile au Liban

13 avril 1975

Publié le 14 avril 2008 Lecture : 2 minutes.

Au matin du 13 avril 1975, Pierre Gemayel, un des « pères » de l’indépendance libanaise (1943) et fondateur des Phalanges (les Kataëb) – un mouvement nationaliste chrétien (maronite) entretenant des milices paramilitaires fascisantes – inaugure avec ses partisans une église à Aïn al-Remmaneh, un village majoritairement chrétien de la banlieue de Beyrouth. Non loin de là, des fedayine de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) circulent en Jeep. Un des gardes du corps de Gemayel est abattu. Provocation, manipulation ou attentat ? La riposte des phalangistes, convaincus d’une agression délibérée de l’OLP, ne tarde pas : l’après-midi, ils mitraillent un bus transportant vingt-sept fedayine, les tuant tous. Le carnage met le feu aux poudres : en quelques heures, Beyrouth est à feu et à sang. De violents incidents se produisent à Tripoli, à Saïda, à Zahlé et dans le Hermel. Une des guerres civiles les plus sanglantes du XXe siècle commence : elle durera quinze ans et fera plus de 140 000 victimes.

La tension était déjà montée d’un cran quelques semaines avant le 13 avril. Le 28 février, les pêcheurs de Saïda, au Sud-Liban, manifestent pour exiger la fin du monopole d’une société dont le principal actionnaire n’est autre que l’ex-chef de l’État Camille Chamoun. Le président de la République, Souleymane Frangié, fait intervenir l’armée pour disperser les manifestants, ce qui provoque la fureur de ces derniers. D’autant que, depuis quelques années, les affaires de corruption se multiplient à Beyrouth Dès le lendemain, les Kataëb – qui revendiquent 80 000 membres – organisent dans la capitale une vaste démonstration de soutien à l’armée. Mais celle-ci va bientôt se diviser entre « loyalistes », pour la plupart chrétiens maronites, et partisans de la gauche progressiste emmenés par le druze Kamal Joumblatt, qui fait cause commune avec les 600 000 Palestiniens – dont 40 000 armés – présents sur le sol libanais.
Chassés de Jordanie en 1970 par le roi Hussein (lors du fameux « Septembre noir », qui fit environ 20 000 victimes), mis au pas en Syrie, les réfugiés palestiniens sont de plus en plus nombreux à se rabattre sur le pays du Cèdre. Profitant de la faiblesse de l’armée libanaise, les organisations palestiniennes jouissent d’une grande liberté d’action : par les accords du Caire de 1969, Beyrouth s’était résigné à les autoriser à demeurer à la frontière du Sud-Liban et à y opérer militairement contre Israël, qui, en réponse, multiplie les incursions militaires en territoire libanais. Les Palestiniens transforment leurs camps en forteresses, patrouillent sur les routes et cachent à peine leur désir de voir s’installer à Beyrouth un pouvoir acquis à leur cause.

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L’OLP joue ainsi les apprentis sorciers dans une démocratie libanaise dont l’équilibre précaire n’a été restauré que par miracle après la guerre civile de 1958. Le président élu par le Parlement est traditionnellement maronite, le chef de gouvernement sunnite, et les sièges du Parlement réservés aux 17 confessions reconnues (3 musulmanes et 14 chrétiennes), selon une répartition proportionnelle aussi subtile que discutable puisque le dernier recensement remonte à 1932, et que le nombre de musulmans, en 1975, dépasse largement celui des chrétiens. Enfin, dernière complication – et non des moindres : la ligne de fracture qui divise la société libanaise entre pro- et anti-Syriens. Damas, en effet, n’a jamais vraiment accepté l’indépendance du Liban, une partie de son ancienne province du Levant, en 1920.

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