Courrier des lecteurs

Publié le 14 avril 2008 Lecture : 6 minutes.

Congo : les chiffres de la pauvreté
– Les progrès économiques du Congo décrits par le président Sassou Nguesso (croissance économique estimée à 9 %), dans l’interview qui lui est consacrée (J.A. n° 2463, p. 20-27), ne sont pas en adéquation avec l’indice de « bonheur national brut » (plus proche de 0 % que de 100 %) de la majorité des Congolais.
En effet, au Congo, l’espérance de vie ne cesse de baisser (moins de 49 ans). Il y a de plus en plus de pauvres (plus de 70 % de la population), de jeunes sans emploi ainsi que de jeunes mineurs orphelins et sans domicile fixe qui dorment dans les marchés de Poto-Poto, de Moungali ou d’ailleurs. J’invite François Soudan, qui s’est rendu récemment à Brazzaville, à me contredire.
Finalement, au-delà de la pertinence des questions posées par François Soudan, je ne retiens qu’une seule chose, en plus de la très bonne qualité du cuir lustré des chaussures du chef de l’État congolais : l’harmonie entre la cravate et la pochette de ce dernier.
Patrick Tchicayat, Sevran, France

Réponse : L’humour (grinçant) dont vous faites preuve ne doit pas exclure la vigilance quant aux statistiques que vous apportez à l’appui de votre démonstration. Selon le dernier rapport (2007) du Pnud, en effet, l’espérance de vie au Congo-Brazzaville est de 53 ans, en légère augmentation par rapport aux années précédentes (52 ans en 2003, 51 ans en 1997). Quant au pourcentage de pauvres, si l’on prend comme critère celui de la Banque mondiale (moins de 1 dollar par jour), vos 70 % placeraient le Congo quatre points au-dessus de la Centrafrique, neuf points au-dessus du Niger, vingt-cinq points au-dessus du Burkina et cinquante points au-dessus du Cameroun, ce qui est tout simplement irréaliste. En vérité, aucun chiffre fiable n’est en ce moment disponible en ce qui concerne le Congo, si ce n’est l’évaluation, fournie par la Banque mondiale, du pourcentage de la population en situation d’insuffisance alimentaire : 33 % contre 59 % en 1995. C’est encore beaucoup trop, certes. Mais point n’est besoin de forcer la dose.
F.S.

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Pompe à illusion ?
– Grâce à la Chine, l’Inde et d’autres pays émergents qui investissent désormais à coups de milliards de dollars (dévalués) en Afrique, B.B.Y. pense que « la pompe est amorcée » : c’est le titre de son « Ce que je crois », daté du 15 mars (J.A. n° 2462). Franchement, je suis étonné par l’ampleur de son optimisme. Et cela pour plusieurs raisons.
1) Le retour de l’inflation : 6,9 % en Afrique ?aujourd’hui, contre 3,3 % hier, pour une croissance moyenne qui se maintient à 5,4 %.
2) La démographie galopante : 760 millions de Subsahariens dont l’âge moyen est le plus bas au monde, et 2 milliards demain ! B.B.Y. semble dire que 760 millions d’individus – 12 % de la population mondiale – c’est peu. La faute, selon lui, à deux chocs majeurs à partir du XVIe siècle : l’esclavage et la colonisation. Que fait-on alors des quatorze siècles de traite négrière arabe ? Quoi qu’il en soit, une chose est sûre : l’explosion démographique détruit mécaniquement la croissance.
3) La corruption endémique : la croissance de l’Afrique, notamment pétrolière, profite-t-elle réellement aux populations africaines ou juste à un petit nombre de corrompus ?
Jean Leclerc, Banfora, Burkina Faso

Réponse : Vos objections sont fondées, mais mon texte, volontairement optimiste, est lui-même fondé sur des faits indiscutables : imaginez la situation actuelle du continent africain sans l’intérêt nouveau que lui manifestent depuis deux décennies la Chine et l’Inde ?
La démographie des pays subsahariens est certes galopante et sa croissance est trop forte. J’ai cité les chiffres sans en tirer de conclusion. Mais je préfère encore la croissance démographique à la régression que connaissent l’Italie, l’Allemagne ou le Japon.
B.B.Y.

« Arrêt sur image » désopilant
– J.A. serait-il devenu un journal humoristique ? À voir l’« Arrêt sur image » du numéro double (n° 2464-2465, p. 25), intitulé « La reine Carla », il est possible d’y croire ! Entre le chapeau de « Sa Majesté » et l’attitude « Pieds nickelés » du monsieur qui a été élu président de la République française, il y a beaucoup de questions à se poser ! J’ai 57 ans et je n’ai que très rarement vu une image aussi comique des grands de ce monde J’ai l’impression de voir un extrait d’une pièce de Feydeau !
Christian Boiron

Laïcité rime avec liberté
– Je ne pense pas que critiquer l’islam soit la meilleure façon de promouvoir la laïcité. Du haut de mes 20 ans, au sein d’une jeunesse algérienne tourmentée par les questions identitaires – et surtout celles ayant trait à la religiosité -, je suis pour la laïcité depuis déjà quelques années. Naïvement, j’en ai parlé à mes camarades étudiants, et cela m’a valu l’étiquette d’athée (alors que je suis musulman). J’ai même été montré du doigt par les étudiants qui font la grève du rasoir. La laïcité, selon moi, c’est la liberté individuelle de la pratique de la religion. Donc, le fait de s’indigner qu’en Tunisie une enseignante parvienne à travailler en portant le voile ne joue pas en faveur de la laïcité (voir « Pourquoi les laïcs ont peur », J.A. n° 2456, p. 42-45). D’autre part, je ne partage pas l’opinion d’Abdeljelil Boughattas (Vous & Nous du J.A. n° 2459, p. 104) selon laquelle « la Tunisie est laïque ». Je dirais plutôt que c’est le pays arabe le plus laïque. Et mon Algérie est loin, très loin derrière. Pour preuve : on y confond laïcité et athéisme.
Derguini Mohamed El Hadi, Oum Theboul, Algérie

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Une « méga interview » !
– Dans le numéro double de J.A. (n° 2464-2465), ce n’est plus une « Grande interview », c’est une « Méga interview » ! Vincent Bolloré sur vingt pages, pratiquement sans publicité : je me suis dit que c’était un publireportage. À tort. Mais ça y ressemble fort, tant le côté complaisant de Bolloré apparaît sur les photos et me choque. Lecteur de J.A. depuis 1999, c’est la première fois que je vois ça. Même aucun chef d’État africain, dans mon souvenir, n’a bénéficié d’autant d’égards. Comme on dit dans votre jargon journalistique, vous lui avez « servi la soupe ».
Robert Delanoy, Séné, France

Réponse : Nous nous sommes déjà expliqués, dans l’édito du même numéro double, sur la longueur – effectivement peu ordinaire – de cette interview, ainsi que sur l’opportunité de sa parution. Je n’y reviendrai donc pas. Par contre, je ne saurais vous laisser dire sans réagir que J.A. aurait « servi la soupe » à Vincent Bolloré. Toutes les bonnes questions lui ont été posées. Le fait qu’il y ait répondu à sa manière, habile et pas toujours convaincante à vos yeux, n’a rien à voir avec une prétendue complaisance.F.S.

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De l’injustice au Tibet ou en Palestine
– Je souhaiterais que le prochain éditorial de Béchir Ben Yahmed soit consacré à une analyse de la situation en Palestine. Le monde des grandes puissances est vraiment injuste : il encourage et nourrit le terrorisme né de l’indignation et de la révolte. Lesquelles sont compréhensibles, surtout quand on voit à longueur de journée des femmes et des enfants périr à cause d’une des plus puissantes armées du monde (l’armée d’Israël), alors que ces personnes ne demandent que le droit de vivre normalement. Pourtant, quand la Chine tue quelques Tibétains, tout le monde se lève pour dire que c’est insupportable. Sommes-nous vraiment égaux ? Je me le demande.
Hassan Ouattara

Mes professeurs sont jaloux
– Je vous remercie pour votre magnifique boulot qui consiste à nous faire parvenir des informations des coins les plus chauds de la planète et de nous communiquer votre savoir sur les hommes d’État qui nous dirigent.
Je vous lis régulièrement depuis l’âge de 12 ans (aujourd’hui j’en ai 15) et je peux vous dire que ma culture socio-politique s’est accrue ainsi que mon sens de la réflexion, même si mes professeurs pensent le contraire : c’est juste parce qu’ils sont jaloux. Ils ont trop peur de penser (politique) et préfèrent lire les tabloïds.
Mes salutations les plus distinguées et les plus chaleureuses !
Mahmoud Henia, 15 ans, École internationale de Tunis

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