Walker a (enfin) tué Herbert

Publié le 16 avril 2003 Lecture : 3 minutes.

Le président George Walker Bush a décidé d’abattre le régime de Saddam Hussein, a-t-il dit, parce que ses armes de destruction massive représentaient une menace pour les États-Unis et pour le monde, et parce qu’il était le complice d’el-Qaïda. Au vingt-troisième jour de guerre, les forces de la coalition n’avaient toujours pas trouvé d’armes de destruction massive en Irak, ni prouvé l’existence de liens avec el-Qaïda. Alors, pourquoi cette guerre ?
Des observateurs ont dit : Bush II, le fils, a voulu terminer le travail que Bush I, son père, avait laissé inachevé en 1991. Cela fleure la psychanalyse. Le quotidien libanais L’Orient-Le Jour a été jusqu’au bout. Il a demandé à l’un des trois fondateurs de la Société libanaise de psychanalyse, Adnane Hobballah, de « jouer l’inspecteur Colombo des âmes, de démêler la signification inconsciente des conduites » de Bush II et de Saddam. Extraits.
Pour Bush, arrivé au pouvoir avec un héritage paternel clair, il y a la rivalité – consciente ou inconsciente – avec le père. Chaque enfant est amené à dépasser le père et à commettre « un meurtre symbolique »… Bush fils est « convaincu à 100 % qu’il doit mener au bout ce que le père n’a pas voulu ou pas pu faire en 1991 : aller aux portes de Bagdad ». Nous sommes en plein OEdipe. George W. est un enfant, « un vrai enfant », et le regard du père sur le fils est tel que le rapport qui s’est instauré entre eux est un rapport de « supériorité ». « Le fils est réellement subordonné, souligne Hobballah. Et il veut sortir de cette tutelle. Il ne peut le faire qu’en dépassant, qu’en faisant mieux que le père. » Dans ce scénario où se débat Bush, Saddam Hussein est « l’image inversée du père, l’image détestée ». L’image inversée du père ne devrait-elle pas être au contraire l’image chérie ? Hobballah rappelle que le sentiment de tout un chacun envers le père est foncièrement ambivalent, une valse entre amour et haine. « Et cette haine a besoin d’une représentation extérieure, d’un transfert, pour qu’elle se déverse. Saddam Hussein est le double du père adoré. Il a empêché ce père d’accomplir son projet [d’envahir l’Irak]. »
Sauf que George W. Bush a une autre ambition, ajoute Hobballah : « Il était alcoolique jusqu’à l’âge de 40 ans, et il s’en est sorti, a-t-il dit, grâce à sa femme et grâce à Dieu. Et pour rester dans l’abstinence, dans la sobriété, il a besoin de la protection divine. » D’autant plus que pour lui, s’il a réussi à se débarrasser de ses démons éthyliques, c’est qu’il a reçu un don divin. Dieu lui a confié une tâche. Dans sa tête, « il est l’élu, celui qui a été choisi pour accomplir une mission. Il est devenu ultracroyant, il prie plusieurs fois par jour, il le dit lui-même : son seul conseil spirituel, c’est de la lecture de la Bible qu’il le tire ». Dans sa conquête de l’Irak, Bush a une vision de missionnaire. Et, comme les religieux, il divise le monde en deux : « le Bien est en lui, le Mal est à l’extérieur ».
Il est plus difficile d’appliquer à Saddam Hussein le schéma oedipien. Adnane Hobballah rappelle cependant cet « axiome psychanalytique » que corrobore son comportement de ces dernières années et tout particulièrement de ces dernières semaines : « Dans son enfance, Saddam a été maltraité… C’est son oncle maternel Khairallah qui l’a élevé, son père est parti lorsque Saddam avait 5 ans. Et lorsqu’il n’y a plus de médiation du père avec le monde extérieur, on se détache du monde extérieur. » Et comme on l’a vu le 9 avril, la gigantesque statue de la place Firdaous est jetée à bas.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires