Laboratoire du développement

Coordonné par Viviane Wade, l’épouse du président, un projet expérimental allie notamment action sanitaire et préservation de l’environnement.

Publié le 16 avril 2003 Lecture : 4 minutes.

Si un projet de développement fonctionne dans une zone défavorisée, il peut réussir dans d’autres régions. C’est en partant de ce principe que la Force d’intervention sanitaire et satellitaire autoportée (Fissa), l’association Éducation-Santé, présidée par l’épouse du chef de l’État sénégalais Viviane Wade, la Fondation Nicolas-Hulot pour la nature et l’homme (FNH) et Électricité de France (EDF) ont uni leurs compétences pour lancer une action dans le département de Kédougou (région de Tambacounda), au sud-est du Sénégal. « Cette zone pilote, qui regroupe quelque 200 000 habitants, a été choisie pour son enclavement », explique Ghislaine Alajouanine, présidente de la Fissa et conseillère spéciale du président Wade pour le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad). L’endroit connaît le taux de scolarisation le plus faible du pays – seulement 30 % des filles vont à l’école -, et l’économie est essentiellement fondée sur l’agriculture et l’élevage. La particularité du projet, coordonné par Viviane Wade, est de réunir dans une même zone les priorités du Nepad pour le Sénégal – action sanitaire, nouvelles technologies, environnement et énergie – avec des partenaires qui ont déjà développé avec succès des actions dans la sous-région.
Dans le domaine de la santé et des nouvelles technologies, des expériences de télémédecine ont déjà été réalisées, entre janvier et juin 2002, par la Fissa et l’association Éducation-Santé. Une station portable a permis de transmettre, via un satellite, plus de cent échographies en direct du département de Kédougou à des médecins de Dakar. « Les hommes présents ont réalisé que des enfants étaient bien vivants dans le ventre de leur mère. Des années de travail récompensées… », s’était félicitée Viviane Wade. Grâce à cette première tentative réussie, le programme devrait être élargi à toute la zone pilote. Quatre véhicules ambulances 4×4 (appelés galavans), munis de stations portables satellitaires, d’équipements de soins et de médicaments, sillonneront les régions frontalières du Mali et de la Guinée d’ici à la fin 2003. Un hôpital de brousse, situé dans le village sénégalais de Ninefetcha, et une école élémentaire rurale compléteront ce dispositif.
Expérience réussie aussi pour les actions environnementales confiées à la Fondation Nicolas-Hulot pour la nature et l’homme. Au Sénégal, cinq sites sont déjà classés « aires de patrimoine communautaire » (APC). Plusieurs autres pays d’Afrique (Guinée, Côte d’Ivoire, Mali, Niger, Tchad et Togo) en ont accepté le principe, qui sera discuté en septembre prochain, à Durban (Afrique du Sud), lors du Congrès mondial sur les parcs naturels. Le but des APC est d’inciter les populations locales à gérer elles-mêmes leurs espaces protégés. Les communautés ne sont pas seulement associées au projet, mais pleinement actrices puisqu’elles proposent et choisissent elles-mêmes les sites à classer. Au Sénégal, la chute d’eau de Dindéfélo, un lieu sacré à la frontière guinéenne, possède un grand intérêt botanique et ornithologique. Elle est en cours de classement APC. « Sur ce site, les enfants du village deviennent de véritables guides pour les touristes. La vocation des APC est donc moins de sauvegarder un site remarquable, un écosystème ou des espèces menacées, que d’entraîner les populations dans une démarche de développement économique, compatible avec la conservation de leurs ressources », précise Jean Larivière, le « monsieur Afrique » de la fondation. Qui ajoute : « On ne peut demander aux populations de gérer un site sans contrepartie économique. » D’où la présence d’un volet énergie, développé par Électricité de France (EDF), l’acteur privé du projet. Il vise à installer des petits moteurs Diesel ou électriques, permettant de faire tourner des moulins à grains, des postes à soudure ou des chargeurs de batterie. Cinq plates-formes, d’une valeur d’environ 5 000 euros pièce, sont déjà en place dans le département de Kédougou. Au Mali, quatre cents « ateliers énergie » ont été implantés en zone rurale depuis 1995, grâce au programme Access (Accession à l’électricité et aux services) d’EDF. « Le principe de ces ateliers s’inscrit dans un projet plus large lancé avec le Programme des Nations unies pour le développment, à Johannesburg, et destiné à toucher douze pays d’Afrique de l’Ouest », explique Vincent Denby Wilkes, directeur d’Access chez EDF.
Le Mali a été le premier pays à profiter de ce programme, le Sénégal, le second ; le Burkina, le Ghana et le Bénin seront les prochains sur la liste. Enda (Environnement et développement du Tiers Monde), une ONG internationale établie à Dakar spécialisée dans les questions d’environnement et d’énergie, mesurera l’impact de ces actions sur la santé, les conditions de vie des femmes, la scolarisation, le taux d’exode rural et l’environnement. S’il réussit, le projet développé dans la zone pilote sénégalaise pourrait servir d’exemple à d’autres, sur l’ensemble du continent.

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