Ben Laden peut se frotter les mains

Publié le 16 avril 2003 Lecture : 2 minutes.

Bagdad est tombé, mais Britanniques comme Américains risquent d’oublier une guerre plus importante qu’ils doivent mener avec des armes très différentes : la guerre contre le terrorisme international, pour laquelle il faut l’appui des Arabes et des musulmans modérés aux quatre coins du monde.
Il faut qu’ils donnent aux Irakiens – et aux Arabes des pays voisins – l’espoir d’un avenir pacifique et prospère, pour les empêcher de rejoindre les rangs beaucoup plus dangereux des terroristes qui peuvent s’en prendre à la vie des Britanniques et des Américains, pas seulement sur les champs de bataille d’Irak, mais aussi chez eux.
Beaucoup de commentateurs britanniques estiment aujourd’hui que des Arabes des pays voisins pourraient être encouragés à rejoindre el-Qaïda dans sa croisade contre l’Occident. Les liens entre Saddam et le réseau terroriste n’ont pas été prouvés avant la guerre, mais ils pourraient devenir une réalité si les musulmans partagaient, en Irak et hors d’Irak, le même sentiment d’injustice et de persécution.
George W. Bush a affirmé qu’il chasserait Saddam Hussein du pouvoir. C’est chose faite. Mais Washington paraît perdre de vue la justification première de la guerre.
La première raison de l’invasion de l’Irak, telle qu’elle était présentée par Washington, était la défaite du terrorisme international. Mais les forces de la coalition sont toujours très loin d’avoir conquis le coeur et l’esprit du peuple qu’ils prétendent libérer. Et les souffrances des civils irakiens, répercutées et magnifiées dans tout le monde islamique, mobilisent partout davantage les terroristes antioccidentaux. Toutes les interventions des porte-parole britanniques en Irak ont montré un souci évident de la situation des civils irakiens, mais ils s’inquiètent de la dureté dont font preuve les Américains. Lorsque des soldats américains ont tué des femmes et des enfants irakiens à un poste de contrôle, un porte-parole britannique a admis que c’était « mauvais pour la confiance entre les forces de la coalition et les civils ».
Les véritables épreuves sont encore à venir pour l’alliance anglo-américaine. Les forces de la coalition risquent d’avoir du mal à se persuader que leur mission était de « libérer l’Irak ». Et la divergence sera encore plus marquée entre la politique étrangère américaine et la politique étrangère britannique, lorsque Washington imposera son propre pouvoir militaire sur l’Irak, au lieu d’une supervision des Nations unies, et accordera la préférence aux entreprises américaines pour la reconstruction – et que les Britanniques, qui souhaitent freiner la colonisation israélienne et relancer le processus de paix, verront leurs espoirs déçus.
Les Britanniques auront peut-être contribué à gagner la guerre contre Saddam, mais ils risquent de s’apercevoir qu’ils ont perdu la guerre contre le terrorisme. Et ils se demanderont ce qu’ils sont allés faire dans cette galère irakienne.

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