Le « New York Times » plaide pour l’Afrique

Huit millions d’êtres humains meurent chaque année de pauvreté. Certains Américains commencent à en prendre conscience.

Publié le 16 mars 2005 Lecture : 3 minutes.

Jeffrey Sachs sera-t-il prophète en son pays ? L’hebdomadaire Time (diffusion : 5,4 millions d’exemplaires) fait la une de son numéro daté du 14 mars sur The End of Poverty (« La fin de la pauvreté »), le dernier livre du défenseur de « l’économie clinique », conseiller spécial du secrétaire général de l’ONU, directeur du Projet du millénaire sur le développement. Sous-titre : « Huit millions d’êtres humains meurent chaque année parce qu’ils sont trop pauvres pour survivre. Un plan pour les sauver. » À l’intérieur : seize pages de texte tiré du livre, plus une interview du chancelier de l’Échiquier britannique, Gordon Brown, sur son « plan Marshall pour l’Afrique » et quatre pages sur « les promesses à tenir ».
Quelques jours auparavant, le New York Times avait repris à son compte les thèses de Jeffrey Sachs, le citant nommément, et s’était porté au secours de l’Afrique. Le quotidien écrivait : « Quand une fois par siècle, une catastrophe naturelle fait plus de 100 000 morts dans des pays pauvres d’Asie, comme en décembre dernier, les pays développés y vont d’une larme et ouvrent leur portefeuille. Mais quand il s’agit de l’Afrique, où des centaines de milliers de pauvres, hommes, femmes et enfants, meurent pour rien chaque année de maladies que l’on pourrait prévenir, ou de catastrophes d’origine humaine comme des guerres civiles, la plupart des pays développés restent de marbre.
« Tous les États africains ne sont pas défaillants. La plupart tiennent bon. Mais les pays qui connaissent des troubles sérieux – comme la Somalie et le Soudan à l’est, la République démocratique du Congo au centre, le Zimbabwe au sud, la Côte d’Ivoire, le Liberia et la Sierra Leone à l’ouest – mettent en péril non seulement les droits de l’homme, mais aussi la sécurité du monde. Le mélange explosif de dirigeants corrompus ou sans foi ni loi, de frontières poreuses et non surveillées, et d’une jeunesse sans racines et sans espoir a fait de certains d’entre eux des foyers de terrorisme ou de maladies épidémiques comme le sida. D’autres sont des refuges pour des truands et des trafiquants de drogue, avec des victimes dans le monde entier.
« Dans bon nombre de ces pays, la pauvreté, le chômage et le désespoir qu’ils engendrent font de ces jeunes gens des proies toutes trouvées pour les organisations terroristes, qui, outre deux repas par jour, proposent aussi une cible à leur haine contre les sociétés riches, en leur faisant croire que les nantis les méprisent et les tiennent pour quantité négligeable. »
« L’Amérique s’est engagée à faire campagne contre le terrorisme, au sens militaire, mais aussi à faire campagne contre la pauvreté, contre l’analphabétisme et l’ignorance », disait l’ex- secrétaire d’État Colin Powell. En effet, constate le New York Times, l’Amérique a bien déclaré la guerre au terrorisme après le 11 Septembre, mais elle ne s’est guère préoccupée des causes profondes de l’instabilité mondiale. Et le quotidien rappelle que si le budget de la Défense des États-Unis s’élève à plus de 400 milliards de dollars et s’ils dépensent 100 autres milliards de dollars en Irak et en Afghanistan, ils ne donnent que 16 milliards de dollars pour l’aide étrangère. Les États-Unis, comme la Grande-Bretagne et la France, s’étaient engagés à consacrer 0,7 % de leur Produit national brut à l’aide aux pays pauvres. La France y consacre 0,41 %, la Grande-Bretagne 0,34 % et les États-Unis… 0,18 %.
Le sommet du G8 qui doit avoir lieu à Gleneagles, en Écosse, en juillet, dit le NYT, pourrait être une bonne occasion pour le président George Bush de soutenir le « plan Marshall pour l’Afrique » des Britanniques. De même, l’Assemblée générale de l’ONU qui se réunira en septembre devrait permettre de voir où en sont ces Objectifs du millénaire pour le développement qui devaient réduire la pauvreté de moitié en 2015.
« Des milliers d’Africains meurent chaque jour du sida, de la tuberculose et du paludisme, conclut le New York Times. Il y a un siècle, avant qu’existent les remèdes, on ne pouvait rien faire. Mais nous sommes la première génération qui a les moyens d’en finir avec la pauvreté et les maladies qu’elle engendre. Pourquoi les victimes du tsunami en Asie du Sud-Est mériteraient-elles davantage notre aide que les victimes du paludisme en Afrique ? »

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