Faut-il suivre l’exemple nigérian ?
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« Fuyez l’assistance et les subventions, réalisez vos films en vidéo pour les gens de votre quartier, renforcez le marché du VCD (DVD bas de gamme et économique) et vous irez peut-être quelque part, comme nous. » Ces mots du producteur nigérian Balungun, dit Mohammed Ali, ont enflammé les Troisièmes Rencontres cinématographiques de Bamako, organisées par l’Ucecao, une association animée par le cinéaste malien Souleymane Cissé, et qui se tenaient juste avant la grande fête du Fespaco.
Première réaction, purement économique, d’une partie de l’assistance : le système nigérian, pantagruélique manne à dollars, est-il exportable en Afrique francophone ? Pas sûr quand on sait que ce système repose sur un public potentiel sans équivalent (120 millions d’habitants) et sur un vaste réseau de 70 chaînes de télévision qui garantissent achat, promotion et diffusion des centaines de films vidéo produits à la va-vite chaque année.
La seconde réaction, signée Mahammat Saleh Haroun, ramena la discussion sur un terrain plus artistique. Chauffé à blanc, le réalisateur du beau Abouna (sélectionné à Cannes en 2003) sort de ses gonds pour électriser une assemblée jusque-là bien tranquille : « Cette belle leçon de libéralisme ne répond pas à ma vision du cinéma et ne me fait pas rêver ; nous parlons ici du problème de l’invisibilité des films africains, et l’exemple nigérian ne répond absolument pas à cette question : qui peut me citer un film nigérian dont nous ayons entendu parler ces dernières années ? »
Entre ces deux pôles, pragmatisme insolent de Balungun et idéalisme de Haroun, le courant n’est pas passé. Qu’importe : cette opposition des extrêmes, vidéo populaire rentable contre cinéma d’auteur de qualité difficile à financer et à distribuer, pose l’une des questions essentielles pour l’avenir du cinéma subsaharien.
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