Comment maîtriser votre facture

Véritable phénomène de société, le téléphone mobile a conquis l’Afrique. Comment s’enétonner ? Pratique, léger, il tient dans la poche et permet de communiquer à des tarifstrès attractifs, qui ne cessent de baisser Mais pour s’y reconnaître dans le m

Publié le 14 février 2005 Lecture : 8 minutes.

« Plus vous téléphonez, moins vous payez. » Dicton commercial à la mode : avec « Les prix baissent », il est l’une des phrases prometteuses le plus souvent inscrites sur les brochures tarifaires des opérateurs de téléphonie mobile, en Afrique et ailleurs. Les slogans accrocheurs sont légion et, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce n’est pas seulement de la publicité : ils se traduisent réellement par des offres spéciales. Comme le forfait « 30 minutes » de l’opérateur marocain Méditel, proposé à 125 dirhams (11,30 euros). Son concurrent Maroc Télécom ne fait pas mieux. Autre exemple, la carte Hello de Sentel, au Sénégal. À 1 000 F CFA (1,50 euro), elle permet de recharger un téléphone en minutes de communication pour deux fois et demie moins d’argent que la « premier prix » du concurrent Alizé, le service mobile de Sonatel.
Tous les opérateurs se livrent une guerre commerciale sans merci, et celle-ci aboutit à de véritables baisses de tarifs. Dernier en date, Algérie Télécom. Le 29 janvier, il a singulièrement diminué le prix de son service Mobilis. L’achat de la carte ne coûte plus que 1 400 dinars (15 euros), contre 2 800 dinars auparavant, et le crédit de communication, multiplié par deux, atteint désormais 1 000 dinars. Il est vrai que l’opérateur historique à fort à faire s’il veut tenir tête à ses deux concurrents du secteur privé, Orascom Télécom, le plus ancien sur le marché, et Wataniya Télécom, eux-mêmes partis à la conquête de nouveaux clients avec des arguments massues. À force de casser les prix, ils finiront par payer les gens pour les obliger à téléphoner ! La réalité est fort différente – qui en doutait ? Que l’on se rassure, aucun des trois, ni même des quatorze opérateurs que nous avons étudiés dans six pays africains (voir tableaux), n’en est de sa poche. S’ils rivalisent d’inventivité pour mieux servir les utilisateurs actuels de leurs services et en gagner de nouveaux, le résultat est surtout une offre commerciale multiforme et complexe, qui comporte quelques pièges que tout consommateur avisé se doit de connaître. Voici les principaux repères, bases de vocabulaire comprises, pour s’y retrouver.

1. La carte : durée limitée
Le téléphone mobile doit son démarrage fulgurant en Afrique à la formule dite prépayée, aussi nommée prepaid par ceux qui préfèrent les anglicismes. Le premier achat, souvent appelé « kit », comprend un certain crédit de communication et une puce électronique, la fameuse carte SIM. C’est elle qui, une fois installée dans le téléphone, figure la ligne téléphonique de l’utilisateur. Quand le premier crédit est épuisé, il suffit de racheter des minutes de communication pour conserver le même numéro. Chaque opérateur en propose à divers prix, le plus souvent sous forme de cartes : vendue 1 000 centimes, par exemple, elle comporterait 1 000 minutes de communication à 1 centime l’une (lire aussi le paragraphe n° 3). Il suffit de composer le code qui y est imprimé pour « recharger » son mobile, suivant l’expression la plus courante. Si l’opération est effectuée dans les règles, votre numéro reste le même, y compris après l’épuisement de votre crédit.
Attention à la date de validité. La carte en comporte même deux ! Le crédit de communication doit être utilisé dans un certain laps de temps, faute de quoi il est perdu à jamais. Et, après avoir consommé vos minutes, vous pourrez conserver le même numéro de téléphone pendant une durée limitée : si vous la dépassez, vous devrez repartir de zéro, c’est-à-dire procéder à l’achat d’un nouveau kit. Dans tous les cas, il faut bien se renseigner avant d’acheter une carte « premier prix ». Tout le monde veut débourser moins d’argent d’un coup. Mais, au bout du compte, cela peut revenir plus cher. Un exemple parmi tant d’autres. Vendue 1 000 F CFA, la moins chère des cartes Hello, de Sentel au Sénégal, doit être utilisée et rechargée dans les dix jours, pas plus. La carte à 2 000 F CFA offre à peine mieux, tandis que la carte à 5 000 F CFA offre deux mois de consommation et encore deux mois de validité sans consommer. Le calcul est vite fait : mieux vaut payer une fois 5 000 F CFA que cinq fois mille.

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2. Comparer les forfaits
Une fois le consommateur séduit grâce à l’offre prépayée, l’opérateur souhaite le fidéliser – c’est une démarche commerciale naturelle. Là intervient le système dit du post-payé : chaque mois, le client est facturé du total des communications qu’il a effectuées, auquel s’ajoute le montant de l’abonnement. Le forfait, qui n’existe pas encore dans tous les pays, est une forme plus évoluée, parfois très séduisante. Exemple avec Orange5, proposé au Cameroun par l’opérateur du même nom : il coûte 5 000 F CFA par mois, un des prix les plus bas de notre étude (voir pp. 54 et 55), somme dont sont ensuite décomptées les communications, en fonction de leur durée, mesurée en minutes.
Combien coûte la minute ? Là est toute la question et elle se pose tant pour les abonnements et les forfaits que pour les cartes de rechargement. Chaque opérateur a ses astuces et fait varier le prix de la minute suivant divers paramètres. Elle est moins chère si vous téléphonez le soir ou le week-end, parfois la nuit, ainsi que si vous appelez des utilisateurs d’un même opérateur. Des combinaisons supplémentaires font encore baisser le coût : ainsi, vous pouvez prédéfinir les numéros que vous appelez souvent. Tous les opérateurs jouent la transparence et indiquent clairement leurs tarifs sur leurs sites Internet et dans leurs feuillets commerciaux. Il est donc assez simple, et recommandé, de se livrer à un petit comparatif personnel avant de se décider. Et découvrir, le plus souvent, que le moins cher n’est pas toujours le plus intéressant.

3. Chronomètre en main
Voici un petit exercice, assez simple. Tous les téléphones mobiles sont capables d’indiquer la durée d’une communication téléphonique. Après avoir programmé cette fonction et à l’occasion d’un message laissé à un correspondant absent, vous réaliserez que l’appel a pris, en tout et pour tout, une vingtaine de secondes. Pourtant, cette communication vous sera facturée une minute, car « la première minute est indivisible ». Inutile d’y voir une quelconque escroquerie : à de très rares exceptions près, tous les opérateurs de téléphonie mobile dans le monde appliquent cette formule magique… Si le cas se présente, il faudra se précipiter chez l’opérateur qui osera découper en tranches cette fameuse première minute… Comme le fait Orascom Télécom en Algérie. Plus généralement, il convient d’examiner ce qui se passe après, la formule « facturation à la seconde » étant sans doute la plus confortable. Tout en se rappelant que la mettre en avant sur un dépliant publicitaire tient de la poudre aux yeux lorsque la première minute est pleine et entière.

4. Réseau, couverture et qualité
Le téléphone mobile est un outil fantastique, mais perfectible. Si un trop grand nombre d’utilisateurs appellent au même moment, certaines communications n’aboutissent pas. Hors d’une zone urbaine, ou dans une pièce sans fenêtre, la conversation est parfois hachée, voire impossible. Des considérations techniques et financières sont en cause. Pendant la communication, le signal transite par une ou plusieurs bornes radio, suivant que l’on se déplace ou non. Quand l’opérateur n’a pas installé suffisamment de ces émetteurs-récepteurs par rapport au nombre d’utilisateurs et à leur répartition géographique, il arrive que les liaisons soient saturées ou deviennent impossibles, en raison de la trop grande distance qui sépare le téléphone de la borne. Évidemment, ces équipements ont un coût, et les fournisseurs de services ne les installent que progressivement, au fur et à mesure que grandit leur clientèle. Pour mieux la satisfaire, conquérir de nouveaux clients et installer encore des antennes.
Pour peu que l’on souhaite être joignable en toutes circonstances, la population ou la surface du territoire desservie par l’opérateur constitue un critère de choix important. En théorie, l’opérateur qui offre la meilleure couverture est celui qui dispose du plus grand nombre d’abonnés dans le pays. Cela étant, avant de se lancer, ses concurrents étudient de près les installations du numéro un ! Techniquement, il suffit parfois de placer un peu mieux une antenne pour améliorer grandement son efficacité. Commercialement, les nouveaux venus savent en outre très bien compenser les éventuelles faiblesses de leur réseau par une plus grande agressivité sur les prix. Au consommateur, et à son porte-monnaie, de décider !

5. Gratuit, à certaines conditions
Particulièrement à la mode en ce moment, les minutes ou les heures gratuites. Elles ont notamment fait le succès immédiat de Wataniya Télécom quand il a lancé Nedjma en Algérie. Djezzy, d’Orascom Télécom, n’a pas été long à se ressaisir ! Ces propositions sont certes avantageuses, mais comportent un revers : bien souvent, vous ne pouvez appeler que ceux qui dépendent du même opérateur que vous, et parfois aux heures de tarif réduit (soir et week-end par exemple). Les sociétés de télécommunications du Maghreb incluent également dans leurs offres promotionnelles des messages textes (SMS), et même des messages multimédias (MMS) gratuits.

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6. Ces petits détails qui font la différence
Les opérateurs de téléphonie mobile que nous avons étudiés font tous, sans exception, preuve d’une réelle inventivité pour se distinguer de leurs concurrents. Certaines facilités de messagerie méritent d’être citées pour leur utilité, comme le fax sur le portable, que proposent notamment Sentel au Sénégal et Telmob au Burkina. La palme de l’originalité peut être décernée à Me To You, avec le système de transfert de crédit conçu par MTN Cameroun : celui qui ne consomme pas l’intégralité des minutes de communication de son forfait peut transférer le reliquat à un ami. Trop souvent, ce crédit est perdu à jamais, sauf quand l’opérateur permet de le reporter sur le mois suivant, ce qui se pratique en Algérie, au Maroc et en Tunisie. Dans un registre différent, le bonus Mango de Telecel, au Burkina Faso, est une carte de rechargement assortie d’une loterie où l’on peut gagner gros. Une case à gratter permet de découvrir des minutes gratuites ou l’une des lettres du mot Mango. Réunir les cinq lettres – sachant que le O est le plus rare – permet de participer à différents tirages au sort dont le prochain, organisé à l’échelon national, se tient dans un mois. Le lot le plus important est une Renault Mégane. Voilà peut-être la solution pour qui répugne à étudier de près des offres toutes plus séduisantes les unes que les autres… Pourquoi ne pas succomber à un coup de coeur ?

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