Hedi Djilani, l’inamovible

Patron des patrons depuis 1988, il sera reconduit dans ses fonctions à l’issue du prochain congrès de son organisation, à la fin du mois.

Publié le 13 novembre 2006 Lecture : 3 minutes.

Hedi Djilani (58 ans), le patron des patrons tunisiens depuis 1988, devrait se faire réélire pour un nouveau mandat lors du congrès de l’Union tunisienne de l’industrie et du commerce (Utica), les 20 et 21 novembre à Tunis. Ces assises ne seront cependant pas tout à fait comme les autres : pour la première fois, Djilani y conduira sa propre liste pour l’élection des membres du bureau exécutif (dont il a réduit le nombre de 33 à 18). Cette instance sera ensuite chargée de désigner le nouveau président. « Je me présente avec une équipe, je veux choisir ceux avec qui je vais travailler », explique-t-il.
Au cours de l’été dernier, il n’était apparemment pas aussi sûr de lui et se demandait ouvertement s’il était encore « l’homme de la situation ». Depuis l’audience qu’il a eue, le 25 septembre, avec le président Zine el-Abidine Ben Ali pour évoquer les préparatifs du congrès, il répond par l’affirmative. Député et membre du comité central du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), le parti au pouvoir, Djilani ne cache point qu’il est en mission à la tête de l’organisation patronale, dont, reconnaît-il, la plupart des dirigeants appartiennent eux aussi au RCD. Ceux qui seraient tentés de faire de la « politique » en dehors de ce cadre ont sans doute du souci à se faire
C’est le cas de Moncef Khemakhem, le patron de l’Union régionale de Sfax, la deuxième ville du pays, dont les ambitions nationales ont été brisées net. Avec son franc-parler habituel, Djilani reproche à Khemakhem d’avoir, pour parvenir à ses fins, joué la carte du particularisme régional et du « clanisme ». « À l’unanimité, dit-il, le bureau exécutif a considéré qu’il était de l’intérêt du pays de geler ses activités parce qu’il ne présentait plus les qualités syndicales, professionnelles et morales requises. Celui qui aime une région a tout loisir de la défendre, mais en n’oubliant pas que la région n’est pas la République et que nous sommes tous les fils de la Tunisie. Notre allégeance ne va qu’à un seul homme : le président Ben Ali. »
Cette allégeance contribue à la paix sociale, par le biais d’une entente avec la centrale syndicale et d’un dialogue permanent avec l’administration. « Il y a entre nous une interaction qu’on trouve dans bien peu de pays, commente Djilani. Notre mission étant extrêmement sensible, il nous faut en toutes circonstances nous montrer responsables. »
Son rôle, c’est d’anticiper, de préparer le terrain, de faciliter le travail des entreprises. Pour cela, il agite des idées, parfois sans détours. « Maintenant que nous avons accepté l’ouverture [économique], dit-il, je ne comprends pas que l’administration ou les syndicats continuent à détenir le pouvoir, une notion totalement dépassée dans l’économie moderne. La protection du travailleur, ce n’est pas le droit, mais le marché. » La même règle s’applique aux entrepreneurs : « Il faut en finir avec le système qui consiste à maintenir en vie des entreprises qui ont fait faillite. »
Que faire pour réduire le taux de chômage (14 % de la population active) et notamment celui des diplômés ? « Il faut que nous soyons capables d’employer des jeunes ou, à défaut, faire en sorte qu’ils soient exportables. » L’industrie textile, qui fournit près de la moitié de l’emploi, stagne ? « Il faut plus de valeur ajoutée dans la production, sinon, c’est la mort. » Lorsqu’on lui fait remarquer que l’investissement privé stagne lui aussi, Djilani en impute la responsabilité au marché extérieur. « Nous sommes attachés à l’économie européenne [80 % des échanges extérieurs de la Tunisie], qui, elle-même, se cherche. Si elle ne décolle pas, nous en subirons forcément les conséquences. » La solution ? « L’Union du Maghreb arabe, l’amélioration de notre compétitivité et le développement des secteurs des services et des technologies. »

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