Renaissance

Publié le 13 octobre 2003 Lecture : 2 minutes.

C’est un grand pays, complexe, turbulent et fier à la fois. Ici, on a grandi avec l’histoire des empires sans limites et des rois de légende. On a connu des révolutions,
des coups d’État et des quasi-guerres civiles. On a vécu la grande pauvreté, la décadence et cette misère, cette absence d’espoir qui paralyse. Là, pendant des années, au cur du Sahel, se trouvait une nation, le Mali, une nation sans avenir, sans destin, condamnée à faire la quête.
Et là, de Tombouctou à Gao, de Bamako à Mopti, se déroule, depuis plus de dix ans, l’histoire d’une véritable renaissance. Le pays s’est reconstruit, et surtout s’est réunifié, pansant laborieusement les plaies d’une profonde cicatrice Nord-Sud. Bamako s’est métamorphosé. Le gros bourg poussiéreux, figé dans le temps, avec ses bâtiments administratifs vieux de deux siècles, ses lépreux aux carrefours, laisse place chaque jour un peu plus à un centre économique en plein essor. La diaspora investit et revient construire villas, immeubles et mosquées. Le vénérable hôtel de l’Amitié, ex-monument stalinien en voie d’effondrement, est en pleine rénovation. Le secteur privé a repris l’initiative de la croissance. Ici, on a joué une Coupe d’Afrique des nations de football
en 2002. Ici se tiendra le sommet Afrique-France de 2005. Et c’est ce pays que découvrira Jacques Chirac lors de la visite officielle qu’il effectuera à partir du 24 octobre.
Ici, surtout, se construit tous les jours, sur les ruines de la dictature, une démocratie authentique, avec ses journaux, ses partis, ses têtes brûlées, ses débats musclés. En un peu plus de dix ans, il y a eu trois élections présidentielles, et une dévolution pacifique et ordonnée du pouvoir. Alpha Oumar Konaré, premier président de la nouvelle
République malienne, a su pacifier une nation meurtrie et poser les bases d’un nouveau contrat politique et social. Il a su partir aussi, renoncer à la tentation du pouvoir permanent. Son successeur est un homme d’envergure. Depuis son élection, en juin 2002, Amadou Toumani Touré (ATT) vit un état de grâce. D’ordinaire frondeuse et râleuse, la classe politique malienne s’est mise à l’unisson du président. D’ailleurs, tout le monde ou presque est au gouvernement, et le président n’a pas de parti. La rue respecte ATT, l’homme honnête, qui écoute, qui ménage la tradition et les susceptibilités ; elle respecte cet homme qui croise et recroise le destin du Mali.
Évidemment, ici, rien n’est simple. Le Mali change et les enjeux sociaux se durcissent. Le « Mali d’en haut » respire, s’épanouit, alors que la très grande majorité de la population vit toujours dans la précarité. L’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM), le syndicat qui fut à l’origine de la chute de Moussa Traoré, élève la voix, appelle à la grève. La crise ivoirienne a mis à mal les finances de l’État. Pour ATT et
son équipe, il ne s’agit plus aujourd’hui de montrer les mérites de la renaissance malienne. La bataille est dorénavant économique.

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