Les Centrafricains votent pour leur président et leurs députés sous la menace rebelle
Les bureaux de vote ont ouvert dimanche en Centrafrique pour des élections présidentielle et législatives sous extrême tension dans un pays sous la menace d’une nouvelle offensive rebelle contre le régime du sortant et favori, Faustin-Archange Touadéra.
Nombre de bureaux à Bangui ont ouvert avec 50 minutes de retard ce matin, le matériel de vote n’étant pas arrivé à temps. La capitale est calme mais de très nombreuses patrouilles de Casques bleus et de soldats centrafricains et rwandais patrouillent dans tous les quartiers et ont installé des blindés blancs de la force de maintien de la paix de l’ONU surmontés de mitrailleuses devant les lieux de vote.
Probablement, seule une faible partie des Centrafricains pourront voter librement dans un pays aux deux tiers sous la coupe de groupes armés depuis près de huit ans et dont les plus puissants sont entrés en rébellion il y a neuf jours, jurant de « marcher sur Bangui » pour empêcher les élections.
La légitimité en question
Ils sont cependant pour l’heure tenus à bonne distance de la capitale grâce au renfort de centaines de paramilitaires russes, soldats rwandais et Casques bleus de la force de maintien de la paix de la Mission de l’ONU en Centrafrique (Minusca).
La question de la légitimité des futurs élus – le président et 140 députés – est déjà posée quand une partie importante de la population ne pourra pas voter, ou le faire librement et sereinement, en dehors de Bangui, selon les experts et l’opposition.
Des responsables de l’organe supervisant les scrutins ont indiqué que les opérations de vote seraient prolongées de 50 minutes dans les bureaux ayant ouvert en retard. Comme au lycée Boganda, dans l’est de Bangui. Une trentaine d’électeurs patientaient devant l’établissement à l’ouverture.
Je veux d’abord la paix et cela passe par le vote
« C’est très important pour moi d’être là en tant que citoyenne. Je pense que ce vote va changer notre pays, quel que soit le président », s’enthousiasme Hortense Reine, une enseignante. « Je veux d’abord la paix et cela passe par le vote », renchérit Roméo Elvin, un étudiant de 24 ans.
Bureaux restés fermés
Mais loin de Bangui, des combats sporadiques ont lieu depuis neuf jours.
Des incidents épars étaient rapportés dimanche en milieu de matinée et des milliers de personnes étaient encore privées de leurs cartes d’électeurs jamais arrivées en raison de l’insécurité, selon des responsables locaux et de l’ONU qui ont tous requis l’anonymat.
Ainsi, dans le nord-ouest, à plus de 500 km de Bangui, des rebelles ont saisi du matériel électoral à Koui et des agents électoraux ont été menacés de mort à Ngaoundaye, selon un haut responsable de l’ONU.
À Bokaranga, les rebelles menacent quiconque ira voter. À Bambari, la quatrième ville du pays, à 380 km au nord-est de Bangui, les bureaux de vote sont demeurés fermés le matin en raison de tirs des groupes armés, selon Jeannot Nguernendji, président du comité de paix local.
Nous attendons encore le matériel de vote
Plus près, à Bossembélé, une ville de 50 000 habitants à 150 km de Bangui, « nous n’avons pas reçu les cartes d’électeurs, cela concerne environ 11 000 personnes », se désole une haute responsable de la sous-préfecture. « Nous attendons encore le matériel de vote », déplore aussi en milieu de matinée un agent électoral à Batangafo, à 380km au nord de Bangui.
Opposition dispersée
La Russie, soutenant ouvertement depuis 2018 le gouvernement Touadéra, a envoyé 300 « instructeurs militaires » – en fait des paramilitaires de société privées russes de sécurité – en renfort de centaines de leurs pairs déployés depuis plus de deux ans. Et le Rwanda a dépêché des soldats d’élite hors Minusca, « des centaines », selon Bangui.
L’opposition s’avance en ordre dispersé, avec pas moins de 15 candidats, face à un Touadéra qui a toutes les chances d’obtenir un second mandat. Mais elle accuse le camp du chef de l’État de préparer des fraudes massives pour l’emporter dès le premier tour.
Des milliers de personnes ont été tuées et plus d’un quart des 4,9 millions de Centrafricains ont fui leur domicile depuis le début de la guerre civile, en 2013, quand une coalition à dominante musulmane, la Séléka, a renversé François Bozizé.
Depuis 2018, la guerre a considérablement baissé d’intensité, les groupes armés se disputant le contrôle des ressources tout en perpétrant sporadiquement attaques et exactions contre les civils.
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