Sénégal : à Dakar, Kourtrajmé veut former la prochaine génération du cinéma africain
Un appel à candidatures pour scénaristes et réalisateurs en herbe a été lancé le 14 décembre sur le site de l’école de cinéma dakaroise dirigée par le réalisateur franco-malien Toumani Sangaré. Interview.
Il y a trois ans, le réalisateur césarisé des Misérables, Ladj Ly, lançait dans la ville française de Clichy-Montfermeil la première école « Kourtrajmé » – du nom de l’association et collectif d’artistes œuvrant dans l’audiovisuel depuis 1995 dont il est l’un des membres fondateurs.
L’idée : former une quarantaine de personnes, de tous horizons, aux métiers de scénariste, de réalisateur et, depuis peu, de comédien. En septembre 2020, naît à Marseille une deuxième structure cette fois consacrée à la formation des techniciens de l’audiovisuel (son, régie, maquillage, costumes, etc.).
En février 2021, c’est à Dakar que s’ouvriront les portes de la troisième école Kourtrajmé. « Il est important de rendre accessible à tous un lieu qui permette la transmission et l’apprentissage des métiers du cinéma. Et l’Afrique regorge de talents, explique le réalisateur Ladj Ly, fondateur de l’école Kourtrajmé. Dakar est notre première école sur le continent africain mais nous voulons en ouvrir un maximum pour créer des ponts entre elles, former, développer et produire des films. »
Cette antenne dakaroise, qui a donné naissance à une nouvelle association Kourtrajmé basée à Dakar– et financée, sur trois ans, par l’Agence française de développement (AFD) – sera dirigée par un autre membre fondateur du collectif cinématographique : Toumani Sangaré. Le réalisateur franco-malien, d’ores et déjà basé dans la capitale sénégalaise, a répondu aux questions de Jeune Afrique.
Jeune Afrique : Pourquoi avoir choisi Dakar pour lancer la première antenne africaine de l’école Kourtrajmé ?
Toumani Sangaré : Initialement, nous voulions ouvrir l’école à Bamako, au Mali : Ladj Ly et moi étant tous deux originaires de ce pays. Mais les conditions politiques et sécuritaires n’étaient pas réunies. Nous nous sommes donc tournés vers Dakar.
Avec le recul, nous nous sommes rendus compte que la capitale sénégalaise était devenue un hub, une référence en matière d’audiovisuel dans la sous-région, voire sur l’ensemble continent. Et puis nous travaillions déjà au Sénégal, notamment sur des clips d’artistes et, en ce qui me concerne, sur des séries télé comme Wara.
De surcroît, nous y avons trouvé le lieu idéal : l’ancien atelier de feu Ousmane Sow situé à la Cité Elizabeth-Diouf, à Hanne Mariste. Ce sont les héritiers du sculpteur qui ont mis ce lieu chargé d’histoire à notre disposition. Ils nous ont soutenus d’emblée. Pour eux, ça faisait sens dans la mesure où leur père adorait le cinéma.
Quel est le profil des candidats que vous espérez voir intégrer l’école ?
L’école est gratuite et ouverte à tous, car Kourtrajmé est une association à but non lucratif. Pour ce qui est de l’âge, la seule condition est d’être majeur. Les écoles de cinéma sur le continent sont coûteuses. Il n’est pas facile d’évoluer dans ce milieu. Aussi, nous nous attacherons à des profils de personnes extrêmement motivées et qui sauront nous proposer des projets qui nous parlent artistiquement. Ces profils seront sélectionnés par un comité. Comme à Clichy-Montfermeil, nous formerons 15 personnes pour la session « écriture », qui sera assurée par Augustin Ngion, puis 25 personnes pour la session « réalisation et post-production » après un deuxième appel à candidatures. Nous cherchons encore le formateur.
Nous privilégions une équipe pédagogique qui connaisse les réalités ou soit issue du continent. À Clichy-Montfermeil, on a vu arriver des candidats qui ne connaissaient pas du tout ce milieu alors même que leur lettre de motivation et idée de scénario nous ont convaincus. Nous voulons créer un groupe hétéroclite, transgénérationnel, mixte tant socialement que du point de vue du genre.
Quels sont les futurs projets que l’école Kourtrajmé de Dakar sera amenée à réaliser ?
Nous allons plancher sur un court-métrage et une mini-série. À l’issue de notre session d’écriture, un scénario sera sélectionné. L’idée est de pouvoir développer les éléments d’un pilote. Celui-ci mettra en valeur nos différents talents. L’idée est de leur mettre le pied à l’étrier avec un volet pédagogique comprenant de la mise en situation mais aussi de la théorie. Ils auront ensuite le choix de travailler plus profondément sur ces projets afin que ces derniers puissent, éventuellement, intéresser une chaîne de télévision.
Les six premiers mois suivant l’ouverture seront consacrés à l’écriture – soit de février à juillet 2021. Après une pause en août, les 25 autres profils choisis s’attelleront à la réalisation de septembre 2021 à janvier 2022. Bien entendu, le relais entre scénaristes et réalisateurs sera assuré. Puis, nous enchaînerons avec une nouvelle année qui pourra donner naissance à d’autres types de formations. Nous travaillons encore là-dessus.
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