Grands maux, grands remèdes

Au Togo, la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge s’apprêtent à lancer une campagne d’une ampleur inédite contre la rougeole et le paludisme.

Publié le 13 septembre 2004 Lecture : 3 minutes.

Du 8 au 13 septembre, 700 délégués des 53 sociétés africaines de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge se sont retrouvés à Alger, qui accueillait la VIe conférence panafricaine de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, la plus grande organisation humanitaire au monde. « Nous allons fixer les grandes orientations de notre agenda d’action des quatre prochaines années, expliquait Roy Probert, chargé de communication au siège genevois de la Fédération, avec des priorités inchangées : prévention, accès aux soins de base, lutte contre la pandémie du sida et bataille pour la sécurité alimentaire. Mais nous allons aussi dévoiler les contours d’une initiative sans précédent, la campagne intégrée de lutte contre la rougeole et le paludisme au Togo, la première jamais réalisée à l’échelle d’un pays tout entier. Ce sont 730 000 moustiquaires imprégnées d’insecticide longue durée qui seront distribuées à la population togolaise, en même temps que seront vaccinés contre la rougeole tous les enfants en bas âge. Nous attendons de très importantes retombées médiatiques et politiques de cette opération. Car, pour la première fois, nous allons mesurer scientifiquement l’impact de notre action en termes de chute de la mortalité infantile. Les résultats des enquêtes épidémiologiques nous serviront ensuite d’argument pour mobiliser gouvernements et donateurs et pour les convaincre de rééditer l’expérience dans d’autres régions impaludées d’Afrique ou d’Asie. »
La campagne intégrée contre la rougeole et le paludisme au Togo, qui commencera en décembre pour une durée de deux mois, a été précédée de deux programmes pilotes conduits avec succès, mais sur une moindre échelle, au Ghana en 2002 et en Zambie en 2003. Elle sera menée en partenariat avec entre autres le ministère togolais de la Santé, la Croix-Rouge togolaise, les Croix-Rouge américaine et canadienne, l’Organisation mondiale de la santé et le Fonds des Nations unies pour l’enfance (l’Unicef)… La réussite du projet, lourd à monter au plan logistique – dix-neuf conteneurs de moustiquaires seront acheminés depuis le Vietnam et la Malaisie – dépend avant tout de la mobilisation en amont des milliers de volontaires togolais de la Croix-Rouge. En contact avec les populations isolées, ils accomplissent un travail de fourmi. « Nous ne pourrons évidemment pas aller dans chaque maison, explique le Dr Bernard Morinière, épidémiologiste, l’un des maîtres d’oeuvre du programme. Il faut faire en sorte que les familles se rendent aux points de distribution le jour J et en repartent avec les moustiquaires. Les volontaires sont irremplaçables, ce sont eux qui font du porte-à-porte et sensibilisent les communautés villageoises. C’est ce réseau qui fait la grande force de la Croix-Rouge. Avec ses volontaires, au nombre de deux millions en Afrique, elle a un pied dans chaque village et, en même temps, avec le secrétariat de Genève, elle a une voix internationale. »
Chaque année, et malgré d’innombrables campagnes de vaccination ou de prévention, des millions d’enfants meurent de maladies pour lesquelles il existe des remèdes. « C’est que, au lieu d’agir de façon concertée, pendant longtemps, chacun a travaillé dans son coin sans se soucier de ce que faisait l’autre, poursuit le Dr Morinière. Les enfants étaient vaccinés contre la poliomyélite ou la rougeole, mais mouraient du paludisme. Aujourd’hui, avec les coalitions internationales de donateurs qui se mettent en place, l’approche a radicalement changé, et l’efficacité de nos actions va s’en trouver considérablement renforcée. »
Le recours systématique aux volontaires locaux, qui connaissent le terrain mieux que personne et savent comment faire pour surmonter les résistances culturelles des populations, constitue l’autre innovation sur laquelle vont se pencher les conférenciers réunis à Alger. Au Congo-Brazzaville, début 2003, les bénévoles de la Croix-Rouge ont permis par exemple de stopper la dernière épidémie de fièvre hémorragique Ebola, sans qu’aucune perte ne soit à déplorer dans leurs rangs. Et ils sont aussi à la base du succès des récentes campagnes d’aide à domicile aux malades du sida orchestrées au Zimbabwe par les « femmes en bleu » – le surnom sous lequel sont connues les auxiliaires de la Croix-Rouge dans ce pays…

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