Beyers Naudé, « albinocrate » repenti

Publié le 13 septembre 2004 Lecture : 2 minutes.

Il a passé une partie de sa vie à défendre les « vertus » de l’apartheid, l’autre à pourfendre la politique de « développement séparé » et la discrimination raciale. Christiaan Frederick Beyers Naudé, pasteur et – sur le tard – figure de proue de la lutte antiapartheid, est mort le 7 septembre des suites d’une « combinaison de problèmes de circulation sanguine et d’un âge avancé. » Dixit ses proches. Il avait 89 ans.

Né dans une famille aristocratique afrikaner, ministre du Culte au sein de la très conservatrice et – naguère – raciste Église réformée de Hollande, formé à l’université Stellenbosch, vivier des théoriciens de l’apartheid, il avait appartenu à la Boederbond (Fraternité), cercle fermé d’où partaient les directives censées « préserver » la pureté de la race blanche. Puis, à la surprise générale, Naudé avait subitement renié ses convictions (et sa communauté) au lendemain des massacres de Sharpeville, en 1960. Il avait alors entamé une nouvelle croisade. Cette fois-ci contre le régime ségrégationniste.

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Traité de tous les noms – traître, communiste, terroriste -, il fut brutalement débarrassé de sa charge pastorale, harcelé par le pouvoir « albinocrate » sud-africain, banni par les siens. Il n’en eut cure. Figure charismatique, Naudé, plus connu en Afrique du Sud sous le surnom affectueux de « Oom Bey » (Oncle Bey), avait fait partie de la délégation du Congrès national africain (ANC) aux discussions engagées avec le régime après la libération de Nelson Mandela, en février 1990, et qui ont conduit, en 1994, aux premières élections démocratiques. Il avait même rejoint l’Église réformée d’Afrique, à la tête de laquelle il avait remplacé l’archevêque Desmond Tutu, Prix Nobel de la paix 1984.

Fatigué et malade, il avait considérablement réduit ses apparitions publiques ces dernières années, laissant bien souvent à son épouse et compagne de lutte, Ilse, le soin de le représenter à l’occasion des nombreux hommages qui lui étaient rendus à travers le pays. Lors d’une fête organisée pour ses 80 ans, en mai 1995, Nelson Mandela, alors chef de l’État, avait souligné qu’il était un « phare » pour tous les Sud-Africains : « Beyers Naudé a été rejeté par les Afrikaners, par de nombreux Blancs et par l’Église qu’il aimait tant. Tel est le prix que les prophètes doivent payer. »

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