Mohamed Caabi Elyachroutu
Vice-président de l’Union des Comores
Mohamed Caabi Elyachroutu, l’un des deux vice-présidents de l’Union des Comores, était de passage à Paris fin mai. De retour d’une mission à Genève, il nous a rendu visite au 57 bis, rue d’Auteuil. L’occasion de faire le point sur la situation économique et sociale délicate de l’archipel, pénalisé par l’effondrement des cours de la vanille, la première richesse du pays. L’occasion, également, de revenir sur une actualité politique toujours foisonnante : les Comores sont en campagne électorale permanente… Et la perspective des présidentielles de l’Union, prévues pour 2006, aiguise tous les appétits.
Caabi, qui a profité de son séjour parisien pour rencontrer des responsables de la cellule africaine de l’Élysée, a plaidé, sans succès apparemment, pour un meilleur accompagnement financier du processus de réconciliation dans son pays. « Nous sortons de presque huit années de crise institutionnelle. L’attention de tous a été focalisée sur les questions de personnes et sur l’affaire du séparatisme anjouanais, l’île dont je suis originaire. Mais le vrai problème des Comores, c’est le développement. Le dialogue avec le Fonds monétaire international (FMI) progresse, une mission d’experts a séjourné récemment à Moroni et devrait revenir en août, pour décider, du moins l’espérons-nous, de la mise en place d’un programme FRPC (facilité pour la réduction de pauvreté et la croissance). Mais d’ici là, nous avons besoin d’un coup de pouce budgétaire. Le pays vit une période dramatique, les cours de la vanille se sont effondrés, ils ont diminué de 80 %, les cultivateurs se sont endettés et se retrouvent avec toute leur production sur les bras. Cette conjoncture a provoqué une chute de nos recettes douanières et budgétaires. Et comme si cela ne suffisait pas, nous devons faire face aux conséquences coûteuses de l’installation des nouvelles institutions fédérales. La masse salariale de la fonction publique a explosé, même si nous pensons la ramener aux alentours de 11 milliards de francs comoriens [22,5 millions d’euros, NDLR]. »
Les Comores, pour sortir de l’ornière, ont également besoin d’investissements étrangers. Les opportunités existent, notamment dans les secteurs du tourisme et de la pêche. « Mais sans stabilité, sans confiance, personne ne viendra », résume le vice-président. Et la présidentielle de 2006 sera un test. Le président de l’Union, Azali Assoumani, originaire de l’île de la Grande Comore, élu pour quatre ans en 2002, devrait passer la main pour respecter le principe de la « présidence tournante d’île en île », qui constitue la pierre angulaire des nouvelles institutions. Normalement, même si formellement rien n’est acquis, car le vote des lois organiques fixant précisément les modalités de cette tournante a pris un certain retard, un Anjouanais devrait lui succéder. Et il se murmure avec insistance que Mohamed Caabi Elyachroutu tiendrait la corde.
Cet Anjouanais de 56 ans, unioniste convaincu, membre de la mouvance présidentielle, la Convention pour le renouveau des Comores (CRC) d’Abdou Soefo, a pour lui une déjà longue expérience de la politique. Après des études en économie, finances et banque, à Nice et à Paris, il a été directeur général de la Banque de développement des Comores, de 1982 à 1992, avant de devenir ministre des Finances sous la présidence de Saïd Djohar. Artisan de la mise en oeuvre du premier plan d’ajustement structurel, il est évincé en 1993, mais revient aux affaires en avril 1995, et hérite du poste de Premier ministre. En première ligne lors du dernier coup d’État du mercenaire français Bob Denard, il organise la transition jusqu’à l’élection du président Taki Abdoulkarim, en 1996. Après un bref détour par le monde associatif, à la tête de l’ONG « SOS Espoir », il est nommé secrétaire général de la Commission de l’océan Indien (COI), en 1997, et basé à Maurice. Son mandat expire en 2001, et, en 2002, il accepte de faire ticket avec le président Azali, la personnalité qui incarne le mieux à ses yeux la réconciliation nationale.
Flatté qu’on pense à lui pour 2006, Caabi Elyachroutu assure cependant qu’il n’est aujourd’hui « candidat à rien », même si des comités de soutien « spontanés » ont commencé à voir le jour ici et là. Cumulant le portefeuille de la Santé avec la vice-présidence, il entend se consacrer entièrement à son département ministériel. Pour l’instant, du moins.
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