Qui est Ghazi Gherairi, le représentant de la Tunisie à l’Unesco ?

Poterie de Sejnane, pêche à la charfiya, harissa… Depuis sa nomination en 2016 à l’Unesco, le diplomate s’attelle à porter plusieurs pans de la culture et de la civilisation tunisienne au panthéon du patrimoine mondial.

Cérémonie de réception des lettres de créance :  l’ambassadeur délégué permanent de Tunisie, Ghazi Gherairi, avec la directrice générale de l’Unesco, Irinia Bokova. © Christelle ALIX/UNESCO

Cérémonie de réception des lettres de créance : l’ambassadeur délégué permanent de Tunisie, Ghazi Gherairi, avec la directrice générale de l’Unesco, Irinia Bokova. © Christelle ALIX/UNESCO

Publié le 25 janvier 2021 Lecture : 4 minutes.

Discret, au point que les moteurs de recherche affichent d’abord le parcours d’un de ses homonymes, Ghazi Gherairi, juriste respecté par ses pairs, apporte une dynamique positive à la diplomatie tunisienne dans un contexte régional qui se préoccupe peu de culture.

Parmi ses nombreux dossiers, l’ambassadeur-délégué permanent de la Tunisie auprès de l’Unesco se penche actuellement sur celui de la harissa et de la sociologie qui s’y attache. Un sujet qui peut paraître futile mais la pâte de piment rouge bien épicée, qui arrache parfois les papilles, est l’un des savoir-faire tunisiens ancestraux que l’ambassadeur voudrait voir inscrire au patrimoine immatériel mondial. « La gastronomie et les traditions culinaires sont des savoir-faire à protéger », commente celui qui sait que saveurs et savoirs ont une étymologie commune. Il la qualifie même de « marqueur de la tunisianité comme le couscous l’est pour la maghrebinité ».

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Sa démarche cible dans le mille : depuis 2017, elle a permis de valoriser et pérenniser la poterie de Sejnane, le palmier dattier, la pêche à la charfiya aux îles Kerkennah, mais aussi le couscous – une initiative commune à l’Algérie, au Maroc, à la Mauritanie et à la Tunisie. Mais le diplomate ne compte pas en rester là : devant les différentes instances de l’Unesco, il a dans sa besace des plaidoyers pour l’école kairouanaise de calligraphie, l’habitat troglodytique du sud tunisien, la table de Jugurtha de Kalaat Snen (Ouest) ou encore les trésors sonores de la musique arabo-andalouse.

Enfant de Halfaouine

Au-delà des inscriptions, l’embellie tunisienne à l’Unesco est remarquable. Récemment élue dans un groupe des plus difficiles au Conseil exécutif, elle préside la Convention sur le patrimoine subaquatique ainsi que le redouté Comité sur les conventions et recommandations. Il aime à dire : « La Tunisie y avait un siège, désormais elle y a une voix ».

Sous son allure contenue et son calme apparent, ce descendant de Sahraoui porte l’empreinte de Tunis. Il a grandi au cœur de Halfaouine, l’un des faubourgs les plus vivants de la capitale et a suivi ses études au collège Sadiki, institution phare du réformisme tunisien.

Fier d’être « un produit de l’école publique tunisienne », il a été propulsé dans l’actualité par la révolution de 2011

Fier d’être « un produit de l’école publique tunisienne », il a été propulsé dans l’actualité par la révolution de 2011. Avec un groupe restreint de constitutionnalistes, il a participé, sous la férule du professeur Yadh Ben Achour, à un début de réécriture de lois politiques majeures qu’imposait la chute du régime de Ben Ali. Très vite, les événements ont fait du groupe le socle de la « Haute instance de réalisation des objectifs de la révolution, de réforme politique et transition démocratique » en Tunisie, qui jettera les fondamentaux de la seconde République.

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Ghazi Gherairi, alors la quarantaine à peine entamée, sera son porte-parole et mettra au service de cette étape historique son savoir en droit constitutionnel et en droit international qu’il a enseignés à l’Université de Carthage, à l’Institut diplomatique ainsi qu’à la Tunis School of Politics.

Son expertise le conduit naturellement à apporter son appui à la rédaction de la nouvelle loi fondamentale dans le cadre du Dialogue national, qui vaudra à la Tunisie le prix Nobel de la paix en 2015, et que Ghazi Gherairi documentera pour les Nations unies. Il est sollicité pour les nouveaux processus constituants, notamment en Libye et au Yémen, et ne perd pas de vue son intérêt pour le droit.

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Prévention de l’extrémisme

Mais il développe d’autres axes de réflexion, essentiellement autour de la prévention de l’extrémisme violent. Un sujet d’actualité dans une région en ébullition. Le prix Lysistrata pour le règlement pacifique des conflits par la médiation récompense son approche en 2017.

Ghazi Gherairi n’est jamais meilleur que lorsqu’il évoque son pays, surtout quand il s’agit de sa culture sur laquelle il semble intarissable. Le hasard du calendrier, mais aussi sa gestion des dossiers, mettent Djerba sur sa route. En tant que représentant de la Tunisie à l’Unesco, il s’apprêtait à déposer un dossier de demande pour inscrire l’île au patrimoine de l’humanité quand il s’est vu, début janvier 2020, adjoindre par le président tunisien, Kaïs Saïed, la mission d’ambassadeur-délégué permanent de la Tunisie auprès de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF). Une mission pour laquelle sa priorité est de veiller aux préparatifs du 18e sommet de la Francophonie, qui coïncide avec le 50e anniversaire de l’OIF et que la Tunisie, en tant que membre fondateur, organise à Djerba les 20 et 21 novembre 2021.

Autant de choix, de circonstances et de croisements de parcours qui confirment qu’un positionnement international fondé sur les atouts bien compris de la Tunisie et à un dynamisme de bon aloi, esquissent les contours d’un autre possible diplomatique. Ghazi Gherairi, à la fois diplomate et universitaire, en apporte, dans la discrétion, une preuve édifiante.

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