Hommage à Marcel Péju

Notre collaborateur est décédé à Paris le 4 décembre 2005, à l’âge de 83 ans.

Publié le 12 décembre 2005 Lecture : 2 minutes.

Difficile de trouver les mots justes en pareilles circonstances La lumière s’est éteinte. Marcel nous a quittés dans la nuit du 3 au 4 décembre. La nouvelle de son décès a été pour toute la rédaction un choc immense. Pour ceux qui le côtoyaient depuis longtemps au sein de J.A.I. mais aussi pour les plus « jeunes », dont je fais partie. Nous voyions souvent en lui une encyclopédie vivante. Amadou Hampaté Bâ écrivait : « Un vieillard qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle. » Cette phrase prend ici tout son sens La simple évocation de son passé, des Sartre, Aragon, Ben Bella, pour ne citer qu’eux, avec lesquels il a travaillé et milité, nous inspirait un profond respect.
Une semaine avant son décès, Marcel travaillait sur un article qu’il devait nous remettre rapidement. Il l’avait accepté avec gourmandise. Écrire était pour lui un besoin quasi vital. Diminué depuis plusieurs mois il ne venait plus que très rarement au journal , il ne cessait de nous relancer pour que nous lui donnions du travail. Quelques jours avant la remise de son article, sa fille nous a prévenus de son hospitalisation. Les nouvelles n’étaient toutefois pas alarmantes. Il n’était donc question que de reporter
la remise de son texte d’une ou deux semaines. Le destin en a décidé autrement
Mais Marcel Péju était bien plus, évidemment, qu’un simple journaliste. Né à Lyon en 1922, il a vécu, souvent de l’intérieur, toutes les grandes dates du siècle dernier. La
Seconde Guerre mondiale et la Résistance, dans laquelle il s’engagea, la Libération, la guerre du Vietnam, celle d’Algérie, etc.
Il connut deux grandes « passions » : la Pologne et l’Algérie. La première dès 1956. Visites régulières et publication, pour la première fois en français, d’écrivains aujourd’hui célèbres (Brandys, Mrozek, Rudnicki, Kolakowski, etc). Pour ce qui est de l’Algérie, son engagement fut d’abord intellectuel avant de devenir militant, avec le
Front de libération nationale. Il s’y lia à Ben Bella et aux autres « chefs historiques ». C’est d’ailleurs, paraît-il, ce militantisme qui sera à l’origine de sa rupture avec Sartre, du fait de ce dernier.
Enfin, 1979, date à laquelle il intègre la rédaction de Jeune Afrique, mais perd également sa première épouse Paulette Flachat, rencontrée au début des années 1940 alors
qu’elle était étudiante en philo, et avec laquelle il aura trois enfants. Il se remariera en 1980 avec Ludmilla Murawska, artiste-peintre polonaise et « vedette », entre 1955 et 1963, du plus célèbre théâtre privé de Varsovie.
Avant Jeune Afrique, il fut secrétaire général des Temps modernes de 1953 à 1962. Citons également, pêle-mêle, parmi les publications auxquelles il collabora, l’hebdo d’information Samedi-Soir, le mensuel Constellation, qu’il quittera en 1966 pour Sciences et Vie, puis les éditions américaines Grolier International.
Nous garderons tous de Marcel l’image d’un homme engagé, rigoureux, sensible et plein d’humour. Un personnage hors norme comme il en reste peu, d’une discrétion rare. Nous ne le verrons jamais plus parcourir les longs couloirs de nos locaux du 57 bis, rue d’Auteuil de sa démarche empruntée. Sa disparition laisse dans nos curs un vide immense.

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