Wangari Maathai

Ancienne vice-ministre kényane de l’Environnement, Prix Nobel de la paix 2004

Publié le 13 novembre 2007 Lecture : 3 minutes.

Wangari Maathai, prix Nobel de la paix 2004, est bien plus qu’une simple militante écologiste. Ex-candidate à la présidentielle kényane de 1997 et ancienne vice-ministre de l’Environnement du président Mwai Kibaki, elle fait de la protection de l’environnement un enjeu politique majeur pour le continent.

Jeune Afrique : Pourquoi soutenez-vous le chef de l’État kényan Mwai Kibaki pour la présidentielle de décembre prochain, alors que nombre de ses anciens supporteurs ont décidé de rallier le camp de son adversaire Raila Odinga ?
Wangari Maathai : Je ne vois pas pourquoi j’abandonnerais le président Kibaki pour Odinga. Je pense qu’il a fait avancer beaucoup de choses. Il a abattu un travail remarquable. On peut toujours regretter que le mémorandum de bonne entente qui liait Odinga et Kibaki ne soit pas allé jusqu’au bout. Mais je trouve que l’action que le chef de l’État a menée dans ce pays mériterait davantage de considération.

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Que pensez-vous du régime du président zimbabwéen Robert Mugabe, si violemment critiqué par les Occidentaux ?
Le cas Mugabe est une question très complexe qu’il faut aborder dans sa globalité. Pour ma part, je refuse tout manichéisme. La crise zimbabwéenne a des racines historiques. Il ne faut pas ignorer la responsabilité de la Grande-Bretagne, ni celle de l’ancien régime de Ian Smith. Pour sortir le pays de la crise, il est nécessaire que toutes les parties négocient, le gouvernement zimbabwéen, l’opposition, la Grande-Bretagne Certains pays africains doivent s’impliquer, comme l’Afrique du Sud tente de le faire. L’Union africaine doit également s’engager. Mais Mugabe ne manque pas d’arguments. Vous savez, j’ai pu assister à un sommet de l’UA où il s’adressait à ses pairs. Eh bien, il est parvenu facilement à s’assurer de leur soutien.

Votre pays porte-t-il un regard différent sur les questions environnementales depuis que vous avez reçu le prix Nobel en 2004 ?
Je pense que beaucoup de choses pour lesquelles j’ai milité ont été prises en compte. Mais c’est l’Afrique tout entière qui est entrée dans une ère nouvelle marquée, notamment, par l’émergence d’une meilleure gouvernance. Nos dirigeants et nos élites ont pris conscience de la nécessité de gouverner dans l’intérêt des populations. Et cela passe par la protection des ressources de tout le continent.

Comment convaincre les Africains de l’importance de cet enjeu ?
En parlant de protection de la forêt, de biodiversité, de préservation des espèces. Ces considérations peuvent paraître illusoires pour des personnes davantage préoccupées par leur quotidien, mais il faut faire appel à la raison. Je leur explique que s’ils ne prennent pas soin de l’environnement, ils se mettent eux-mêmes en danger. Aux paysans, par exemple, je dis : « Si vous ne préservez pas la terre, où allez-vous cultiver ? Si vous ne la protégez pas de l’érosion, où allez-vous faire pousser vos plantes ? Allons-nous laisser nos enfants et nos petits-enfants vivre dans une Afrique désertique sans fleuves, ni lacs, ni pluies, et ce parce que nous n’avons pas su sauvegarder notre écosystème ? »

Que pensez-vous de la manière dont l’agriculture est pratiquée aujourd’hui sur le continent ?
Dans de nombreux pays, elle s’est modernisée. Mais elle porte presque essentiellement sur les produits d’exportation. Au Kenya, par exemple, nous produisons du café et du thé. Mais on ne se nourrit ni de thé ni de café chez nous. L’agriculture vivrière ne bénéficie que de peu d’investissements si bien que nous devons importer les produits dont nous avons besoin. Aussi, je me félicite de cette excellente idée de l’ancien secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, qui veut développer la révolution verte en Afrique.

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