Ce que la réforme de l’Union africaine va changer
Le 34ème sommet de l’Union africaine s’ouvre samedi à Addis-Abeba et devrait notamment reconduire Moussa Faki Mahamat à la tête de la Commission. Il s’agira de la première élection depuis le processus de réformes entamé en 2016.
Ce samedi 6 février s’ouvre, à Addis-Abeba, le 34ème sommet des chefs d’État de l’Union africaine (UA). Au cours de ce rendez-vous, qui se déroulera pour l’essentiel en visioconférence, le Congolais Félix Tshisekedi prendra le relais du Sud-Africain Cyril Ramaphosa à la présidence tournante de l’organisation et Moussa Faki Mahamat devrait être reconduit à la tête de la Commission de l’UA.
Si le Tchadien est l’unique candidat à sa propre succession, cette élection n’est pas pour autant dénuée d’enjeux : il s’agira de la première depuis que le processus de réformes confié au Rwandais Paul Kagame et porté par Moussa Faki Mahamat a été lancé. « Nous sommes à la fin d’un processus qui a commencé en juin 2016 », commente Pierre Moukoko Mbonjo, ex-ministre camerounais des Relations extérieures, qui pilote la cellule de mise en œuvre de la réforme institutionnelle de l’UA. Ces changements sont censés rendre l’organisation plus efficace mais aussi la recentrer sur ses missions prioritaires.
Parité et fiches de poste
S’il est réélu, Moussa Faki Mahamat devra nécessairement être secondé par une vice-présidente – c’est désormais la règle. À l’inverse, si une femme devait reprendre les rennes de cette instance, son vice-président serait un homme. Que Moussa Faki Mahamat soit le seul candidat induit que le mandat du Ghanéen Kwesi Quartey à la vice-présidence ne sera pas reconduit. Kigali, qui vise le poste, a présenté la candidature de l’économiste Monique Nsanzabaganwa, gouverneure adjointe de la Banque nationale du Rwanda. La même règle s’appliquera désormais pour l’élection des commissaires : une parité parfaite devra être respectée, dans le respect des équilibres régionaux.
Les modalités de présélection ont quant à elles radicalement changé et sont d’ores et déjà en cours d’expérimentation. Pour le renouvellement des membres de la Commission, les chefs d’État ont ainsi élaboré des fiches de poste précises pour chaque département retenu. La réforme ayant réduit à six le nombre de commissaires, huit postes sont à pourvoir, dont la présidence et la vice-présidence.
Fin mai, les fiches ont été adressées au conseiller juridique de la Commission, lequel a publié sur le site internet de l’organisation un appel à candidatures ouvert aux ressortissants des États membres de l’Union. Ceux-ci disposaient alors de trois mois pour déposer leurs dossiers sur le bureau du doyen des ambassadeurs – accrédités auprès de l’UA – de leurs régions respectives. Une étape censée inciter les États à se concerter au préalable au niveau régional.
Ensuite, ledit doyen saisit le Conseiller juridique de la Commission, qui lui-même transmet les dossiers à un panel de « sages » composé de personnalités africaines choisies dans chacune des cinq régions du continent. Si celui-ci est supposé compter cinq membres, on n’en recense pour l’instant que quatre, l’Afrique du Nord n’ayant pas encore pu désigner son représentant : le Camerounais Philémon Yang (Centre), l’Éthiopienne Konjit Sinegiorgis (Est), le Namibien Tuliameni Kalomoh (Sud) et le Gambien Hassan Bubacar Jallow (Ouest).
Pouvoir sur les commissaires
Pour assister le panel dans son travail de présélection des dossiers de candidature, l’Union africaine a recruté le cabinet de conseil et d’audit PwC Afrique. Chaque prétendant, soutenu par son gouvernement, est ainsi évalué. La liste définitive, établie à la suite des entretiens, a été envoyée le 7 octobre aux États-membres et en particulier aux dix-huit pays ayant présenté un ou des candidats.
S’agissant du président et de la vice-présidente, le processus de sélection est plus politique. Il prévoit, entre autres étapes, un débat radiodiffusé opposant les candidats. Moussa Faki Mahamat étant le seul candidat en lice, cette confrontation n’aura pas lieu cette année.
L’organisation ne tiendra désormais qu’un seul grand sommet annuel, au lieu de deux
Jusqu’à présent, les États membres de l’UA élisaient non seulement le président de la Commission mais aussi, directement, son vice-président et chacun des commissaires. Cela avait pour conséquence de saper l’autorité du président de la Commission, qui n’avait pas le pouvoir de nommer ou de révoquer un commissaire. Cette situation avait été identifiée comme problématique dès 2007 dans un rapport signé par le Nigérian Adebayo Adedeji, mais dont les conclusions étaient restées lettre morte. Lors du sommet extraordinaire de juin 2018, le problème avait été de nouveau posé dans la proposition de réforme, mais la majorité des États s’était opposée à l’idée de faire du président de la Commission un « dictateur » ayant pouvoir de nommer et révoquer les commissaires.
Décision a également été prise de ne garder qu’un seul grand sommet annuel de l’organisation au lieu de deux. Le sommet anciennement convoqué en juin est censé ne plus être qu’une réunion de coordination entre les communautés économiques régionales.
Il fallait également recentrer l’UA sur ses missions prioritaires. Quatre domaines ont donc été identifiés et serviront de boussole à la nouvelle commission : les affaires politiques ; la paix et la sécurité ; l’intégration économique (Zlecaf) et la représentation globale du continent.
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